Chaque année, le Mémorial de Caen organise un concours international de plaidoiries en faveur des droits humains.
Cette année, le 21 mars, le secteur de l’animation a été évoqué : maître Thiên-Thanh Tran a présenté une plaidoirie intitulée « Le silence tue : l’omerta du cinéma français », que vous pouvez découvrir ci-dessous en vidéo.
Elle y dénonce notamment la loi du silence qui sévit trop souvent face à ce genre d’affaire, notamment quand l’auteur des faits est haut placé : oublier la victime est alors un moyen commode pour ne pas remettre en cause tout un projet.
La plaidoirie souligne aussi les efforts encore insuffisants de l’Etat et des institutions pour écouter, suivre les victimes au niveau judiciaire, mais aussi en matière de prévention (même si des initiatives commencent à se mettre en place), tout en finançant abondamment le secteur du cinéma d’animation.
De l’art au droit, un parcours atypique
Si Thiên-Thanh Tran évoque l’animation, ce n’est pas un hasard. En effet, avant de s’intéresser au droit, elle a été illustratrice pour des projets de série d’animation, mais aussi dans le jeu vidéo et l’édition. Elle est également scénariste (BDs, films).
C’est d’ailleurs ce parcours dans le milieu artistique qui est à l’origine de sa reconversion au bout de 7 ans dans le milieu, puisqu’elle a été spoliée de ses droits sur un projet de jeu vidéo : elle a alors décidé de changer de secteur, repris ses études à zéro à l’aide de ses économies. Un changement de carrière manifestement réussi, puisqu’elle fut notamment major de promotion durant les deux premières années de sa formation.
Désormais avocat en droit du numérique et en propriété intellectuelle, elle ne délaisse pas pour autant totalement les arts : on lui doit le scénario de la bande dessinée Perséus (éditée chez Delcourt), et elle fut script doctor sur le film Les blagues à Toto sorti l’an passé.
Le droit, un atout dans l’industrie et contre les violences sexuelles
Outre les activités citées plus haut, elle donne des cours de droit (et plus précisément de propriété intellectuelle) dans différentes écoles : Gobelins, Brassart ou encore Gaming Campus.
Dans ce dernier cas, elle dispense aussi un module de professionnalisation « entrée dans la vie active » (statuts intermittent / régime général / freelance/société, notions de comptabilité/TVA/déclarations sociales, la présentation des différentes catégories de festivals / aides / subventions) : une excellente idée pour les élèves de l’école, puisque les jeunes de l’industrie ont encore trop souvent tendance, lors de l’entrée dans la vie active, à ne pas avoir reçu assez d’informations sur ces sujets.
Maître Thiên-Thanh Tran nous a d’ailleurs indiqué que les cours de droit sont en pratique très appréciés par ses étudiants, d’autant plus qu’elle connaît leur métier.
Toujours en ce qui concerne les retours d’élèves, d’ailleurs, Maître Thiên-Thanh Tran nous précise avoir reçu des questions de leur part suite à sa plaidoirie, notamment sur la marche à suivre en tant que témoin, sur la façon dont on peut dénoncer une situation, les risques encourus par un producteur qui n’agit pas, ou encore les moyens d’aider une victimes qui ne souhaite pas porter plainte.
Si la plaidoire présentée ici rappelle le long parcours qui reste à faire en matière de violences sexuelles, elle est donc aussi l’occasion de souligner que connaître ses droits et devoirs fait partie des points clés sur lesquels des actions sont possibles. Il s’agit d’ailleurs d’une des missions que se fixent les associations spécialisées comme l’AVFT, qui anime les formations contre les violences sexistes et sexuelles organisées par le CNC.