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Interview : avec Magelis, le point sur l’animation à Angoulême

Organisées chaque année à Angoulême, les conférences RADI-RAF sont l’occasion de faire le point sur l’animation française.
Nous avons capté l’édition 2023 (les vidéos sont à retrouver jour après jour sur Youtube), avec le soutien du Pôle Image Magelis qui organise l’évènement. Nous en avons profité pour interviewer Frédéric Cros (Directeur Général des Services) afin de faire le point sur l’animation à Angoulême.

Forces, tendances, secrets pour attirer les studios, aides financières ou encore réflexion sur un évènement autour des VFX, sans oublier la transition écologique et l’avenir : vous saurez tout sur la filière de l’image à Angoulême !

3DVF : Bonjour Frédéric ! Nous sommes à Angoulême pour réaliser cette interview, à l’occasion des RADI-RAF qu’organise Magelis. Les nouveaux chiffres de la filière de l’animation ont été dévoilés : où en est le secteur à Angoulême ?

Frédéric Cros : On connait Angoulême pour la bande dessinée évidemment, également pour le jeu vidéo et les tournages de films… mais c’est très clairement l’animation qui se dégage en termes d’activité. Les chiffres d’Audiens donnés durant les RADI-RAF montrent que nous sommes à près de 1 500 équivalents temps plein en Charente, et que le poids de notre écosystème avec près de 30 studios, s’est largement accru en 10 ans, ce qui fait que nous représentons probablement environ un quart des techniciens français. Il s’agit clairement du fer de lance de l’activité de Magelis.

Pour autant nous continuons à développer les autres filières, comme le jeu vidéo, les effets visuels et les tournages puisque nous avons créé cette année le Bureau d’Accueil des Tournages de la Charente pour se renforcer du côté films et téléfilms.

Ci-dessous : chiffres de l’emploi (animation en France), avec à 16:48 les dynamiques régionales puis départementales.

00:00 – Introduction, Audiens
01:39 – Méthodologie
02:40 – Sommaire
03:15 – Croissance soutenue en 2022
08:51 – Primo-entrants
09:38 – Les métiers de l’animation
13:45 – Féminisation du secteur
16:48 – Dynamiques régionales
18:19 – Dynamiques départementales
19:56 – Perspectives 2023
23:32 – Q&A FONPEPS – Fonds national pour l’emploi dans le spectacle
24:09 – Q&A métier de dessinateur d’animation ? Classement par filière
26:16 – complément FONPEPS
26:47 – Q&A Raisons de la féminisation
29:05 – Q&A nb d’élèves vs nb de primo entrants, méthodologie
33:26 – Q&A durée des carrières ?
35:07 – Q&A catégorisation des filières
36:26 – Q&A Mikros inclus ?

3DVF : Un point clé pour le dynamisme d’un secteur, c’est aussi la formation, et justement on trouve de nombreuses écoles ici.

FC : C’est un point central pour nous, ça a même été le point de départ pour Magelis. On a considéré qu’il était capital de former des gens, puisque les industries de l’image comportent peu d’autodidactes et s’appuient surtout sur des personnes formées. On a donc tout de suite mis en place de nouvelles écoles, et cherché à convaincre des écoles de déménager à Angoulême ou de venir créer un second site sur notre territoire. Aujourd’hui, on en compte 15 qui proposent une quarantaine de formations et accueillent près de 2 000 étudiants qui se destinent aux métiers de l’image. Et plusieurs sociétés de formation continue proposent des stages aux professionnels.

La Charente, bilan sur une décennie : une filière en forte croissance.
(capture issue de la vidéo visible plus haut)

3DVF : Après les studios, les écoles et les formations, le troisième pilier potentiel est la recherche : quelle est la situation à ce niveau ?

FC : Il y a beaucoup de choses implantées à Angoulême. Nous nous sommes rendu compte qu’avec la croissance des studios, les équipes techniques sont venues à Angoulême. Et donc dans les studios, nous avons beaucoup de personnes qui développent des outils et les techniques de demain.

Nous sommes aussi en lien avec les labos de recherche, ceux de l’Université de Poitiers qui a des antennes à Angoulême, mais aussi des Universités de Limoges et de La Rochelle. On a la chance d’être bien positionné, avec des villes majeures dans la région qui sont situées à équidistance d’Angoulême.

3DVF : Quels sont les axes de développement sur lesquels travaille Magelis ?

FC : La mission de Magelis est de développer les activités de l’image en Charente dans toutes les filières, par l’implantation d’entreprises et d’écoles et en attirant des projets de production. On compte évidemment poursuivre notre travail sur l’animation, car nous avons pour ambition de devenir un des premiers pôles européens d’œuvres animées, que ce soit pour la télévision ou le cinéma Nous avons en permanence des contacts avec de nouveaux studios, c’est vraiment un axe central pour nous et nous répondons systématiquement aux studios qui souhaitent notre aide et notre accompagnement.

Par ailleurs, nos aides à la production augmentent régulièrement afin de suivre l’évolution des prestations et productions sur le territoire.

Nous nous intéressons également de près à des filières plus émergentes à Angoulême, comme le jeu vidéo, les œuvres immersives et les VFX. Concrètement, on réfléchit d’ailleurs à un évènement sur les effets visuels, que l’on pourrait créer. Nous rencontrons aussi les dirigeants de sociétés d’effets visuels, pour évoquer Magelis, ce que nous pouvons faire ensemble, pour eux.

3DVF : A propos d’évènements d’ailleurs, parlons un peu des rendez-vous qui existent déjà à Angoulême sur le monde de l’image. On ne présente évidemment pas le festival de la Bande Dessinée, et nous réalisons cette interview durant les RADI-RAF, rendez-vous centré sur l’animation. Quels sont les autres évènements ?

FC : L’autre grand festival à Angoulême de plus en plus connu à travers le monde est le Festival du Film Francophone d’Angoulême, qui se tient fin août et accueille de très nombreux producteurs de cinéma.

De notre côté, en dehors des RADI-RAF, nous organisons la GameConf qui se tient début octobre et propose des rencontres et conférences sur l’entrepreneuriat dans le jeu vidéo. Elle s’accompagne d’un volet Game Invest avec des rencontres entre des investisseurs bancaires et institutionnels et des producteurs indépendants de jeux vidéo.

Nous organisons également Immersity, fin mars, avec les principaux protagonistes français d’œuvres et technologies immersives.

On considère que pour chaque secteur, il est important pour nous d’avoir un évènement spécifique, d’envergure nationale, et qui se tient sur le territoire d’Angoulême.

3DVF : Angoulême est aussi présente à Annecy, durant le Festival d’Animation ! Concrètement, quel est le fonctionnement ?

FC : Oui, Magelis prend un grand stand au MIFA, le versant professionnel du festival. Cela permet aux studios et entreprises charentaises qui ne veulent ou ne peuvent pas prendre de stand dédié d’avoir un emplacement physique, de prendre leurs rendez-vous sur notre stand. Et nous y organisons notre traditionnelle réception !

3DVF : Vous semblez présents sur de nombreux sujets… En quelques mots, pouvez-vous nous rappeler ce qu’est Magelis ?

FC : Techniquement, Magelis est un syndicat mixte fondé en 1997 et qui rassemble les collectivités que sont le département de la Charente, majoritaire, la région Nouvelle Aquitaine, la ville d’Angoulême et la communauté d’agglomération de Grand Angoulême. Il s’agit d’un organisme de coopération territoriale dont la mission est de développer les filières de l’image, et plus précisément les secteurs comme la bande dessinée, l’animation, le jeu vidéo, le tournage de films, les œuvres immersives, et tout ce qui est effets visuels.

Notre travail consiste en particulier à prospecter et accompagner les entreprises et les écoles qui pourraient avoir un intérêt à s’implanter à Angoulême, à réaliser les programmes immobiliers permettant de les accueillir,  à promouvoir notre destination auprès des talents des différentes filières, à stimuler les coopérations entre les acteurs du territoire et à organiser des évènements locaux, nationaux et internationaux qui contribuent aux développements des filières.

3DVF : Ces dernières années, on voit plusieurs villes se renforcer sur les industries créatives : Montpellier, Rennes et Bordeaux en sont de bons exemples. Doit-on voir dans ces villes des concurrents d’Angoulême ?

FC : Il y a évidemment une forme de concurrence, oui. Quand une entreprise décide de s’installer à Angoulême, elle ne s’installe évidemment pas, par exemple, à Valence. Et réciproquement.

Après, tout se passe de manière soft et souple, chacun vend ses arguments et les dirigeants d’entreprises qui veulent lancer une antenne prennent leur décision.

Pour Angoulême, il y a des arguments liés à ce que je disais plus haut sur l’écosystème, mais aussi évidemment aux soutiens financiers locaux, la qualité de l’accueil en arrivant, ou encore le lien avec Paris. Avec seulement 1h45 de TGV pour les trains directs, j’arrive facilement à caser 4 rendez-vous à Paris dans une même journée, en partant d’Angoulême le matin et en y revenant le soir.

Tobie Lolness, produit par Tant Mieux Prod. Les équipes de Fost Angoulême étaient en charge d’une partie du layout et de l’animation.
La série est disponible depuis le 1er Décembre sur Okoo et dès le 24 Décembre sur France 4.

3DVF : En termes d’aides financières, quels sont les soutiens pour les studios qui souhaitent s’installer ?

FC : Il y a différentes aides, qu’il s’agisse celles proposées par le conseil régional, ou de nos fameuses aides à la production pour soutenir les œuvres fabriquées dans les studios locaux. Ces aides à la production représentent cette année environ 2,3 millions d’euros. La région pèse lourd également sur la production, ce sont de vrais budgets qui sont investis.

Le studio d’animation BobbyPills, a ouvert en 2023 une branche à Angoulême.

3DVF : En dehors de Magelis, quelles autres entités locales peuvent intéresser les studios qui envisagent de s’installer ? Que ce soit des institutions, associations ?

FC : En fait, notre philosophie est vraiment que Magelis soit la porte d’entrée unique, pour plus de simplicité. Après, on peut travailler avec la technopôle Eurekatech du grand Angoulême, avec la région, les services du département puisque ce sont eux qui gèrent les budgets d’aide à la production.
Nous disposons aussi d’une SEM (société mixte d’économie locale) qui peut par exemple aider un studio qui voudrait construire des locaux de 1000m² puis les louer. La SEM jouera le rôle d’un promoteur immobilier et louera les locaux au studio.

Mais encore une fois l’idée pour Magelis est d’accompagner l’entreprise, donc on organisera les connexions et rendez-vous nécessaires selon les besoins des dirigeants. Cela peut aller très loin : je me souviens avoir, il a quelques années, accompagné des entreprises pour obtenir des délais de paiement de charges sociales, par exemple.

3DVF : Parlons un peu de France 2030. L’appel à projets La Grande Fabrique de l’Image a eu un impact sur l’ensemble du territoire français. Quels sont les actions locales ?

FC : Nous avons eu deux dossiers charentais retenus, mais en pratique, il faut prendre en compte d’autres situations : par exemple celle de Superprod dont le siège est à Paris, mais dont le studio d’Angoulême bénéficiera évidemment aussi des avancées. Je pense que Xilam sera dans le même cas.

Au niveau purement local on a surtout l’ENJMIN, école nationale du jeu vidéo, dont le dossier a été retenu. Cela va permettre à l’école de se développer sur différents axes. Je note d’ailleurs que le directeur de l’école est un grand spécialiste de l’IA (il a d’ailleurs sa propre entreprise sur ce thème). On travaille donc sur ces thématiques avec l’ENJMIN, nous comptons bien développer cet axe.

Ci-dessous : reportage France 3 sur l’ouverture du studio Superprod à Angoulême.

3DVF : Autre sujet abordé dans les conférences, la transition écologique. Et justement, Magelis soutient BoCAJ (Bouleversement Carbone dans l’Animation et le Jeu vidéo), qui s’est officiellement lancée durant ces RADI-RAF et que nous avons évoquée sur 3DVF. Magelis soutient activement l’entité, quelques mots sur cette démarche ?

FC : C’est un soutient tout naturel, je pense qu’à ce stade tout le monde doit avoir en tête de réduire son empreinte carbone, à titre individuel comme à titre professionnel. Nous nous devons donc de soutenir ces initiatives, nous sommes membres d’Ecoprod.

Nous avons participé à la création du Guide de l’Animation Eco-Responsable évoqué durant les conférences et qui avait été dévoilé en juin dernier au Festival d’Annecy.

Il restait cependant le besoin d’avoir, localement, une entité pour aider nos propres studios à travailler sur ces sujets. BoCAJ est une association portée par les studios, Magelis en est le bienfaiteur, comme l’ont expliqué les membres durant les RADI-RAF. Il est important pour nous de les soutenir, on ne peut pas passer à côté de ces sujets.

Ci-dessous : brève intervention de l’association BoCAJ, durant les RADI-RAF 2023.

3DVF : Pour finir, nous évoquions plus haut certains axes de développement des activités de Magelis : y a-t-il d’autres projets pour les années à venir ?

FC : Oui, outre les aspects déjà évoqués, je pense qu’il faut nous renforcer à l’international, nous ne sommes pas encore assez présents à ce niveau. L’idée étant par exemple de favoriser les co-productions qui ont un intérêt pour nos entreprises, de faire du développement économique, d’avoir des échanges d’élèves et enseignants entre les écoles locales et étrangères, ou encore d’accueillir des artistes en résidence comme nous avons commencé à le faire en 2023.

Autre grand sujet : nous travaillons sur la question de la réduction de l’empreinte carbone de Magelis, et BoCAJ sera d’une aide précieuse sur ce sujet, d’autant que trois gros chantiers immobiliers vont bientôt démarrer.

Enfin, Angoulême est une terre créative, Magelis un pôle productif et nous devons aussi devenir un pôle innovant. Par exemple en incitant des entreprises qui développent des technologies pour le monde de l’image à s’installer ici, en lien avec les studios locaux. La toute prochaine étape sera de constituer un projet stratégique en vue de répondre à l’appel à manifestation d’intérêt « Pôles territoriaux créatifs et culturels » dans le cadre de France 2030.

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