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Les fantômes du Père Lachaise

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Antoine Colomb et Guillaume Rio viennent de dévoiler Les Fantômes du Père-Lachaise, pilote de long-métrage produit par De Films en Aiguille (en coproduction avec le studio parisien Chez Eddy), et réalisé au sein de Chez Eddy.
Ce projet ambitieux confirme la volonté du studio de se tourner vers le cinéma, comme nous l’expliquait Jean-François Bourrel, cofondateur, dans une interview publiée en 2010.
Le court marque également les débuts du studio sous Renderman.

En compagnie de différents intervenants présents à tous les niveaux (qu’il s’agisse des réalisateurs, de la production ou de l’équipe de Chez Eddy), nous vous proposons aujourd’hui d’explorer les coulisses de ce projet.
L’interview au eu lieu durant la production du pilote, ce qui explique que des évènements désormais passés puissent être évoqués au futur (Festival de Cannes, en particulier).

3DVF remercie toute l’équipe du court, qui a bien voulu nous dévoiler l’envers du décor.

Ci-dessous, le pilote :

 

Présentation du projet

Pour commencer, nous avons pu interroger Guillaume Rio, un des deux réalisateurs du court, ainsi qu’une partie de l’équipe de Chez Eddy.

3DVF : Comment le projet est-il né ? Comment s’est-il mis en place ?

– Guillaume Rio (coréalisateur du court) : Antoine Colomb (le coréalisateur) et moi nous travaillions ensemble pour Disney Channel, sur leur habillage et autopromotion. Lui habitait le 20e arrondissement, de mon côté je passais devant le cimetière tous les jours pour arriver au travail, et nous avons réalisé qu’avec le « casting » du Père-Lachaise, il y avait un gros potentiel… Tout ça se passait en 2005 ou 2006.
Le projet est longtemps resté à l’état de simple idée, tellement longtemps que nous avons notamment eu le temps de travailler sur une série d’animation, ce qui nous a permis de faire nos armes, de mûrir, de collaborer et de nous rendre compte que nous faisions du très bon travail à deux.

Nous avons fini par décider de nous bouger, on a réalisé une petite plaquette avec le projet, une amie graphiste a réalisé quelques ébauches tandis que nous avancions sur le scénario. Le but était d’aller au Festival d’Annecy avec la plaquette, mais au final elle est restée dans notre sac durant tout le festival ! Nous n’y avons pas rencontré les bonnes personnes.

Plus tard, après le festival, nous avons montré la plaquette à Carine Ruszniewski et Carole Lambert de De Films en Aiguilles ; ce sont des amies, cela a facilité les choses. Comme De Films en Aiguilles n’était pas vraiment axé sur l’animation, le but était plutôt de leur montrer ce qu’on faisait, pas forcément de collaborer. Mais elles nous ont rappelés le lendemain ! Et depuis elles nous ont poussés à avancer, elles ont travaillé sur le financement.

Ci-dessous, le color board du court ; découvrez-le également en version HD (3000 pixels de côté).

Color - board

 

3DVF : Comment s’est fait le lien avec Chez Eddy ?

– Coline Six (directrice despost-production au sein de Chez Eddy) : Carine et Carole ont démarché plusieurs studios d’animation, et les choses ont bien accroché avec Jean-François Bourrel et Nicolas de Rosanbo les producteurs de ChezEddy.

– Guillaume Rio : Ils nous ont aussi proposé un panel de graphistes pour designer personnages et décors, et ont mis directement dans le mille : on a presque tout de suite trouvé les talents qu’il nous fallait.

– Coline Six : Il s’agit notamment de Rémi Salmon (design décors) et Julien Faure (design persos), avec qui Chez Eddy a l’habitude de travailler.

3DVF : Quel est le public visé ?

– G.R. : On restera sur un public familial, pour les producteurs évidemment une audience 7 ans et plus est plus rassurante, même si on aimerait du 15 ans et plus… [rire]
En fait on aime l’idée d’avoir plusieurs niveaux de lecture, avec un film accessible aux enfants mais qui parle aussi aux adultes. Avec de tels personnages, il est possible de parler à toutes les générations. Au final le long-métrage sera sans doute du 7 ans et plus, mais avec ces différents niveaux de lecture.

 

Cimetière

 

3DVF : Le court utilise une bande-son en anglais, ce qui va évidemment faciliter la recherche de financement ; pour le futur film, quelle sera la langue principale du film, celle utilisée notamment pour le lip-sync ? On imagine que le choix sera lié à l’ambition du film, selon qu’il soit destiné à la France ou également à l’exportation…

– G.R. : On ne s’est pas encore trop posé la question, du point de vue de la réalisation ça ne changera pas grand-chose ; c’est plus au niveau de la production que la décision sera prise, je pense. Maintenant, il est clair que l’on a déjà anticipé l’exportation en évitant de se focaliser uniquement sur des personnages franco-français parmi les personnalités du Père-Lachaise. Jim Morrisson, Oscar Wilde ou Chopin séduiront facilement un public en dehors de l’hexagone ; Balzac et Molière, s’ils sont français, ont tout de même une grosse renommée à l’étranger.
Il y a des personnalités du monde entier au cimetière, et donc une richesse énorme à exploiter.

3DVF : Avez-vous pensé au relief ?

– G.R. : Le court ne l’est pas , et pour le long… À voir !

3DVF : Si la recherche de fonds pour le long-métrage est un succès, la production serait-elle à nouveau confiée à Chez Eddy ? Partagée avec d’autres studios ?

– Jean-François Bourrel (cofondateur de Chez Eddy, producteur associé et producteur exécutif sur le projet) : Nous avons fait en sorte que ChezEddy soit prioritaire sur la fabrication du long métrage. C’est une des volontés du studio d’aller vers le cinéma d’animation, le travail entre De Films en Aiguilles, les réalisateurs et l’équipe de ChezEddy s’est très bien passé, les échanges étaient fluides et toujours constructifs. Nous allions tous vers un même but à savoir, faire un beau pilote pour que le projet de long métrage ait le plus de chance possible de se concrétiser.

– Guillaume Rio : D’ailleurs c’était aussi le but : se connaître, commencer à travailler ensemble. De mon côté, faire un long de la même qualité artistique et technique que le pilote issu de Chez Eddy m’enthousiasme totalement !

 

 

Tombe - Molière

 

3DVF : Jean-François, il y a deux ans tu avais accordé une interview à 3DVF, et nous avions notamment évoqué le générique de Splice ; pour toi, il s’agissait du premier pas de Chez Eddy au cinéma, et tu nous indiquais qu’il s’agissait clairement l’un des axes de développement futurs… Où en est le studio aujourd’hui ? Avec Les Fantômes du Père-Lachaise, Chez Eddy a-t-il pour ambition de faire d’autres films d’animation par la suite ?

– Jean-François Bourrel : Depuis Splice, nous avons travaillé sur d’autres génériques de long métrage ( » Plan de Table  » réalisé par Christelle d’Aulnat et un gros film international qui sortira pour Halloween dont nous ne pouvons pas encore révéler le nom), en parallèle nous avons toujours continué de développer nos outils pour renforcer notre pipeline. La volonté de faire un long métrage d’animation a toujours été présente, cela fait maintenant 8 ans que nous travaillons sur le pipeline, cela prend du temps et nous souhaitons continuer de faire les choses dans l’ordre. La fabrication de ce pilote arrive dans la continuité de ce que nous avions déjà testé sur de plus grosses durées (8 minutes sur  » Settler « ). Ce projet très motivant nous a permis d’optimiser notre potentiel, de tirer également des conclusions sur ce qui est fluide et ce qui l’est moins. Nous sommes assez fiers d’avoir fabriqué le pilote en 75 jours, cela montre la solidité de notre pipeline.

L’année dernière, le studio a été interrogé pour le projet Astérix produit par M6. Sur cette compétition qui nous réunissait avec Mikros Images et Buf, nous avons appris énormément. Nous n’avons pas eu à rougir de notre pipeline, le réalisateur, le directeur technique et le directeur d’animation étaient assez séduits par les outils développés au sein du studio (Vertex Baker, HarmonicDeformer, Setup Automatic, etc…).

Comme vous le savez, la fabrication d’un long métrage d’animation 3D est un exercice périlleux et de nombreux studios s’y sont cassés les dents. Le danger est réel car nous sommes en face de producteurs qui ne comprennent pas toujours les problématiques et les coûts d’un film d’animation. Les budgets des longs métrages d’animation 3D peuvent paraître importants mais ça n’est rien comparé aux budgets US, nous ne pouvons pas les concurrencer en frontal.

Il est très dangereux d’envisager le niveau d’un Pixar avec dix fois moins de budget et notre rôle de studio consiste à ne pas se considérer comme simple prestataire de service capable de faire tout et n’importe quoi : ChezEddy propose en amont du projet un regard sur l’écriture et une vision précise sur le traitement graphique, qui sera nécessairement en adéquation avec le budget final disponible.

Il suffit que le studio à un point clef de la production n’arrive pas à contrôler ou affirmer sa vision, et la chute est assurée. Notre volonté est donc de rentrer en co-production en amont du projet avec le producteur. Nous souhaitons travailler avec la production pour intervenir dans les choix d’écriture afin de garder toujours à l’esprit la volonté de faire un beau film mais aussi en ayant toujours à l’œil les contraintes budgétaires.

La force de ChezEddy sera de savoir imaginer de nouvelles façons de travailler sans jamais baisser l’exigence de qualité scénaristique et artistique. Je reste persuadé que la France possède un potentiel énorme, nous travaillons vite et nous avons des infographistes de talents, il faut simplement réfléchir autrement. Si vous regardez l’historique de ChezEddy, nous gardons la même logique, en 2002 nous avons démarré en tant que studio de post-production publicitaire, en 2006 nous avons structuré une production en représentant des réalisateurs pour le marché de la publicité tout en développant le studio. Si nous n’avions pas opéré ce changement, qui consiste à vendre le studio à travers une vision artistique individuelle, nous n’en serions pas là.

J’ai toujours pensé que la valeur ajoutée de chaque personne leader au sein du studio est la pierre angulaire de ce métier. Aujourd’hui nous avons des réalisateurs que les agences sollicitent, demain nous aurons peut être une approche qui séduira les producteurs qui souhaitent s’associer avec nous pour la production et la fabrication d’un long métrage. Quoiqu’il en soit, c’est bien parti avec Les Fantômes du Père Lachaise, nous sommes en parfaite symbiose avec les productrices de Films en Aiguille.

 

Rendu - Lucy

 

3DVF : Comment se sont passées les choses en termes d’effectifs et de délais de production ?

– Steven Ligot, Coordinateur de Production au sein de Chez Eddy : On a commencé le modeling en basse def début février, ce qui fait environ 75 jours de production en tout. En termes d’effectifs, il y a eu 19 personnes, en ne comptant que les infographistes. Ce qui fait environ 350 jours-hommes. Il faut ensuite évidemment rajouter les chargés de production et autres postes de ce type, dont Coline Jean-François ou moi faisons partie.

3DVF : Comment l’équipe s’est-elle mise en place ? Qu’est-ce qui a, par exemple, conduit au choix de tel ou tel artiste sur un poste ?

– Coline Six : Pour le layout et l’animation low-res on a opté pour des juniors en raison du budget serré. C’est d’ailleurs ce qui a présidé une bonne partie de la production : nous avions une enveloppe et nous ne devions pas dépenser plus que prévu.

Pour la suite nous avions des équipes de deux ou trois personnes au maximum pour chaque département, avec un lead. Pour les décors, ce sont des artistes avec qui j’avais travaillé chez Duran ; un unique graphiste senior s’est chargé des personnages, deux personnes pour le rendu ou le compositing… Vraiment de petites équipes. À chaque fois on a essayé d’associer un lead et un junior, ou un lead et un middle.Pour les caméras, le directeur artistique du projet, Jérôme Calvet, s’est chargé de tout.

– Steven Ligot : On a aussi privilégié des équipes avec des gens ayant l’habitude de travailler ensemble : pour les textures les artistes avaient déjà collaboré dans le studio, pour la modélisation nous nous sommes appuyés sur les contacts de Coline qui venaient plutôt de Duran, mais qui se connaissaient déjà avant le début du projet. Le but était vraiment d’éviter les pertes de temps que l’on a entre personnes ne se connaissant pas.

Cimetière
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