Le motion designer Fred Trétout travaille sur des projets très divers, d’oeuvres de taille modeste à des projets destinés à des salles complètes, de créations artistiques au développement de nouveaux outils.
Nous vous invitons à découvrir son univers au travers d’une interview ; l’occasion d’en savoir plus sur son parcours, ses dernières oeuvres, son usage d’approches telles que les dômes, ou encore son activité d’enseignant.
3DVF : Bonjour Fred, tu travailles dans le motion design et l’art interactif depuis une dizaine d’années déjà. Quel est ton parcours, et qu’est-ce qui t’a poussé à prendre cette orientation ?
Fred Trétout : Bonjour 3DVF, c’est un grand plaisir de me faire interviewer par un magazine que j’adore. Pour mon parcours j’ai un Bac S et un BTS en communication visuelle et une licence pro en 3D temps réel que j’ai fait à Laval à l’ESCIN (maintenant L3Di), j’ai fait un stage de fin d’étude à Montréal et je ne suis jamais revenu en France, à part pour les vacances. Ce qui ma poussé a prendre cette voix, je pense que ce sont les films : Kaena et Final Fantasy : The spirits within. Je voulais savoir comment créer des films en 3D, j’ai trouvé une version de Cinema 4D dans un magazine et c’est là que tout a commencé. Un autre élément déclencheur est mon arrivé à Montréal et ma découverte de la projection mapping sur les façades de bâtiments, dans les dômes, je me suis alors réorienté en motion design. Peu de temps après j’ai voulu mélanger mon background de jeux vidéo avec du motion design ce qui m’a lancé dans l’art interactif.
3DVF : Après avoir enchaîné les postes dans les studios tu es depuis quelques années passé en freelance : quels sont les avantages et inconvénients de cette évolution ?
En fait, je peux dire que j’enchaîne des studios depuis que je suis freelance, la majeure partie de mes clients sont des studios. Souvent je vais travailler à leurs bureaux pendant plusieurs semaines, ce sont souvent des projets de 1 à 4 mois. J’aime cette dynamique de changer souvent de place de rencontrer du nouveau monde. J’ai la liberté de choisir mes projets, des fois je refuse car je vois la catastrophe en gestion de projet ou que le thème ne fait pas partie de mes valeurs. Après, les studios lorsqu’ils te contactent ils te veulent pour la semaine suivante, c’est un agenda compliqué, ce n’est pas rare d’avoir plusieurs projets en même temps, comme des trous vides plusieurs semaines. Il faut savoir gérer son temps et son argent, être en auto apprentissage constant (non rémunéré). Il faut réussir à accepter de ne pas savoir ce que l’on va faire dans 3 mois.
3DVF : Un des aspects de ton travail est la création d’installations artistiques interactives destinées au grand public. Asile, par exemple, traite des libertés individuelles. Peux-tu nous présenter cette oeuvre et sa genèse artistique ?
Oui, j’ai voulu traiter des libertés individuelles et collectives, des lois qui sont imposées dans une société où les règles tacites émanent d’une communauté. A cette époque il y avait la caravane de migrants qui se dirigeait vers les USA, j’ai voulu retranscrire ce désir de quête dangereuse en oubliant toutes règles et frontières pour un avenir que l’on souhaite meilleur. D’un autre côté, je voulais aussi illustrer les comportements de personnes qui ont tendance à se mettre des barrières, à se restreindre dans une zone de confort. Et enfin les personnes restreintes dans des centres et privées de leur liberté. C’est beaucoup de thèmes pour une simple vidéo. L’animation illustre une petite créature dans un monde Escherien à la quête d’une île, le cadre physique en métal est la représentation de la société où il vit, une société fondée sur les prédictions statistiques (en référence la psychohistoire de la trilogie des Fondations d’Asimov). La créature se fera analyser, elle s’émancipera pour rechercher son île, elle sera rattrapée par le cadre et brisé pour ne faire qu’un avec lui. Bref c’est une histoire triste. L’exposition a été organisé la Mapp_MTL qui devrait aussi arriver bientôt en France à Nantes.
Asile dispose d’une page dédiée sur le site de Fred Trétout.
3DVF : Aéro, de son côté, nous invite à suivre une jeune fille dans ses rêves de voyages spatiaux. Le projet fait notamment appel à un écran de type dôme (hémisphère). Comment s’est passée la collaboration avec Stefano Gemmellaro, qui a co-réalisé le projet ? En termes de réalisation, le dôme est un support atypique : la grammaire visuelle à utiliser est-elle différente de, par exemple, de la VR ?
Ma collaboration avec Stefano a été merveilleuse, nous sommes des amis depuis 10 ans, il fallait bien se connaître parce que ce projet était court en termes de temps de réalisation. Initialement nous devions faire des clips VJ dans le dôme, mais notre ami Cedrick Lalaizon producteur sur le projet, nous a motivé à faire un film. Nous nous sommes séparés les scènes et avons créé le film en 3 semaines, un grand merci à Philippe Hughes et Kyle Switzer pour la partie sonore. On a eu le droit a une superbe équipe sur ce projet.
C’est drôle que tu mentionnes la VR, car le film a été rendu en format VR (spherical equirectangular), il y a d’ailleurs une version qui tourne sur des casques Oculus Go. Donc oui le format Fulldome et VR se ressemblent beaucoup, il y a la même intention de guider le regard des spectateurs vers le déroulement de l’histoire. Les notions de cadrage de déplacement de caméra sont effectivement atypiques.
C’est un nouveau langage qui nécessite de la pratique et j’ai la chance de pouvoir faire mes expérimentations en tant que VJ depuis 6 ans dans le dôme de la SAT (Satosphère qui est un dôme de 210°par 360° de 11 mètres de haut 8 projecteurs et 135 speakers) c’est lieu superbe qui accueille des résidences d’artistes (comme mon Electro Acrylique) et création de film.
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