Il y a un an environ, le studio Mathematic historiquement basé à Paris a lancé une antenne au Québec, à Montréal. Nous avons voulu en savoir plus sur cette démarche ; Alexandre Pagot, qui dirige cette nouvelle structure, a bien voulu nous en dire plus et revenir sur la mise en place de la nouvelle entité. |
L’interview est également l’occasion d’évoquer un des projets récents du studio, géré à la fois par les équipes de Montréal et Paris.
Ci-dessous : l’équipe de Mathematic Montréal |
3DVF : Bonjour Alexandre, et merci d’avoir accepté cette interview. Pour commencer, pouvez-vous nous présenter votre parcours en quelques mots ?
Alexandre Pagot : Bonjour, je suis producteur et manager de la structure Mathematic Montréal, filiale de la Maison Parisienne. Suite à un diplôme en école de commerce, j’ai commencé à travailler en agence de publicité, c’est là bas que j’ai fait la rencontre de l’équipe de Cube Creative, qui m’as embauché en tant que Producteur Junior début 2012. Ma rencontre avec Guillaume (Guillaume Marien) le CEO de Mathematic a eu lieu au CNC en 2016 ou nous étions tous deux membres de la Commission Nouvelles Technologies. Nous avons ensemble décidé de l’ouverture d’une structure au Canada pour développer la publicité et le long métrage que ce soit en VFX ou Animation. |
3DVF : Il y a environ un an, Mathematic a décidé de s’étendre au Canada, avec un site sur Montréal qui vient donc se rajouter aux bureaux parisiens. Pourquoi cette décision ? S’agissait-il par exemple de se rapprocher de clients potentiels, de bénéficier du régime fiscal local ?
Cette décision est d’abord parti d’un désir personnel d’immigrer au Canada, j’avais, depuis longtemps, envie de découvrir ce pays, et je savais que les opportunités dans les métiers du cinéma et de l’animation étaient nombreuses. Ensuite c’était le bon moment pour Guillaume et Mathematic de venir poser un pied en Amérique du Nord, en effet Mathematic étant de plus en plus sollicitée par les US (côte est et ouest), il semblait logique de venir installer une structure sur le même fuseau horaire et plus proche des clients dans la publicité ou le clip. Les mesures fiscales ont évidement été un argument supplémentaire pour l’installation de la structure à Montréal, mais nous avons toujours gardé en tête l’idée d’une structure à taille humaine, une « boutique VFX » de qualité, produisant des images d’un excellent niveau de craft, quitte à travailler sur des compétences bien spécifiques pour d’autres studios. |
Ci-dessous : le making-of du spot « la collation du Père Noël ».
En cas de problème de lecture, vous pouvez le consulter directement sur Facebook.
3DVF : Où en est le studio actuellement ? Quelle est la taille approximative de l’équipe, et comment est organisée l’équipe dirigeante ?
Le studio est en phase de développement, nous avons ouvert il y a un peu plus d’un an, pour KURSK le studio est monté à 15 personnes sur 8 mois et nous sommes aujourd’hui une dizaine, avec une moitié d’équipe en 3D et l’autre en 2D. |
C’est moi qui gère la partie commerciale et administrative du studio, et nous avons une responsable de production qui organise les projets ici. L’équipe s’est construite petit à petit avec des gens issus de background assez différents mais qui présentaient l’envie de « toucher à tout », des profils plutôt généralistes donc, avec une culture visuelle et artistique. Ce dernier point est important pour nous, ce qui nous guide est l’envie de designer et crafter les choses, peu importe les marchés. |
3DVF : Pourquoi avoir choisi Montréal plutôt que, par exemple, Québec ou Vancouver ? Et quelle est la stratégie de Mathematic Montréal pour se démarquer face aux nombreux concurrents déjà en place ?
La concurrence s’est en effet accrue à Montréal ces dernières années avec aujourd’hui une quarantaine de studios de 3D et des mastodontes ouvrant des bureaux tous les ans. Notre idée a été de prendre le contrepied de l’industrie et de se démarquer avec une équipe plus « familiale », des graphistes investis sur les productions et responsables de leurs images. Une diversité de projets plutôt courts qui permet aux graphistes de changer régulièrement d’univers. Nous alternons également avec des projets de longs métrages qui offrent aussi une autre temporalité, plus de temps pour travailler les scènes. |
Le choix de Montréal, plutôt qu’une autre ville était d’abord porté par mon envie de venir y habiter, c’est une ville résolument agréable à vivre, malgré ce qu’on dit de la météo ! On a un style de vie très urbain, et pourtant en 45min de voiture on est dans la nature. L’hiver ne nous empêche absolument pas de vivre, on profite de bien plus d’activité extérieure qu’à Paris : Patins, ski, hockey, raquette, traineau…Souvent l’image de l’hiver à Montréal est celle de gens restant chez eux à cause du froid, ou circulant dans les galeries souterraines. C’est une image terriblement fausse, nous ne perdons absolument pas en mobilité durant l’hiver, je suis moi meme en vélo toute l’année, et je me sens beaucoup plus actif que lorsque j’était en France. Aussi, en terme d’immobilier, et de logement, Montréal est aussi beaucoup plus accessible que Vancouver par exemple. |
3DVF : Concrètement, comment avez-vous mis en place le studio et monté l’équipe ? Quelles ont été les difficultés principales au niveau technique, logistique ou administratif ? Le studio s’est mis en place assez rapidement pour être honnête, nous avons vite trouvé des locaux qui nous plaisaient , je voulais rester sur le plateau mont royal (quartier de Montréal) plus proche des graphistes, la plupart d’entre eux habite aux alentours. Nous bénéficions de l’expérience et de l’infrastructure Parisienne. MATHEMATIC Paris emploie 80 personnes. Administrativement les choses sont assez simples au canada, et l’ouverture de l’entité canadienne s’est faite très vite. On ressent vraiment que l’entrepreneuriat est favorisé. Pour l’équipe cela a été plus délicat, il est très très compliqué de recruter à Montréal car l’industrie est en situation de sur-emploi. J’ai donc essayé de cibler des profils relativement seniors qui avait fait leur temps dans les gros studios et qui cherchait une aventure avec plus de responsabilités et d’indépendance. La réalité est qu’ici les graphistes sont très sollicités, et durs à fidéliser. Il est donc nécessaire de faire venir des talents au Canada. Beaucoup des graphistes qui passent ou qui restent chez Mathematic sont des neo-immigrants canadiens. Nous sommes d’ailleurs régulièrement en recherche de profils seniors qui souhaiteraient venir s’installer ici. |
3DVF : Comment s’articulent les deux sites, et quel est votre degré d’indépendance ?
Les deux sites sont montés sur le même pipeline, nous sommes donc compatibles en terme de production. Nous pouvons partager le travail assez facilement, en basculant des compétences d’un coté ou de l’autre en fonction des besoins d’un projet. Nous jouissions d’une certaine autonomie en terme de fabrication grâce à une bonne complémentarité des ressources ici. Mais sur des projets plus ambitieux, nous faisons appel à toutes les ressources de Mathematic confondues. C’est aussi un confort supplémentaire pour nos clients, qui peuvent compter non seulement sur l’équipe montréalaise, mais également sur la centaine de personne que compte la team parisienne. |
3DVF : Vous avez sorti en décembre un film en animation 3D pour IGA, géré à la fois par Paris et Montréal. Comment avez-vous réparti les tâches ?
Oui c’était notre premier gros contrat en publicité à Montréal, avec l’agence Sid Lee Montréal. Les choses se sont bien organisées en terme de production grâce à une belle complicité avec les créatifs de l’agence. Nous avons d’abord démarré la préproduction à Montréal avec Fabrice Fiteni, le réalisateur, des concepts artistes, et une boardeuse, pour cadrer un maximum le projet. |
Une fois que l’histoire était validée, nous sommes partis en production avec des assets fabriqués entre Paris et Montréal, l’animation été faite à Paris et le compo à Montréal. Les tâches se sont réparties par compétences, et aussi par soin de réactivité avec l’agence : il était plus confortable de pouvoir finaliser le film sur place par exemple. C’était aussi intéressant de pouvoir jouer le décalage horaire sur ce projet, nous recevions des scènes à commenter de Paris la nuit, et nous pouvions présenter et retravailler dès le matin à Montréal. |