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Sébastien Potet, rigger/character TD chez PDI/DreamWorks

Sébastien Potet

 

En poste depuis plusieurs années chez PDI/DreamWorks en tant que Rigger / Character TD, Sébastien Potet dispose d’un CV bien rempli : rig de Harvey Dent sur Batman : The Dark Knight, rig facial d’Aslan sur Le Monde de Narnia : Le Prince Caspian, Rigs faciaux des Singes et de Gloria ainsi que scripts pour Madagascar 3

Il a accepté de revenir avec nous sur les projets marquants de son parcours et son travail chez PDI/DreamWorks.

Pour des raisons de NDA (accords de non divulgation), nous ne pourrons malheureusement pas vous montrer directement les rigs développés par Sébastien Potet.

Visuels de Madagascar 3 : Paramount Pictures / DreamWorks Animation – tous droits réservés.

 

 

3DVF : Bonjour Sébastien, peux-tu te présenter et revenir sur ton parcours avant ton arrivée chez DreamWorks ?

Sébastien Potet : Bonjour, je suis un rigger/character TD français expatrié depuis 10 ans aux 4 coins de cette planète.
Je travaille actuellement depuis 4 ans à DreamWorks San Francisco. C’est un peu difficile de résumer mon parcours vu que j’ai eu la chance d’essayer différents boulots dans la 3d (film, effets spéciaux, jeu vidéo, site web 3D, séries…) avant de devenir rigger…

Pour faire court, je dirais que je suis originaire de La Rochelle et qu’après des études universitaires à Poitiers , je suis monté à Paris pour trouver du boulot comme beaucoup d’aspirants graphiste 3D. Pendant mes études, j’avais réalisé un court métrage 3D sur mon PC 486 DX33 avec 3D studio 3 (la version MS-DOS) !
Et c’est ce court métrage qui m’a permis de trouver mon 1er boulot dans la 3D à Canal+. C’était l’époque des clips et autres habillages TV sur 3ds Max 1 et Windows NT. 

Après ça, j’ai bifurqué dans le jeu vidéo à Delphine Software et Nevrax où j’ai eu une expérience géniale de rigger/animateur. Suite à ça, j’ai eu l’opportunité de partir en Inde pour co-réaliser une série d’animation française Mica qui m’a permis de comprendre ce qui m’intéressait vraiment : le cinéma et l’animation.


Alors, je suis parti à Berlin bosser sur le long métrage 3D Happily N’Ever After en tant que rigger. Et de fil en aiguille, j’ai décroché un poste de rigger à Framestore Londres où j’ai bossé sur les effets speciaux de Harry potter 5, Narnia 2, Batman… Une expérience géniale dans une ville bouillonnante !
Voilà en gros (avec quelques étapes de sautées) mon parcours jusqu’à DreamWorks.

 

 

 

Ci-dessous, Harry Potter et L’Ordre du Phoenix : travail sur les centaures (gestion des déformations des muscles et de la peau)

Harry Potter

 


Australia
Rigs d’animaux pour Australia.

3DVF : Qu’est-ce qui t’a amené à te spécialiser en tant que rigger/character TD ? Pourquoi cette voie ?

S.P. : Il y a 15 ans, il était encore possible de tout faire sur une production. J’ai eu alors la possibilité de pouvoir toucher un peu à tout : du modeling au rendu d’images.  
J’avais commencé à me spécialiser dans l’animation, mais j’étais constamment frustré par les problèmes et les lenteurs des rigs que je devais animer. Peu à peu, je me suis intéressé au rigging, à l’anatomie et j’ai commencé à construire mes propres rigs. J’ai eu peu à peu des boulots de rigger/animateur dans le jeu vidéo, mais c’est après mon expérience de rigger à Berlin que j’ai décidé de l’être à plein temps ! On peut dire que tout a commencé par une frustration. 🙂

Singe

 

3DVF : En 2008, tu passes de Framestore à DreamWorks : comment s’est déroulé le recrutement ?

S.P. : J’étais à Londres en plein rush sur la fin de la production de  Batman, The Dark Knight. Et un matin, j’ai reçu un mail sur LinkedIn d’une recruteuse de DreamWorks qui était de passage sur Londres. Je me rappelle encore de l’intitulé du message : Would you like to hear more about upcoming projects at Dreamworks ? . Comment refuser une telle proposition ? 🙂

Je l’ai rencontrée dans un Pub à Londres et quelques jours plus tard, j’ai passé un entretien (en visioconférence Londres, San Francisco, Los Angeles) avec les superviseurs du département rigging de DreamWorks. Quelques mois et quelques kilos de paperasses administratives plus tard, j’arrivais à san Francisco.

 

Madagascar 3

 

Aslan

3DVF : Revenons sur tes travaux les plus marquants, et tout d’abord le rig d’Aslan dans Le Monde de Narnia : Le Prince Caspian. Un projet délicat vu l’importance du personnage… Comment as-tu travaillé sur ce rig facial ? Quelles étaient tes contraintes ? Y a-t-il eu des problèmes particuliers ?

S.P. : Ça a été une production intense, mais très enrichissante techniquement. Le lion étant présent dans le précédent volet, il fallait produire au minimum la même qualité. La production du film nous avait envoyé quelques vidéos de Rythm & Hues (responsable d’Aslan dans le 1er volet) et il m’a semblé que « leur » rig facial d’Aslan était essentiellement bâti sur des blend shapes. Donc, des expressions très précises, mais peu de variété et un éventail de combinaison d’expressions limitées…
L’approche de Framestore était d’utiliser des deformers plutôt que des shapes. J’ai bossé 6 mois sur ce rig facial et à la fin, tout était implémenté à base de deformers , du glissement de peau jusqu’aux rides de compression ! Les animateurs ont fait un super boulot et le lion a, à mon humble avis, beaucoup plus de subtilité dans ses expressions. Mais, je ne suis peut-être pas objectif ! 🙂

 

Aslan

 

3DVF : Pour The Dark knight, tu as réalisé le rig facial de Harvey Dent, dont la moitié du visage a été gravement brûlée. Comment as-tu géré ce projet ?



S.P. : C’est peut-être le projet dont je suis le plus fier. J’ai personnellement développé un rig facial capable de mixer des datas de motion capture et de l’animation faciale. A partir des données de mocap/tracking (en gros, un nuage de locators en mouvement représentant les mouvements de la tête et les expressions faciales d’ Aaron Eckhart), le rig était capable de se fixer sur le visage de l’acteur, suivre le mouvement de sa tête et ses expressions faciales.

Nous avons dû faire face à énormément de problèmes car la performance de l’acteur n’était pas capturée dans un studio dans des conditions optimales, mais simplement sur le plateau de tournage. L’acteur avait de simples marqueurs blancs sur le visage qui ont été effacés image par image. Il a fallu capturer et reproduire cette performance avec seulement deux points de vue (la caméra principale et une autre additionnelle sur le côté) et dans les conditions de lumière du tournage (contre-jour, obscurité…). Bref, on a écrit pas mal d’outils pour reconstruire le mouvement quand les marqueurs étaient cachés par des objets sur certaines frames (la main de l’acteur, des objets du décor…) ou si le visage était flouté par une action violente, etc.

 La production a été vraiment intense : en moins de 6 mois, on a sorti environ 120 plans de Harvey Dent.

Harvey Dent

 

Harvey Dent

3DVF : Le système devait permettre de combiner données de motion capture et animation classique (keyframe) ; comment cela se traduit-il concrètement ?

S.P. : Concrètement, si vous copiez la réalité à 100 %, vous obtenez souvent une performance assez ennuyeuse et pas forcement photogénique : il faut toujours rajouter une petite touche pour la sublimer. C’était la première raison pour laquelle nous avons rajouté un système d’animation faciale. Les animateurs ouvraient simplement chaque plan dans Maya et rajoutaient un peu d’animation ici et là sur le rig pré-animé par la motion capture.

Pour l’anecdote, la peau du personnage étant brûlée autour de son œil, un tracking parfait du mouvement oculaire donnait l’impression qu’il louchait ! il a fallu réanimer le mouvement de son œil pour atténuer cette impression !

 

The Dark Knight
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