Compte-rendu : Laval Virtual 2012

Laval Virtual

 

CLARTE : R&D et savoir-faire

Le Centre Lavallois de Ressources Technologiques (CLARTE) disposait lui aussi d’un stand important, qui a attiré de nombreux visiteurs. Créé en 1996, cet organisme de R&D en réalité virtuelle et augmentée met à disposition des entreprises et de la recherche son expertise en développement d’applications innovantes.
En pratique, CLARTE dispose d’un financement public, et travaille également en collaboration avec de grands groupes industriels sur le développement et l’usage de nouvelles technologies. Une quinzaine de permanents travaillent dans le centre.
Plusieurs projets étaient exposés :
– un simulateur de téléopération développé avec le CEA, qui pourrait être utilisé dans une centrale nucléaire. Affichage relief, tracking de la position de la tête de l’utilisateur et bras à retour d’effort (qui simule les contacts et les limites physiques du bras du robot télécommandé) permettent à l’utilisateur d’interagir comme s’il se trouvait sur place.
– un système de visualisation de théâtre d’opération, à portée militaire puisque créé en partenariat avec la DCNS (affiliée à la Direction Générale de l’Armement, la DCNS travaille depuis 10 ans avec CLARTE sur différents projets). Pensé pour être compact et peu cher (il utilise des éléments du commerce), le système offre une solution de réalité virtuelle qui peut facilement se replier et se transporter. Il n’en est pas moins un système de réalité virtuelle complet, avec souris 3D, interactions multiples, gestion du relief et tracking du regard.
– Un système de réalité virtuelle destiné à tester l’ergonomie de postes physiques, destiné principalement aux sous-traitants automobiles.

– autre exemple, présenté sous forme de poster lors des conférences et non pas directement sur le stand : la conception d’un système de navigation pour bateaux faisant appel à la réalité augmentée et développé avec la DCNS. Le projet actuel a pour but d’établir un cahier des charges pour ce futur système, mais aussi de convaincre les marins son apport dans le cadre de leur métier : navigation, menaces, communications. CLARTE apporte ici son expertise en termes de réalité augmentée et d’état de l’art.
Ce type d’initiative est évidemment pluridisciplinaire : un ergonome ou d’anciens capitaines font partie de l’équipe.
En sortie du projet, en plus du cahier des charges, seront produits différents visuels montrant les avantages concrets de la réalité augmentée, qu’il s’agisse de naviguer dans une zone dangereuse ou de reconnaître les différents navires (qu’ils soient hostiles ou non) sur un secteur encombré.

Une fois finalisées, les technologies développées par CLARTE sont transférées à une société qui se chargera alors de la revente.

Ci-dessous, le stand CLARTE : visualisation de théâtre d’opération, système de réalité virtuelle avec bras haptique, système de test d’ergonomie, réalité augmentée avec reconnaissance d’objets 3D sans marqueur.

 

CLARTE

Poster du projet d’utilisation de la réalité augmentée en partenariat avec la DCNS. Cliquez sur l’image pour voir la version grand format.
On y voit quelques exemples de l’apport de la RA pour les marins : partage d’information, identification des autres navires avec leur cap, navigation en situation dangereuse (port embrumé).

Poster CLARTE DCNS

 

ReVolution, à mi-chemin entre expérimentation et art

En parallèle du gros du salon, un espace spécifique était dédié à des démonstrations diverses : projets artistiques, recherche, expérimentations en tous genres… Un concept qui n’est pas sans rappeler ce que propose le SIGGRAPH chaque année.
En apparence souvent futiles ou anodines, les idées dévoilées permettent toutefois de découvrir de nouvelles approches sur l’interactivité, et apporter une perspective nouvelle… Ou un moment de détente entre une conférence et un stand d’entreprise !
Le Japon était très représenté, avec 11 des 14 démonstrations.

Voici quelques exemples :

– Petanko Roller se présentait comme un rouleau à pâtisserie permettant d’écraser des objets 3D, voire des  » objets réels  » en les capturant au préalable par une simple caméra permettant de mesurer le relief (par exemple une Kinect).

La sensation de relief et d’écrasement est obtenue à l’aide de roues situées sous le rouleau, qui se soulèvent ou s’abaissent au fur et à mesure que le rouleau est déplacé. En captant la force avec laquelle l’utilisateur appuie et à l’aide de freins sur les roues, on peut aussi simuler un écrasement plus ou moins fort, et déformer en conséquence l’affichage de l’objet sur l’écran.

– Silent Humming, de son côté, est un dispositif qui se place au niveau de la pomme d’Adam. Le système capte sa position ainsi que la respiration de l’utilisateur, et traduit le tout sous forme de son. L’utilisateur peut ainsi fredonner un air sans émettre le moindre son. Un bon moyen de chanter le matin sans gêner les autres usagers d’un métro, par exemple.

 

 

– ClaytricSurface, de son côté, est une surface plane que l’on peut modeler à la main, et dont la flexibilité change à la demande. L’astuce : sous la  » peau  » souple sont stockées de très nombreuses petites billes. L’air est aspiré avec plus ou moins de force par une pompe, ce qui change alors la texture de l’ensemble. La surface se comportera donc tour à tour comme une pâte à modeler très souple ou comme un bloc quasi figé. Mieux encore, un projecteur et une caméra situés au-dessus de la surface donnent accès à une interface permettant  à l’utilisateur de contrôler cette dureté, mais aussi de peindre la surface…

What a Loving, and beautiful World : une projection interactive sur un mur. Des caractères calligraphiés  » tombaient  » du ciel, et lorsqu’un visiteurs les touchait avec son ombre, des animations en résultaient. Une idée simple, poétique et reposante…

Techtile Toolkit est un système haptique étonnant de simplicité : un micro, un amplificateur et un haut-parleur. Le micro capte un son, par exemple des billes agitées dans un gobelet en plastique ; le haut-parleur, collé sur un autre gobelet, donnera à la personne qui le tient la sensation que son gobelet contient aussi des billes en train d’être agitées ! Le principe peut sembler étrange et simpliste, mais la sensation est assez convaincante. Un autre exemple reposant sur une raquette de badminton, le haut-parleur étant collé au manche. Là encore, la sensation était assez réaliste.
L’objectif du système est de pouvoir réaliser des prototypes rapides de systèmes haptiques, de façon à intéresser et convaincre designers, enseignants ou élèves. De plus, la simplicité du système fait qu’un non-ingénieur peut facilement créer de nouvelles sensations et applications.

 

 

 

– La société française ePawn présentait ePawn Arena, un système de jeu de plateau innovant : un écran 26 pouces à l’horizontale s’interface avec un smartphone, une tablette ou un PC qui fait tourner un jeu ; des pions et objets bien réels peuvent alors être utilisés pour interagir avec l’application. Il devient donc possible de remplacer le carton d’un jeu de plateau par un visuel animé, d’utiliser des figurines pour jouer, voire même d’employer un pion « intelligent », comme une petite voiture motorisée et connectée sans fil au smartphone, qui lui donnera des indications de déplacement sur le plateau.

Une version sans écran est aussi proposée : moins chère, elle se contente de capter la position de pions, mais garde une liaison avec un écran de télévision, un PC ou une tablette. L’avantage, un prix bien plus faible.

Le but pour ePawn n’est pas de concevoir les jeux, mais de revendre la technologie et les tags reconnus par son système à des éditeurs de jeux, qui pourront ensuite les utiliser.

Le système avec écran devrait être proposé aux alentours de 400 €, contre 4 fois moins pour la version sans écran. Le tout devrait débarquer en magasins fin 2012 ou début 2013.

De notre côté, c’est bien évidemment la version avec écran qui semble la plus prometteuse du côté des usages. La technologie semble fiable et robuste, et pourrait tout à fait réserver de jolies surprises, lorsque les éditeurs auront saisi son potentiel.

 

Keynotes et conférences

Un évènement international ne serait pas complet sans son lot de conférences et d’invités prestigieux, et Laval l’a bien compris. Mieux encore, l’organisation de l’édition 2012 faisait que les conférences étaient situées juste à côté de l’espace des stands d’entreprises : une très bonne idée qui a permis à de nombreux visiteurs, passant un peu par hasard devant une des salles de conférence, d’assister à une présentation qu’ils auraient sans doute délaissée si la séparation stands/conférences avait été complète.
Les présentations étaient assez variées, oscillant entre travaux de recherches de chercheurs venus de France ou d’ailleurs (reste de l’Europe, Japon). Applications concrètes, travaux encore balbutiants voire débats philosophiques lors des keynotes, tous les appétits ont pu être rassasiés.
Voici un petit aperçu des contenus :

Warwick, l’homme cyborg

Kevin Warwick, professeur de cybernétique à l’Université de Reading en Angleterre, a sans doute donné la conférence la plus originale. Il travaille depuis des années sur le thème de la robotique, de l’intelligence artificielle et de la biomécanique, avec à son actif plus de 500 articles en tant qu’auteur ou co-auteur, 27 livres et de nombreux articles dans la presse généraliste.

Le sujet de sa keynote : les expérimentations sur les cyborgs, excusez du peu.
En fait, la fusion entre machine et biologique est au coeur des travaux de Warwick, qui nous a proposé un panorama complet de projets bien réels dans ce domaine.

Par exemple, des robots ont pu être reliés à des neurones de rats cultivés en laboratoire, via un ensemble de 128 électrodes (voir la vidéo ci-dessous). L’activité des neurones contrôlait le mouvement du robot, tandis que des capteurs de distance avec les bords de l’arène renvoyaient une signal électrique aux neurones. Il était ensuite possible de faire subir un entraînement aux neurones avec des stimuli, et au bout d’un certain nombre de séances, de les « programmer » pour qu’ils évitent les bords ou suivent certaines règles de mouvement.

Warwick en a profité pour digresser sur le plan éthique et philosophique : les cerveaux utilisés n’avaient que 100 000 neurones, mais de nouveaux systèmes pourraient utiliser plusieurs millions de neurones… Que se passera-t-il alors si des neurones humains sont employés ? La conscience émergera-t-elle de ce type de robot ? Sera-t-il éthique de « débrancher » la chimère en résultant ?

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