Migrants

Interview – Migrants : des ours polaires dans la course aux Oscars [court disponible!]

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3DVF : Quelle a été votre approche du rigging et de l’animation pour les personnages principaux ?

Pour l’animation, nous avions tenté différents styles avant d’arriver à ce résultat. Nous avons d’abord testé quelque chose de plus cartoon, mais c’était trop éloigné de l’atmosphère que nous voulions pour le film. Nous avons donc cherché quelque chose d’autre et trouvé un style semi-réaliste, qui était plus adapté et nous laissait assez de liberté pour approcher le mouvement des ours bipèdes et quadrupèdes.

En parallèle, nous nous interrogions sur le framerate de l’animation. Nous avons fait des tests mais nous nous sommes rapidement rendus compte que 12fps était le chois le plus cohérent pour le projet, cela rendait nos personnages-marionnettes plus crédibles, puisque nous voulions nous rapprocher d’un rendu stop-motion.

3DVF : Quelques mots sur l’environnement de la forêt avec ses arbres, plantes, champignons ?

Nous avons d’abord créé des concepts de l’environnement global de notre forêt, avant de faire davantage de dessins pour chaque asset important qui allait définir le look de la forêt. Par la suite, nous avons modelé arbres, champignons, plantes, etc. dans Autodesk Maya et Houdini, en nous appuyant sur la suite Substance pour le surfacing.

Antoine Dupriez a créé un outil très utile pour le set dressing de notre environnement : nous n’avions qu’à créer un décor principal, avec un sol et quelques arbres, manuellement afin de garder le contrôle sur la composition du plan. Puis l’outil Houdini faisait du scattering, et plaçait les éléments de façon intelligente à partir de différentes informations (distance à la caméra, nom des assets, etc): l’outil générait d’autres arbres, de l’herbe et des assets secondaires, en prenant soin de ne pas les placer là où les personnages étaient animés afin d’éviter les interpénétrations. Nous avions beaucoup de contrôle afin d’obtenir le meilleur de chaque plan. Avec cet outil nous avons pu obtenir une bonne densité dans nos environnements sans avoir à placer chaque asset manuellement, cela nous a économisé énormément de temps et créé une bonne dose d’aléatoire.

3DVF : Avec le recul, de quoi êtes-vous le plus fier sur ce film ?

Nous avons eu beaucoup de retours sur la laine des personnages et leur aspect duveteux, la plupart des gens nous ont dit que cela fonctionne vraiment bien à la fois pour les ours polaires et bruns. Nous sommes très fiers du rendu visuel de nos personnages. Ils ont vraiment l’air de jouets doux mais ils ont tout de même quelque chose de spécial dans leur look et leurs formes, en particulier les ours polaires avec le côté patchwork sur leurs corps. Ce rapiéçage aide à montrer que les personnages ont déjà vécu avant même le début du film, comme s’ils étaient abîmés par la vie.

Nous avons essayé d’être exigeants sur la création de nos ours, du concept au résultat final, et c’est sans doute ce qui fait notre plus grande fierté.

3DVF : Le court a récolté de nombreux prix : Best in Show au SIGGRAPH 2021, Outstanding VFX in a Student Project aux VES Awards, VIEW Award du meilleur court à la VIEW Conference… Migrants est aussi finaliste des Oscars Etudiants 2021.
Comment expliquez-vous un tel succès ?

Le succès du film est juste incroyable. Non seulement pour nous mais aussi pour notre école et le distributeur Je Regarde (Patrick de Carvalho).

Nous sommes surpris par le nombre d’événements majeurs qui ont primé notre court. Nous pensons que ce n’est pas commun pour un film étudiant de recevoir autant de prix prestigieux. Pour être tout à fait honnêtes, nous ne nous attendions pas à ça durant la réalisation du film, mais après sa sortie, nous avons rapidement reçu des retours particulièrement positifs en festival. Nous pensons que le premier élément du succès en compétitions fut le Spark Animation à Vancouver. Après cela, il y a eu un effet boule de neige dans les festivals.

Actuellement, le film a accumulé plus de 220 sélections et gagné plus de 60 prix. C’est totalement incroyable pour nous.
Nous sommes également très heureux de notre succès dans les compétitions académiques, la dernière étant les BAFTA. Nous attendons les Student Academy Awards (Oscars étudiants) avec impatience, car nous sommes dans les 3 projets finalistes. Et quel que soit le vainqueur, les élèves et écoles français seront déjà bien récompensés (les trois films finalistes viennent d’écoles d’animation 3D française).

Suite à ce succès, nous avons eu la surprise de recevoir des messages positifs de la part de personnalités majeures de l’industrie de l’animation !

3DVF : Migrants est distribué par Je Regarde. Quelques mots sur ce distributeur et sur la stratégie de distribution adoptée pour Migrants ?

Je Regarde (porté par Patrick De Carvalho) travaille avec notre école Pôle 3D depuis 5 ans. Patrick De Carvalho gère aussi la distribution des courts Rubika en France. Patrick fait un travail très intense, et nous lui sommes très reconnaissants. Il est totalement transparent avec nous, les élèves, mais aussi avec l’équipe pédagogique. Nous sommes tenus au courant de chaque sélection en festival pour Migrants, pour les prix mais aussi pour les récompenses financières qui en sont issues, qui sont partagées entre les 5 membres de l’équipe.

La stratégie de Patrick pour le film est de lui donner autant de visibilité dans autant de festivals que possible. Nous pensons qu’il s’appuie sur un réseau très actif côté festivals. Tout son travail a fait que notre film est éligible pour les Oscars 2022.

3DVF : Il n’est pas courant que les films de fin d’études de Pôle 3D arrivent à un tel niveau de reconnaissance dans l’industrie, et des lectrices/lecteurs hors de France ne connaissent donc peut-être pas l’école. Que pouvez-vous nous dire sur le cursus d’animation ?

Pôle 3D est une école d’animation et effets visuels basée à Roubaix, dans le Nord de la France. L’école est située dans « La Plaine Image« , un cluster dédié aux industries créatives. L’école a été créée il y a 17 ans par son directeur, Antoine Durieux.

L’ambition de Pôle 3D est de créer des courts innovants, qui prennent des risques autant sur le fond que la forme. L’équipe pédagogique s’adapte et s’améliore chaque année, et depuis quelques années des spécialisations sont créées pour répondre aux besoins du marché. Tous les élèves de notre promotion ont trouvé leur place dans l’industrie, ce qui est une bonne nouvelle.

Nous avons eu la chance de voir notre école largement évoluer pendant que nous y étions, c’était très motivant et satisfaisant de faire partie de cette évolution. Nous espérons que le succès soudain de notre film inspirera les futures promotions de Pôle 3D et sera un défi pour elles.

3DVF : Comment avez-vous évolué depuis la sortie de l’école ? Et recherchez-vous de nouvelles opportunités ?

Toute l’équipe travaille désormais dans l’industrie, sur des projets animés.
Antoine Dupriez est actuellement VFX Artist chez Illumination MacGuff à Paris.
Zoé Devise est lighting compositing artist chez Jungler Paris.
Lucas Lermytte est à Montréal, il est TD Rig chez Mikros Animation.
Aubin Kubiak est animateur 3D chez Superprod à Angoulême.
Hugo Caby est chez Cube Creative à Paris en tant que lighting & compositing artist.

Bien évidemment, chaque membre de l’équipe a une situation spécifique, mais globalement nous sommes disponibles pour de nouvelles opportunités de postes, car pour l’essentiel nous avons des contrats courts. Certaines personnes dans le groupe aimeraient par ailleurs travailler sur des projets live action, d’autres changer de pays. Si vous lisez cette interview et qu’un de nos profils vous intéresse, n’hésitez pas à nous contacter sur LinkedIn ou ailleurs !

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