Il y a quelques jours, nous vous proposions une interview de David Alaux, réalisateur du film d’animation Pattie et la Colère de Poséidon qui nous vient tout droit de TAT Productions.
Après ce focus sur la partie artistique et la réalisation, nous avions envie de nous pencher également sur la technique. Voici donc une interview en compagnie de Romain Teyssoneyre, directeur technique au sein de TAT Productions.
Il nous en dit plus sur les défis techniques de Pattie et la Colère de Poséidon, le pipeline du studio, les évolutions techniques (ACES, USD, Unreal, Maya…). En fin d’article, vous trouverez aussi quelques informations sur la fameuse série Astérix d’Alain Chabat qui sera diffusée sur Netflix, puisqu’elle a été confiée aux équipes de TAT !
3DVF : Bonjour Romain ! Nous t’avions déjà interviewé en 2017, pour la sortie du film Les As de la Jungle.TAT Productions a parcouru beaucoup de chemin depuis : quels ont été les évolutions ?
Romain Teyssonneyre : Depuis Les As de la Jungle, nous avons donc travaillé sur les films Terra Willy, Pil, Pattie et la Colère de Poséidon qui est sorti au cinéma il y a quelques jours. Côté séries, une troisième saison pour Les As de la Jungle.
Nous étions une bonne centaine en 2017, le studio a bien grossi depuis et nous sommes désormais plutôt autour de 200.
De mon point de vue, le plus gros changement est l’officialisation d’une équipe technique durant la production de Pattie et la Colère de Poséidon. Avant, j’étais un peu en solo à la technique, avec les leads de départements ou des graphistes débrouillards qui m’aidaient à faire le pipeline. Mais ça restait informel et non officiel, ça se faisait au détriment de leurs quotas de travail. Là, l’équipe est vraiment officialisée, nous sommes responsables du pipeline, à temps plein. Cela permet aux autres équipes de se dédier entièrement aux productions et se reposer sur nous pour la création/mise en place des outils, les méthodes de travail, etc.
3DVF : Quel a été le déclencheur de ce changement ? Sans doute la croissance du studio, le fait d’avoir enfin pu trouver le temps de mieux cadrer les choses ?
Oui, c’est ça, et également le multiprojet. Par le passé, on ne travaillait que sur un projet à la fois. On préparait évidemment tout de même le projet suivant mais le focus des équipes était sur un projet à la fois. Là on est passés à deux, trois voire quatre en parallèle, il devenait impossible de suivre la cadence. Il me fallait quelqu’un au compositing avec qui discuter image, peu importe où en est le projet, même chose pour le rendu, les FX, etc.
Cette nouvelle organisation permet d’avoir des interlocuteurs assez fixes sur des gros départements qui peuvent être sujets à générer beaucoup de problèmes.
3DVF : A-t-il été difficile de trouver les bonnes personnes ?
Une partie de cette nouvelle équipe formelle est issue de l’organisation en place jusqu’ici, dont je parlais plus haut. Je pense par exemple au compositing, c’était un graphiste du compositing qui avait mis en place tout le pipeline. On lui a tout de suite proposé, pour cette nouvelle approche, de sortir de la création des projets et de faire du pipeline à temps plein.
Outre ces graphistes déjà identifiés que l’on a sortis des équipes et récupérés dans l’équipe pipeline, on a aussi cherché des profils externes. Et effectivement, sur certains postes on est en recherche depuis 6 mois.
3DVF : C’est vrai que les profils spécifiques peuvent être difficiles à trouver, par exemple pour les IT qui faisaient l’objet d’une conférence dédiée (voir la vidéo de la présentation) aux dernières conférences RADI-RAF à Angoulême.
Je n’étais pas sur place pour les RADI-RAF mais j’ai regardé quasi toutes les captations des conférences un peu techniques[NDLR : les vidéos sont disponibles sur notre chaîne Youtube dans cette playlist, et d’autres arriveront en ligne dans les jours à venir] . Celle sur les IT était intéressante. Chez nous c’est encore une autre équipe, mais ça reste lié. On est d’ailleurs en recherches de profils IT, notamment des personnes connaissant les contraintes d’un studio d’animation.
3DVF : Au niveau technique, le pipeline de TAT Productions reste centré sur 3ds Max, V-Ray pour le rendu. En revanche vous avez délaissé Ornatrix et Lucid pour le hair/fur, vous avez basculé vers Houdini.
Oui. Sur le film précédent, Pil, nous avions une approche hybride : le fur était géré sous Ornatrix, et nous exportions les guides vers Houdini pour la simulation.
Mais les équipes avaient vraiment assez d’Ornatrix, le plugin n’est pas vraiment stable et professionnel. Nous sommes donc passés sur Houdini à 100% pour le grooming et la simulation.
Les effets étaient déjà sous Houdini, et on commence donc à avoir 15, 20 personnes sous Houdini.
3DVF : Pour l’animation, vous mêlez 3ds Max et des outils maison ?
Oui, sachant que le pipeline est en train de bouger.
Pattie a été animé sous 3ds Max, la future série Astérix pour Netflix est faite un peu de la même façon. En revanche on a beaucoup de customisation pour le rigging et l’animation.
Mais on sent qu’on est au bout, même en optimisant nos rigs on a du mal à avoir un FPS correct pour nos animateurs, ça demande beaucoup de travail et on a aussi beaucoup de mal à recruter.
Nous avons donc assez récemment pris la décision de basculer vers Maya pour le rigging et l’animation.
3DVF : Grosse évolution en effet ! Le réalisateur David Alaux nous avait parlé en interview de tests sous Unreal, mais c’est peut-être à plus long terme ou pour d’autres segments du pipeline ?
C’est encore autre chose. Le switch vers Maya est acté et on est en train de le travailler, de recruter.
En parallèle de cela, on a monté une toute petite équipe de R&D (2 personnes actuellement, mais ce sera renforcé) qui, effectivement, regarde Unreal Engine. L’idée serait en fait de faire un second pipeline pour la série. Utiliser V-Ray pour calculer les images d’une série d’animation, ce n’est plus rentable ni écologiquement ni en termes de budget, alors que des outils comme Unreal sont vraiment intéressants.
On regarde ça depuis 3 ou 4 mois, on a des résultats très sympa même si c’est encore loin d’être suffisant.
L’idée serait, d’ici un an, de pouvoir lancer une série avec rendu temps réel, qui s’appuierait sur nos licences.
C’est intéressant car cela fait rebrasser tous les métiers, on se pose des questions sur ce qu’est fondamentalement le layout, le rendu, le compositing. On repense la manière dont se fabrique une image, cela nous fait revoir tous les départements, et donc la manière dont le réalisateur valide les images : travaille-t-on à l’ancienne avec validation plan par plan, validation de toutes les étapes une à une ? Ou bien est-ce que l’on « donne » Unreal au réalisateur avec un séquencier, la possibilité de changer la caméra à tout moment ?
Nous n’avons pas encore tranché, mais il est clair que l’on peut repenser la manière de travailler.
3DVF : C’est vrai que quand on voit ce que fait Miam! Animation avec modification de l’image même après finalisation, ou les outils de storyboarding présentés aux RADI-RAF, cela ouvre des perspectives.
Oui, c’est ça. On est en train de tester tout ça, de voir les possibilités que cela ouvre.
Ci-dessous : deux conférences du RADI-RAF avec dans la première (à partir de 2 minutes 40) l’approche de Miam! Animation en temps réel pour réduire l’emprunte carbone et repenser les méthodes de travail, et dans la seconde une présentation par Sophia Mouajjah de nouveaux outils de storyboarding en développement, au croisement de la 2D et de la 3D. Une intégration Unreal Engine et Blender est évoquée.
Adopter Unreal pose des questions, ce n’est pas facile car le logiciel n’est pas pensé pour de l’animation, c’est vraiment axé jeu vidéo et l’équipe Epic Games ne s’est pas montrée très ouverte aux demandes que l’on a faites : ils sont plutôt intéressés par des choses qui fonctionnent aussi dans un contexte de jeu vidéo. Nos demandes portaient sur l’absence de smooth par exemple.
Ce n’est pas évident à manipuler mais on y travaille.
3DVF : Dans nos échanges avec les studios, couvertures de salons et conférences, on constate d’ailleurs que les studios d’animation utilisent Unreal pour le rendu, ou alors en amont de l’animation (storyboarding, layout) et en aval, mais pas sur l’animation elle-même. Souvent avec le regret, justement, de ne pas avoir les outils pour gérer l’animation sans sortir d’Unreal.
C’est un peu notre constat. On ne sent pas qu’il y a les outils suffisant pour de l’animation comme on l’entend nous, en tant que studio d’animation.
A priori, même si les choses ne sont pas encore totalement décidées de notre côté, on opterait du coup pour de l’animation traditionnelle sous Maya, que l’on viendrait réinjecter dans Unreal ensuite.
3DVF : Revenons sur Pattie et la colère de Poséidon. Le rigging et l’animation ont très probablement été un gros défi, vu le nombre de créatures et humains, les morphologies très variées ?
Il y a un joli bestiaire, effectivement ! Et il y avait des exigences fortes sur le personnage principal et les quelques personnages secondaires qui sont souvent à l’écran.
La partie rigging a donc été gérée sous 3ds Max. On a un système un peu particulier : on passe beaucoup de temps sur un premier personnage, à discuter avec les animateurs, à valider le rig, puis on garde la topologie pour faire les personnages dérivés et sortir plus facilement d’autres personnages, sous réserve que leur morphologie soit similaire.
Les humains avaient leur propre morphologie, idem pour les cyclopes. A l’inverse on ne réutilise évidemment pas le travail fait sur une souris pour un chat.
On a des grandes familles de personnages, avec à chaque fois un premier qui demande du temps et les suivants qui sortent bien plus vite.
3DVF : Pour les cyclopes, le réalisateur David Alaux nous indiquait qu’ils ont posé quelques problèmes…
C’est toujours le revers sur des designs sans articulation, sans cou : même si on a l’habitude de ce genre de morphologie avec Les As de la Jungle, ça reste toujours un problème pour les animateurs. Si les personnages ne peuvent pas tourner la tête facilement, cela contraint la mise en scène et l’animation. Cela génère donc de gros débats entre chefs anim et réalisateurs.
J’avoue que ce n’est pas trop mon domaine, j’essaie de ne pas trop intervenir sur l’aspect artistique, mais c’est vrai que c’est toujours compliqué.
3DVF : Un autre défi est l’échelle des personnages. Pattie et la Colère de Poséidon met en scène une souris, des humains, un Kraken… Parfois dans la même scène. Sans compter les implications sur les props et décors, qui seront vus en très gros plans comme en vue d’ensemble.
Ca a été un gros sujet, effectivement. Dès le scénario, on a vu que l’on ferait face à ces problématiques. L’équipe surfacing a vraiment très bien géré, on a essayé de vérifier à chaque fois où allaient se situer les personnages dans nos décors, afin de mettre plus de détails là où il y en avait besoin, sur les sols et objets proches de la zone de jeu.
En ce qui concerne les personnages, c’est de la texture comme on a l’habitude d’en faire. les UDIMs nous ont bien aidé, certains personnages en ont vraiment beaucoup comme le gros robot qui a je crois une soixantaine d’UDIMs, donc une soixantaine de maps par slot de beauty, speculaire etc.
Cela donne des assets qui sont au final assez lourds à manipuler, longs à rendre, mais on s’en est sortis !
3DVF : Avez-vous mis en place chez TAT Productions un système de LOD sur vos assets afin d’avoir plus de fluidité durant le travail des artistes, à l’image de ce dont nous avait parlé Cube Creative récemment en interview ?
En Layout et Animation, on leur donne de toutes façons des modèles simplifiés et optimisés au maximum pour l’animation, avec des aplats de textures. Ils n’ont finalement quasiment que les yeux, certains motifs dont ils pourraient avoir besoin narrativement. Cela permet de gagner en FPS.
Une fois l’animation finalisée, on transfère les mouvements de ces assets d’animation vers les assets de rendu, qui sont bien plus lourds, avec des point caches ou des Alembic.
J’ai effectivement vu ce que Cube présentait, et cette partie sur le LOD est ce qui m’a le plus intéressé. On n’a pas autant de variations que eux sur les personnages, même chose sur le rig : on va avoir un rig principal sur un personnage, et des rigs spécifiques pour tel ou tel plan, telle ou telle séquence. Mais on n’a pas de couches multiples de rigs comme ils semblent utiliser.
En revanche on utile du LOD pour les décors et environnements, 2 ou 3 versions pour chaque objet selon qui correspondent à l’affichage dans le viewport 3ds Max, le rendu de près, le rendu de loin.
3DVF : Le film comporte une scène de comédie musicale particulièrement complexe, avec plus d’un millier de rats à l’écran. Comment a-t-elle été gérée ?
Oui, je crois qu’on est autour de 1200 rats à l’écran ! Avec mon équipe technique, on a travaillé à 3 ou 4 dessus pendant un bon mois, car nos outils historiques n’ont pas permis d’obtenir ce résultat.
En fait, nous gérons les foules avec des clips de point caches dans une scène à part, c’est ce qu’on appelle un personnage de foule, et des animateurs foules viennent placer ces clips dans la scène.
Créer la scène en animation a été très difficile mais ils y sont arrivés, mais quand nous avons tenté de rendre la scène on a réalisé que ça ne passait plus du tout, notamment à cause du fur, la fourrure des rats.
La solution a été de convertir ces clips en V-Ray proxies, cela nous a permis de consommer beaucoup moins de mémoire. Nous avons aussi refait la fourrure, avec un fur spécifique sur ces clips de rats : par rapport aux autres plans ils ont moins de poils, et pour compenser cette perte de densité de fourrure on a grossi légèrement la taille des poils.
Au final ça marche, d’autant qu’il y a tellement de rats que cela se « noie » un peu dans l’image, ça ne se voit pas trop.
Evidemment, cette approche implique qu’il a fallu stocker de gros volumes de cache de fur spécifiquement pour cette séquence, et exporter des proxies animés, tout replacer au bon endroit.
3DVF : Quelques mots aussi sur les simulations d’eau, puisque le film comporte vagues, océans, plages ?
Nous avons un peu pris peur en découvrant le scénario, justement du fait de la présence de nombreux plans d’océan.
La simulation est assez « standard », sous Houdini. En revanche nous avons aussi tenté d’utiliser Phoenix FD, pour les océans et horizons d’océans. Mais nous avons eu de nombreux problèmes, cela a généré beaucoup de bruit, de noise qui a rendu le compositing peu agréable à travailler. Les images n’étaient pas assez qualitatives.
Sur notre prochain film, nous allons revoir ce point afin de tout faire sous Houdini, et de faire en sorte de cliper les océans en fonction de la caméra. On réfléchit même au fait de rendre les océans directement sous Houdini mais ce n’est pas acté.
Au final, l’eau a été un gros sujet de discussion, mais la partie simulation de fluides, foam/écume sous Houdini est assez classique.
Sur l’ensemble des FX, nous avons par contre fait face à un défi de stockage : plus de 30 To de données pour les FX, une trentaine également pour le cache de fur ! On ne s’attendait pas à avoir autant de données, l’avantage d’Ornatrix étant qu’il n’y a pas de stockage de cache. Même en anticipant ce volume de données, cela a posé quelques défis pour faire passer cela dans les tuyaux !
3DVF : Au niveau rendu/compositing, quelles sont les séquences qui ont été les plus complexes à gérer ?
Sans doute les séquences de villes, très chargées, ou évidemment la séquence musicale dont je parlais plus haut. Egalement toutes les séquences de foules en ville, qui sont toujours plus lourdes en raison du nombre de passes de rendu : chaque groupe de personnages est rendu à part, donc pour un plan avec 300 personnages, on peut avoir une cinquantaine de passes différentes, ce qui fait ensuite beaucoup d’éléments à réassembler au compositing.
La vasque chez les dieux a aussi été complexe à gérer : sur l’Olympe, les divinités utilisent une vasque, un contenant qui leur permet d’observer les humains. Dans la vasque, ils voient le monde des humains, en petit. Il y a du coup deux scènes en une seule, avec des échelles différentes.
Ca a été géré séparément du reste de nos scènes, hors de notre pipeline classique. Concrètement, nous avions deux scènes à taille normale, et une troisième scène venait agréger les deux autres, en mettant à l’échelle le contenu de la vasque. Et en plus, ces séquences comportaient des nuages, effets variés, la mer, du fur, des personnages animés… Ces séquences de vasque ont donc demandé beaucoup de travail, alors qu’elles ne sont visibles que peu de temps à l’écran.
Enfin, les plans riches en FX (eau, fumée, etc) ont évidemment aussi été lourds à gérer.
Ci-dessous, la bande-annonce du film : la vasque est visible vers 1 min 23 et dans les plans suivants.
3DVF : Nous avions échangé avec David Alaux sur les contraintes de production, entre les ambitions techniques/artistiques et un budget à tenir. Concrètement, quel était ton rôle dans la tenue de cet équilibre ?
Comme j’étais CG Supervisor sur le film, cela faisait clairement partie de mon travail. Il fallait arbitrer, savoir ce que l’on pouvair faire, ce qui allait être délicat, ce qui nécessitait une nouvelle méthode de travail.
Chez TAT, nous avons l’habitude d’être très ambitieux sur nos projets, on recule donc rarement sur nos choix artistiques : on aura plutôt tendance à vouloir trouver des méthodes de travail pour concrétiser tout de même notre volonté.
Plus concrètement, on intervient dès le concept art pour souligner ce qui risque de poser souci : un personnage qui a trop de jambes et pour lequel on suggère d’en supprimer, ailleurs on voudra créer un vrai cou sur un personnage qui n’en a pas pour faciliter l’animation…
Mais quand le réalisateur nous dit qu’il souhaite poursuivre dans une direction, même si elle est difficile, on essaie, on y va !
3DVF : Un exemple d’arbitrage ?
Oui, j’avais par exemple demandé à ne pas avoir plus de 500 personnages en simultané, ce qui est le cas au final sur tout le film sauf sur la séquence de comédie musicale et danse.
3DVF : Quelques mots sur le kraken ?
De mémoire, les tentacules et le corps ne sont pas reliés entre eux, il y a un corps d’un côté et les tentacules sont gérés comme des accessoires. Ce n’est pas le nombre de bras qui posait souci, plutôt la taille de la créature et sa résolution : on le voit à la fois de très près et de très loin.
3DVF : Le navire de nos aventuriers a-t-il posé des difficultés ?
Oui, car il implique de nombreux départements : il était animé par l’équipe animation, mais en même temps il y a souvent de la foule dessus. Il y avait fréquemment des allers et retours, l’organisation aurait peut-être pu être améliorée.
3DVF : En 2017, nous avions parlé de votre renderfarm : tu nous parlais à l’époque de 150 lames, et les stations de travail calculaient en dehors des heures de travail. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
On a fait grossir notre puissance de calcul : rachat de serveurs de rendu, on est dans les 450-500 machines. Nous avons déplacé la renderfarm hors de nos locaux, dans un datacenter, pour des raisons de refroidissement. Nous n’avions plus la capacité de gérer un tel volume.
Les stations de travail sont toujours utilisées en fin de journée pour le rendu, ce qui a un impact sur nos équipements : on achète généralement des stations assez musclées puisqu’elles servent aussi au rendu. Les graphistes ont donc de bonnes stations !
En revanche cela a pu nous amener à faire des erreurs, nous avons par le passé acheté des machines dont le CPU avait une fréquence peu élevée mais beaucoup de coeurs : c’est parfait pour le rendu, mais il s’est avéré que cela posait problème pour le travail quotidien, car beaucoup de tâches, notamment sous 3ds Max, ne sont pas multithreadées et ne bénéficient donc pas de ces nombreux coeurs. Sous Nuke, un nombre trop important de threads n’apporte pas non plus de bénéfices.
Ces machines étaient donc performantes pour le rendu la nuit, mais pas pour le travail de jour. C’était un peu une erreur, on ralentissait nos graphistes.
Nous avons revu ça, nous avons fait des benchmarks et on mise désormais davantage sur la fréquence du CPU que sur la démultiplication excessive des threads.
3DVF : l’USD fait beaucoup parler de lui en ce moment. Est-ce que le studio s’en sert, ou regarde comment adopter USD ?
Jusqu’ici, nous n’avions pas vraiment le besoin puisque nous restions sous 3ds Max : il y avait peu d’échanges avec d’autres DCC, d’autres logiciels de création de contenu.
En revanche, comme nous faisons une transition vers Maya, on s’y intéresse désormais. Ca semble tout de même assez lourd. Je pense que si on l’adopte, dans un premier temps ce sera pour échanger des modélisations, pas au coeur du pipeline.
Concrètement, sur notre futur film Pets on a Train, les décors seront créés sous 3ds Max mais nous devrons les envoyer au layout et à l’animation sous Maya, puis les récupérer sous 3ds Max après les modifications faites par ces équipes : nous envisageons donc d’utiliser de l’USD ici.
A ce stade on ne pense pas à adopter USD plus largement que pour ce besoin.
3DVF : Un dernier point : TAT Productions travaille sur la future série Astérix d’Alain Chabat pour Netflix. Tu ne peux évidemment pas trop en dire à ce stade, mais as-tu quelques éléments sur les enjeux techniques ?
Oui, on augmente par exemple nos exigences en termes de sécurité des données.
Le pipeline ne va pas trop changer, Netflix est venu nous chercher et notre objectif est avant tout de faire ce que nous savons faire, en revanche on veut notamment investir beaucoup sur l’aspect rigging afin de permettre d’avoir des personnages très expressifs grâce aux déformations.
La partie foules va aussi être travaillée avec soin puisqu’il y en aura forcément, autant côté gaulois que romains, même chose pour le hair/fur puisque les gaulois auront moustaches, coiffures à gérer.
L’optique est donc d’améliorer ce que nous savons déjà faire.
En revanche il y a un changement majeur : nous allons essayer de faire la série en ACES (Academy Color Encoding System), autrement dit nous changeons la gestion de l’espace colorimétrique. C’est un peu nouveau pour nous, nous découvrons avantages et problématiques.
3DVF : Merci Romain ! Rappelons donc que Pattie et la Colère de Poséidon est actuellement visible au cinéma. Le film Les As de la Jungle 2, lui, est prévu pour cet été. Il faudra patienter un peu plus pour découvrir la série d’animation autour d’Astérix sur Netflix.
Pour en savoir plus
- Pattie et la Colère de Poséidon est actuellement visible au cinéma.
Le film est produit par TAT Productions, Apollo Films, France 3 Cinéma, avec la participation de France Télévisions, Canal+ et Ciné+, le soutien du CNC, de la région Occitanie, de Toulouse Métropole, de la PROCIREP, de l’ANGOA et de la SACEM.
La distribution est assurée par Apollo Films en France, Kinology pour les ventes à l’internationnal. - Le site de TAT.
- si vous avez apprécié cet article, n’hésitez pas à suivre 3DVF sur les réseaux sociaux : Youtube, Twitter, Instagram, LinkedIn, Facebook.