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Critique : Archipel, une déambulation animée

Cette semaine sort dans les salles françaises le film d’animation Archipel, réalisé par Félix Dufour-Laperrière. Un long-métrage québécois, sorte de déambulation -pour reprendre le terme du réalisateur-, de dérive rêvée entre territoire et histoire, entre cultures et idées.

Voici son pitch, suivi de la bande-annonce et de notre critique :

Un vrai film d’animation sur des îles inventées. Sur un territoire imaginaire, langagier, politique. Sur un pays réel ou rêvé, ou quelque chose entre les deux. Archipel est un long métrage au dessin libre et à la langue précise, qui dit et rêve un lieu et ses habitants, pour dire et rêver un peu du monde et de l’époque.

Surprenant, Archipel l’est à plus d’un titre. Son caractère sinueux, oscillant entre séquences fortes et repos, changeant d’idée comme de style, évoque finalement la descente d’une rivière, avec des méandres pouvant masquer des rapides. Comme une promenade qui serait parsemée de détours, de passages au coeur de la forêt suivis de vues surplombantes. Un ressenti parfaitement en phase avec la volonté du réalisateur, qui voulait jouer sur l’affect, le sensible et éviter d’aboutir sur « un film à décoder, un film savant ».

Au final, Archipel est un film sensible, intime, collectif.

Archipel - critique du film de Felix Dufour-Laperrière

Sensible et intime, car les deux personnages qui vont guider notre voyage nous font évoluer dans un monde semi imaginaire. Si Archipel fait des références historiques et géographiques au Québec, c’est pour mieux s’en éloigner. De quoi parfois dérouter (avec les références aux personnalités qui ont marqué l’histoire du Québec comme Jacques Ferron, Pierre Vallières), mais sans saper l’objectif central puisqu’encore une fois, c’est avant tout sur le ressenti que joue Archipel, pas sur la connaissance. C’est au fond une sorte de Québec parallèle et nuageux, que l’on découvre.

Collectif, car la démarche artistique a consisté à mêler les styles, qu’il s’agisse d’images d’archives, de rotoscopie, d’images réelles agrémentées voire complétées par de l’animation, de trait épuré ou de dessins foisonnants. Pour y parvenir, Félix Dufour-Laperrière a fait appel à différentes personnes, leur confiant les séquences en fonction de leurs penchants artistiques.
Un choix parfaitement adapté à la démarche, et qui donne malgré tout un résultat cohérent, une vision graphique unifiée.

Le processus de fabrication et des images du film d’animation Archipel fait d’ailleurs écho au fond : Félix Dufour-Laperrière confie que l’équipe a volontairement travaillé à partir d’un scénario précis mais très peu d’indications visuelles, afin de remettre l’improvisation au centre. Un pari risqué pour ce qu’il présente comme un film « fait avec le budget d’un court-métrage », mais furieusement efficace. L’objectif, nous dit encore le réalisateur, était de casser le contrôle rigide souvent présent en animation pour maîtriser les coûts.

Archipel - critique du film de Felix Dufour-Laperrière

Le son mérite lui aussi d’être évoqué. Qu’il s’agisse des voix ciselées et isolées, comme une écoute au coin du feu, du sound design et de la musique qui savent se faire discrets si nécessaire mais aussi très présents selon le contexte. Le soin est manifeste et les intentions assumées, comme quand un passage en langue des premières nations nous est, dans un premier temps, proposé sans sous-titres. Pour mieux souligner le fait que ces langues, contrairement au français et à l’anglais, restent fragiles et non institutionnelles.

Archipel - critique du film de Felix Dufour-Laperrière

Entre plans fulgurants et rêve brumeux s’étalant en lentes volutes, entre plongée documentaire et découverte d’un pays inventé dans lequel on va parfois se perdre, Archipel est une oeuvre forte oscillant entre poésie, narration envoûtante, animation expérimentale, histoire réinterprétée.
Un parcours que nous ne pouvons que vous conseiller.

Produit par Embuscade Films, Archipel est réalisé par Felix Dufour-Laperrière, distribué par Miyu Distribution. Il est visible dès à présent dans les salles françaises.
Durée : 1h12.

Archipel - critique du film de Felix Dufour-Laperrière

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