Rencontre avec Sewang Kim, FX Artist spécialiste de Houdini

Sewang Kim

3DVF : Peux-tu aussi nous parler de la publicité Samsung, avec sa simulation de cloth/ncloth ? Tu as sans doute travaillé à rebours, en partant des vêtements pliés ?

Sewang Kim : Oui, tout à fait. Même si le nouvel Houdini 17 vient juste d’être équipé d’un système de cloth très solide, à l’époque Houdini était connu pour sa gestion horrible des tissus/vêtements. C’était vraiment lent et peu pratique comparé à nCloth sous Maya. Le superviseur VFX m’a toutefois défié d’utiliser Houdini, pour conserver une meilleure cohérence avec le pipeline de Method Studios.

En ce qui concerne le plan des vêtements qui se plient, si je n’avais pas travaillé à l’envers ces vêtements se seraient emmêlés les uns aux autres sans arriver au résultat voulu, à cause des collisions entre les morceaux de tissu. Je suis donc parti du linge plié.

J’ai volontairement fait en sorte que les vêtements s’envolent un à un, du haut vers le bas, pour qu’une fois l’animation inversée la pile se dépose de façon naturelle sur le sol, de bas en haut.
Dans le système de cloth dynamics de Houdini, si quelqu’un spécifie une certaine forme comme étant celle au repos, les vêtements auraient tendance à revenir vers cette forme durant la simulation. On m’a donné des modèles de vêtements pliés et non pliés pour les effets ; de cette façon, je pouvais changer une version par l’autre de façon invisible lorsqu’ils volent dans les airs.

Pour finir, j’ai laissé ces vêtements voler vers le côté de l’image simplement en ajoutant une force de type vent. De cette façon les vêtements avaient l’air de venir de l’arrière de la machine à laver après inversion. Le projet a été un succès, et nous avons tous été fiers du résultat, d’autant que le concept n’était pas facile à mettre en oeuvre.

Samsung – Center Stage from Method Studios on Vimeo.

Sewang Kim
3DVF : Feu, fumée, fur, cloth, eau… Tu as travaillé sur des effets variés, qu’ils soient stylisés ou réalistes. As-tu un type d’effet préféré ? Et y a-t-il un type de projet sur lequel tu n’as pas encore travaillé mais avec lequel tu voudrais expérimenter à l’avenir ?

Même si le travail sur les effets réalistes peut sembler fascinant pour un artiste, je préfère les approches stylisées, comme les motion graphics. J’aime donc jouer avec les éléments géométriques : vertices, lignes, polygones. Ce type de travail sous Houdini nécessite souvent plus de maîtrise en mathématiques et programmation qu’une approche purement réaliste. Il faut être plus stratégique dans la résolution de problèmes dans les projets de design. Je ne dis pas que les effets réalistes sont faciles à réaliser, mais personnellement ils m’ennuient un peu car au final le logiciel fait généralement la majorité des calculs pour vous, du moment que la simulation a bien été mise en place au début.

Parfois, il y a des défis qu’on ne peut résoudre avec de la dynamique. Par exemple, si on vous demande de créer une fumée de cigarette en très gros plan, avec des détails. C’est quasiment impossible d’obtenir, sous Houdini, des volumes fins et en mouvement avec une simulation de fumée classique. Inversement, si vous savez jouer avec la géométrie, il sera sans doute facile de gérer le problème. Personnellement j’utiliserais un simple setup de particules, chacune laissant une traînée, les connecter via des lignes, et enfin convertir ces lignes en volume.

Je n’ai pas encore vraiment fait de plain de destruction massive, avec un effondrement de bâtiment, de pont ou un tremblement de terre. J’aimerais avoir l’opportunité de travailler sur ce type de scène de destruction à grande échelle en équipe. Je maîtrise déjà les outils SideFX mis en place dans Houdini utiles pour ce type de projet.

118651243

Sewang Kim
3DVF : Houdini est ton outil principal. Que penses-tu de la nouvelle version 17 ?

Même si la version 17 contient de nombreuses avancées intéressantes, la meilleure est clairement le nouveau solveur Vellum. Ma première impression a été très positive, avec un choc semblable à mes débuts sous nCloth quand il a été introduit sous Maya. Comme je le disais plus haut, Houdini était jusqu’ici très mauvais pour les simulations dynamiques de vêtements/tissus.

Avec la dernière version, à l’inverse, il devient très facile de créer des effets complexes et difficiles à l’aide de Vellum : cloth, hair, ballons et même sable, neige… Le tout sans qu’il faille y passer énormément de temps. J’utilise d’ailleurs ce nouveau système dans mon projet en cours, pour créer de l’herbe emportée par un souffleur à feuilles. Vellum m’apporte des résultats rapides et réalistes de la simulation, sans pour autant perdre la gestion des collisions.

3DVF : Où te vois-tu dans quelques années ?

Je vais, évidemment, continuer à me focaliser sur les FX pour les quelques années à venir. J’aimerais passer du temps sur la mise en place d’outils réutilisables. Un outil FX est souvent « jetable » et inutilisable à la fin d’un projet, à cause des plannings très serrés. Pour faire quelque chose qui puisse de nouveau être employé, un outil robuste utilisable par n’importe qui n’importe quand, je vais devoir approfondir mes connaissances logicielles et me former davantage sur les technologies incluses dans la dernière version de Houdini.

J’aimerais aussi commencer à réfléchir sur la réalité virtuelle/augmentée. The Mill a d’ailleurs Mill Plus à New York, un département centré sur les technologiques innovantes tels que réalité virtuelle/augmentée et le design interactif. Le visionnage de Ready Player One a augmenté mon intérêt pour ce type de technologie, et si cela est possible, j’adorerais travailler sur des projets VR avec l’équipe de Mill Plus, expérimenter sur les dernières technologies et apprendre de nouveaux outils comme l’Unreal Engine.
Sewang Kim
3DVF : Pour finir, aurais-tu un conseil pour les jeunes étudiants qui aimeraient devenir FX Artist/TD ?

Une différence flagrante entre la vie étudiante et la vie active est qu’au travail vous recevez en permanence des retours et correctifs. Ces commentaires peuvent arriver quasi quotidiennement de la part de Leads, Superviseurs, Directeurs Créatifs, et même de clients ou agences. En tant qu’artiste FX, vous devez être capable de contrôler chaque étape de votre travail afin de répondre à ces demandes souvent très spécifiques.

Afin d’y parvenir, il faut avoir une bonne connaissance des éléments géométriques/mathématiques fondamentaux. C’est un peu comme une personne qui tenterait de modéliser sous ZBrush sans avoir de connaissance sur la structure d’un humain ou d’un animal : vos chances de devenir un bon modeleur sont plus faibles. Pour un FX Artist, les maths et la programmation sont en quelque sorte l’anatomie de base à apprendre.

Comme je le disais plus haut, un artiste FX ne doit pas simplement s’apppuyer sur les effets de type dynamics, car il devient compliqué d’avoir un contrôle total. De plus, les effets utilisés ne se limitent pas à des choses réalistes telles que le feu, la fumée ou les simulations de fluides. Dans un studio, on vous demandera de travailler sur des projets stylisés ou axés design très fréquemment. Plus vous maîtriserez les fondamentaux des FX, plus il y aura de possibilités pour résoudre simplement et efficacement un problème.

Il peut être difficile de devenir FX Artist car il faut avoir des connaissances dans des domaines très variés, et cet apprentissage demande du temps. Néanmoins, si vous persévérez  et êtes patients, un jour vous parviendrez à réaliser des effets fantastiques sur des projets cool, ce qui est un vrai plaisir !

Chargement....

A Lire également