Le jeu en ligne Forge of Empires, développé par InnoGames, vient de passer en beta ouverte. Nous vous proposons aujourd’hui de revenir sur le développement de ce jeu de stratégie se jouant dans le navigateur en compagnie de Tobias Dunz, lead artist du jeu. |
Il nous expliquera la démarche du studio, les principales difficultés rencontrées, mais aussi la façon dont InnoGames a cherché à se démarquer d’autres jeux du même type. |
3DVF : Bonjour Tobias ; vous étiez le lead artist sur Forge of Empires, un nouveau jeu de stratégie en ligne développé par InnoGames. Pour commencer, pourriez-vous nous parler de votre parcours ? Tobias Dunz : En tant que lead, j’ai un bagage important en graphismes et design d’interface. Mais évidemment, je suis aussi un joueur. J’ai commencé à jouer aux jeux vidéo dans les années 80, quand j’étais enfant. À cette époque je me suis aussi intéressé à la façon dont les jeux étaient créés, et tout particulièrement la façon dont fonctionnaient les graphismes. C’est la raison pour laquelle j’ai essayé quelques programmes graphiques, par exemple sur Commodore 64 et Amiga. J’ai ensuite découvert Photoshop, sur lequel je me suis entraîné et ai travaillé chez moi. Plus tard, j’ai étudié l’art et le design pendant deux ans à l’Université de Munster. Je suis ensuite devenu apprenti en tant que media designer. Avant de rejoindre InnoGames, j’ai travaillé dans quelques autres entreprises en tant que graphiste puis lead artist. Chez Innogames, j’ai débuté en tant que graphiste mais je suis très rapidement passé lead artist sur Forge of Empires. |
3DVF : Quand avez-vous commencé à travailler sur le projet ? Quelles étaient vos contraintes sur cette production ? T.D. : J’ai débuté sur Forge of Empires fin février 2011, peu de temps après mon arrivée chez InnoGames. Nous avons du faire face aux contraintes classiques des jeux dans un navigateur. L’une des plus importantes choses à garder à l’esprit est le volume de données limité ; par conséquent, tous les graphismes devaient être aussi compacts que possible, sans sacrifier la qualité pour autant. Une autre contrainte a été de gérer les problèmes de compatibilité selon les navigateurs. En dehors de ça, il n’y a pas eu de contrainte spécifique au jeu. |
3DVF : Combien d’artistes 2D/3D ont travaillé sur les graphismes ? T.D. : Nous avions à la fois une équipe interne chez InnoGames et des infographistes externes. Au total, il y a eu neuf artistes : trois infographistes 2D, six infographistes 3D. 3DVF : Votre pipeline logiciel a impliqué 3ds Max, Maya et Cinema4D. Pourquoi ne pas vous être focalisés sur un seul de ces logiciels ? J’imagine que vous avez utilisé chaque outil pour une portion spécifique du workflow : pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ? T.D. : Si nous avons utilisé différents programmes dans le développement de Forge of Empires, c’est pour une raison simple : au début du développement nous nous sommes réunis avec les graphistes et avons écouté leurs souhaits en ce qui concerne leurs logiciels préférés. |
C’est pourquoi nous avons finalement utilisé 3ds Max et Maya pour la modélisation, le rendu final étant uniquement réalisé sous Max. Nous avons également essayé Cinema4D au début de la production, mais nous l’avons abandonné par la suite. Au final, on peut dire que l’utilisation de différents logiciels n’est pas vraiment liée à notre workflow mais plutôt aux préférences de nos infographistes. Chaque artiste a pu utiliser le programme sur lequel il se sent le plus à l’aise, ce qui les a rendus plus efficaces : de quoi obtenir la meilleure qualité possible le plus rapidement possible. La compatibilité entre Maya et Max a évidemment été un avantage pour nous. |
3DVF : Y a-t-il eu d’autres logiciels ou plug-ins impliqués sur ce projet ? T.D. : Nous avons principalement utilisé Max pour créer les bâtiments, leurs animations et les différentes unités de combat. Maya a surtout été utilisé pour la modélisation des bâtiments et les séquences animées. Nous avons aussi utilisé d’autres logiciels pour des tâches spécifiques. Par exemple, Nuke pour le compositing des bâtiments et animations. After Effects a été employé pour la postproduction des unités de combat. En ce qui concerne les cartes du jeu et les paysages, nous nous sommes tournés vers GeoControl. |
3DVF : Conservez-vous le même workflow d’un jeu à l’autre ? T.D. : Jusqu’ici nous n’avions pas eu de workflow spécifique utilisé dans le développement de chaque jeu. J’ai donc développé un nouveau workflow concernant le design graphique d’un jeu, par exemple sur le processus de validation des versions finales des assets graphiques. Ce nouveau workflow va maintenant être repris, adapté et amélioré sur le nouveau projet sur lequel je planche. |
3DVF : Vous avez insisté dans les communiqué de presse sur le fait que Forge of Empires est plus précis/réaliste que d’autres jeux ayant la même thématique. T.D. : Dans Forge of Empires, nous avons essayé de créer des bâtiments qui sont proches de leurs équivalents réels. La crédibilité du design graphique était un de nos objectifs principaux. Par conséquent, nous avons essayé de faire des bâtiments qui pouvaient aussi avoir existé dans la vraie vie. Les proportions entre bâtiments et humains sont cohérentes et non faussées comme dans d’autres jeux. Je pense que l’on peut dire que l’on a utilisé un style réaliste, par opposition à une approche cartoon, par exemple. Par ailleurs, nous avons aussi implémenté de nombreux détails et des dizaines animations que le joueur pourra découvrir. Pour être honnête, les graphismes sont au final encore plus détaillés et complexes que ce que nous avions planifié au départ… Et j’en suis très fier. |
3DVF : Il peut être difficile de proposer au joueur un univers cohérent dans lequel il va facilement se plonger (ce qui peut inciter à utiliser des graphismes proches d’autres jeux). D’un autre côté, le jeu doit être unique, donner l’impression au joueur qu’il n’a jamais vu un jeu semblable… Quelle a été votre approche sur ces problèmes ? T.D. : Dans Forge of Empires nous avons essayé de créer un monde qui soit vivant et saisissant, avec des animations/assets graphiques variés et nombreux. Par exemple chaque bâtiment dans chaque âge est unique, a un design et des animations qui lui sont propres. Ce niveau de détail fait clairement la différence par rapport aux autres jeux. Il y a donc beaucoup à découvrir pour le joueur, comme des animations spéciales qu’il remarquera ou non la première fois qu’elles seront jouées dans le jeu. Un de nos objectifs était de faire en sorte que le joueur soit à la fois enthousiaste et ravi, en découverte permanente de nouveaux détails du jeu. |
3DVF : Quelles ont été vos références et sources d’inspiration ? T.D. : Nous avons évidemment utilisé de nombreuses sources. Au départ, nous avons lu de nombreux livres sur l’architecture en général, et celle du moyen-âge en particulier ; nous avons pu nous renseigner sur le style visuel des bâtiments et châteaux. Nous avons également visité des sites sur le moyen-âge, l’art en général, et enfin visionné de nombreux films sur le sujet. 3DVF : Les jeux dans le navigateur ont souvent des prérequis matériels plus bas que les autres jeux ; est-ce que cela a eu un impact sur votre travail ? Par exemple, avez-vous été obligés de ne pas utiliser trop d’animation, pour que les chargements ne soient pas trop longs ? Comment avez-vous collaboré avec l’équipe de test ? |
3DVF : Quel a été le plus gros défi sur ce projet ? Comment l’avez-vous géré ? T.D. : Un des plus gros défis pour moi a été de créer des bâtiments complexes et de très haute qualité. Cela signifie qu’il faut garder un haut niveau de qualité tout en détaillant les bâtiments et en gérant les autres graphismes. Il a aussi été difficile de coordonner le travail de nos artistes internes et externes, de s’assurer qu’ils travaillent avec le même objectif en tête. Mon approche globale sur ces problèmes a toujours été de rester concentré, de garder les objectifs en tête. En faisant cela, j’ai la plupart du temps réussi à surmonter les différents problèmes. 3DVF : Quelles leçons tirez-vous de cette expérience ? T.D. : Au niveau personnel, j’ai beaucoup appris sur le management et la gestion d’une équipe, ainsi que sur la gestion d’un projet. Comme j’ai défini le nouveau workflow pour le design graphique de Forge of Empires, j’ai aussi énormément acquis sur l’aspect organisationnel du développement d’un jeu. Par exemple, estimer et calculer le temps nécessaire et les tâches à accomplir pour créer des assets graphiques me semble bien plus facile qu’avant. Enfin, je suis plus à même d’évaluer mes objectifs. |
3DVF : Pouvez-vous nous parler de vos prochains projets ? Sur quoi travaillez-vous ? T.D. : Malheureusement je ne peux pas trop rentrer dans les détails, puisque nous n’avons encore rien annoncé officiellement. La seule chose que je peux dire est que je suis à nouveau le lead artist du projet et qu’il va s’agit d’un gros défi pour nous ! |
Pour en savoir plus – Le site du studio InnoGames. |