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TF1 et M6 veulent conserver Gulli : un risque pour l’animation ?

Nous avions déjà abordé le projet de fusion des groupes TF1 et M6, qui pourrait mener à la création d’un mastodonte du secteur audiovisuel français doté d’un chiffre d’affaires de 3,3 milliards d’euros environ.

10 chaînes, seulement 7 places disponibles

La question de l’avenir des chaînes de la future entité se postait néanmoins : TF1 et M6 représentent 10 chaînes au total (TF1, LCI, TMC, TFX, TF1 Cinéma Séries, M6, Gulli, Paris Première, 6ter, W9). Or la règlementation française interdit qu’un groupe en possède plus de 7.

Une incertitude restait donc : de quelles chaînes le futur groupe se délesterait-il ?

TF1 et M6 précisent désormais leurs intentions : vendre TFX et 6ter (des négociations ont débuté avec Altice Media qui serait l’acquéreur), tandis que M6 « envisage de restituer la fréquence TNT de la chaîne Paris Première ».

L’animation face à un acteur dominant ?

Ce choix implique donc que le groupe issu de la fusion TF1/M6 conserverait Gulli, premier diffuseur de contenus animés sur la TNT. Entre Gulli et les programmes jeunesse de TF1, le futur géant de l’audiovisuel se placerait du même coup dans une position dominante sur le marché, tant pour la production que la diffusion.

De fait, entre la nouvelle entité et France Télévisions, le secteur de l’animation se retrouverait face à un quasi duopole, ce qui réduirait la marge de négociation du secteur.

Une situation qui confirme les craintes exprimées par certains acteurs du secteur comme AnimFrance au Festival d’Annecy 2021.
Le sujet avait aussi été évoqué par les syndicats du secteur plus récemment lors d’une table-ronde des RADI RAF, que nous avions filmée et que vous pouvez retrouver en fin d’article ou dans notre compte-rendu des RADI RAF.

Face à ces nouveaux éléments, AnimFrance, syndicat du secteur de la production audiovisuelle et cinématographique indépendante d’animation, a de nouveau réagi et exprimé ses réserves. Le syndicat invite l’Arcom (ex CSA) et l’Autorité de la concurrence à rester attentives à la question de la diversité éditoriale des contenus jeunesse, et plus largement au marché de l’animation en France.

Voici le communiqué d’AnimFrance :

Dans le cadre de leur processus de fusion, les groupes TF1 et M6 ont finalement décidé de conserver la chaîne jeunesse Gulli.
AnimFrance prend acte de cette décision du futur groupe. Conserver la plus importante marque jeunesse est une décision logique dans l’univers concurrentiel de la diffusion numérique. S’assurer une exposition forte auprès des enfants sur la TNT est stratégiquement pertinent pour le premier groupe privé français.
Si l’opération était validée par l’Autorité de la concurrence, le nouveau groupe occuperait alors une place dominante en matière de production et de diffusion d’œuvres d’animation pour les enfants.
En effet, Gulli est le premier diffuseur d’œuvres d’animation parmi les chaînes de la TNT avec plus de 6 700 heures par an et représente près de la moitié de la consommation d’œuvres d’animation des 4/10 ans sur ce même périmètre.
Par ailleurs, les cases jeunesse de TF1 sont leader depuis plusieurs années, malgré le renforcement de la concurrence.
Ce rôle essentiel devra être pris en compte tant par l’ARCOM que par l’Autorité de la concurrence, le marché hertzien se trouvant alors en situation de quasi-duopole.
L’animation française est un secteur d’excellence. Championne de l’exportation audiovisuelle, elle contribue au rayonnement de la France et a permis de créer de nombreux emplois sur l’ensemble du territoire français. La force de ce secteur s’est notamment construite sur la diversité de l’offre, un système d’investissement vertueux lui permettant de se projeter à l’international et de résister à une concurrence internationale particulièrement vive.
Dans leur évaluation, il est essentiel que l’Arcom et l’Autorité de la concurrence prêtent une attention toute particulière aux meilleurs moyens de garantir la diversité éditoriale du futur ensemble afin d’offrir une programmation riche et diversifiée aux enfants, de consolider les investissements dans l’industrie française à la hauteur de la place essentielle que le futur ensemble occupera sur le marché et de permettre l’existence d’une concurrence saine et durable au profit de développement de la production indépendante française et de sa compétitivité.

Nous aurons l’occasion de revenir sur ce projet de fusion dans les semaines et mois à venir.

D’ici là, voici la table-ronde des RADI RAF évoquée plus haut et filmée fin 2021. Le rapprochement TF1/M6, l’avenir de Gulli, mais aussi France Télévisions et l’impact des présidentielles sont évoqués à partir de 27 min 16.

Autour de la table :
Stéphane Le Bars (Délégué Général – AnimFrance)
Jean-Yves Mirski (Délégué Général – FICAM)
Céline Hautier (Déléguée animation – SPI)
Christophe Pauly (Fédération Communication, Conseil, Culture – CFDT)
Jean-Luc Ballester (Secrétaire du secteur Animation – SNTPCT)
Laurent Blois (Délégué Général – SPIAC-CGT)
Modération : Patrick Eveno

3 commentaires

johan26 5 mars 2022 at 20 h 35 min

Malgré avoir écouté la vingtaine de minutes pleine de « ehhh » je n’arrive toujours pas à comprendre où y a t il une menace ou un problème pour les acteurs de l’animation sachant que Guilli continuera d’exister.

Shadows 5 mars 2022 at 21 h 16 min

Actuellement l’industrie a trois grands groupes en face d’elle pour la TV « classique » (hors plateformes) : France TV, TF1, M6, qui représentent l’écrasante majorité du marché.
Après la fusion : deux groupes seulement, puisque Gulli n’est pas vendue.

Ca va donc mécaniquement augmenter le pouvoir de France TV et TF1/M6 au niveau des négociations, un peu comme si un producteur alimentaire n’avait plus que deux magasins possibles à qui vendre ses produits.
C’est ce que je tentais d’expliquer dans l’article dans le passage sur le duopole mais je n’ai peut-être pas été assez clair. 🙂

Autre risque, plus difficile à quantifier : chaque groupe ayant un peu sa philosophie, une fusion pourrait réduire la diversité des projets créés.

johan26 6 mars 2022 at 2 h 43 min

Ahhh oui effectivement je n’avais pas tilté plus que ça l’histoire des duopoles qu’ils évoquent bel et bien dans l’assemblée, qui sont souvent signe de négociations déséquilibrées.
C’est surtout la partie négociations que je n’avais pas pris en compte, merci bien de ta part d’avoir pris un peu de ton temps pour la pédagogie.

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