Sylvain Delmé a récemment dévoilé le teaser de sa websérie Normal, qui s’attaque à la caricature politique en animation 3D. |
L’originalité du concept et son pipeline atypique, faisant usage de motion capture (et des services de Mocaplab en particulier), nous ont donné envie d’en savoir plus sur ce projet ; nous vous proposons donc de revenir plus en profondeur sur les coulisses de la série ! |
Normal, le teaser :
3DVF : Bonjour Sylvain, et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Pour commencer, peux-tu nous présenter le projet de Websérie Normal ? Sylvain Delmé : Normal, ce sont les chroniques décalées de la vie intime et publiques de François Normal, président de la république de son état. 3DVF : Comment est venue l’idée du concept ? Sylvain Delmé : En Juin, un soir où le président était invité au journal de 20 heures. Durant toute l’interview il n’a cessé de mettre l’accent sur sa volonté d’être un homme normal. |
Le premier épisode de la websérie : |
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3DVF : Tu n’en es pas à ton coup d’essai dans le domaine de la caricature politique, puisque tu avais déjà réalisé deux clips mettant en scène un certain… Nicolas Sarkozy, là aussi en 3D. Pourquoi cet attrait pour ce domaine ? Sylvain Delmé : C’est très simple : j’adore l’animation la caricature politique et les clips. Nicolas Sarkozy, avec son outrance, était un client parfait pour le clip qui déchire qui caricaturait son goût assumé pour le « Bling Bling ». Quant à François Hollande avec son obsessionnelle envie de ressembler à monsieur tout le monde, je le trouve tout autant inspirant même si le personnage appelle un traitement totalement différent. Cela dit, je n’exclus pas de le faire jouer dans un clip lui aussi… |
3DVF : L’équipe comporte un caricaturiste, Claude Richard, ainsi que le modeleur Edouard Chambonnet. Comment s’est déroulée leur collaboration pour arriver au personnage final ? Sylvain Delmé : J’ai découvert le travail de Claude au moment où j’ai commencé mes recherches graphiques sur le personnage. J’aime beaucoup la manière dont il croque ses « proies » d’un trait très épuré. Les proportions de ses visages ne sont pas trop éloignées des proportions humaines ce qui est fondamental pour la transposition sur un personnage destiné à être animé en motion capture. Quant à Edouard, on se connaît depuis un bon moment maintenant. Il a collaboré au clip qui déchire ainsi qu’à la série le miroir. C’est un excellent modeleur, et un setuper de haut vol. C’est en tant que pote aux doigts de fée que je lui ai demandé un coup de main sur le projet. |
Ci-dessous : caricatures de François Hollande par Claude Richard. |
Modélisation de François Normal.
3DVF : De quelle façon la société MocapLab, qui a réalisé la motion capture, s’est-elle retrouvée impliquée sur le projet ? Pourquoi avoir fait appel à eux et pas à un autre prestataire ? Sylvain Delmé : J’ai découvert une vidéo assez incroyable réalisée par l’équipe de Rémi Brun (CEO de Mocaplab) il y a plusieurs mois : Un robot semblant sortir tout droit d’I, Robot déclame du Jean De La Fontaine avec la voix et la gestuelle de Fabrice Luchini (voir ci-contre, NDLR). J’ai trouvé le résultat complètement bluffant et je me suis dit que c’était avec eux que je devais bosser sur un projet comme Normal. J’ai alors rencontré Rémi pour lui présenter le projet dans l’optique qu’il m’établisse un devis. Mais à ma grande – et très agréable – surprise, il a décidé d’investir les équipes de Mocaplab dès le départ pour la réalisation des premiers épisodes. Concrètement, comment se sont déroulées les séances de motion capture ? La capture du corps et de visage se faisait-elle simultanément ? Sylvain Delmé : Ce qu’il y a de génial pour un réalisateur, c’est que la technique développée par Mocaplab permet d’enregistrer quasiment dans les mêmes conditions que le « Live action » ( avec les soucis de lumière et de perche dans le champ en moins ! ). |
Tout est fait en même temps. Y compris l’enregistrement des dialogues. Du coup, je pouvais me concentrer pleinement sur la direction d’acteur qui est particulière puis qu’il s’agit de demander à un comédien d’interpréter un « toon ». Et Pascal fait ça très bien ! |
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3DVF : La motion capture peut nécessiter un certain » nettoyage » des données, ou des retouches pour améliorer l’animation. Était-ce le cas pour ce projet ? Quels éléments ont posé le plus de problèmes ? Sylvain Delmé : Normal fait appel à la motion capture complète (corps, visage, yeux, doigts et son) que peu de gens produisent actuellement. La grande résolution des caméras de motion capture de Mocaplab nécessaires pour ce type de Mocap fait que les données sont extrêmement propres et ne nécessitent plus de « nettoyage » tel que nous pouvions le concevoir il y a quelques années. En ce qui concerne les retouches il reste toujours quelques réglages à effectuer pour finaliser le retargetting et les contacts avec les décors ou des props spécifiques. Suite à ça, il reste une passe de validation (polish) une fois l’axe des cameras et les valeurs de plan connues mais très rarement de l’animation supplémentaire au sens habituel du terme (retouche artistique qui s’éloignent du jeu du comédien), on n’a pas le temps. La question la plus sensible est celle qui touche aux réglages fins pour gérer le transfert du jeu facial d’un comédien sur un personnage 3D à physionomie très différente (on n’est pas dans le clone). Dans ce pilote, pas de préprod. Donc les réglages du transfert d’animation faciale qui nécessitent de nombreux allers-retours entre trois corps de métiers (modeleurs, riggeurs, mocapeurs) ont été réduits au minimum à cause des délais… Mais c’était le défi… sur une série on aura le temps de peaufiner cet aspect avec une petite préprod. Le gros challenge de cette production est le temps très serré imparti à la fabrication. Tout doit aller le plus vite possible. Le but ici est la réactivité à l’actualité, donc la mise en place d’un pipeline le plus automatique et direct possible. |