3DVF : Une question qui s’adressera sans doute plus spécifiquement à Jessica Ambron et Amandine Aramini… Il y a quelques années encore, les équipes de courts étaient bien souvent à 100 % masculines. Depuis peu, on a le sentiment en voyant les auteurs des courts que de plus en plus de femmes s’orientent vers une carrière dans la 3D, et que le déséquilibre tend, tout doucement, à se combler… Avez-vous une explication sur le fait qu’alors que les études artistiques sont souvent très féminisées, en 3D les hommes sont encore majoritaires ? Amandine : J’ai toujours aimé l’animation et depuis mon enfance j’ai toujours souhaité m’orienter dans cette voie, arriver à intégrer des studios d’animation… J’ai donc fait un lycée arts appliqués, puis un BTS communication visuelle, une licence en arts appliqués, et suis entrée à l’Esma. J’avais jusque-là travaillé en 2D ; passer à la 3D avec l’Esma était une suite logique, étant donné qu’aujourd’hui, la plupart des productions d’animation sont réalisées en 3D. C’est vrai qu’il y a moins de filles que de garçons dans ce monde-la, mais je crois que cela fait quelques années qu’il y a de plus en plus de filles qui s’y intéressent et se lancent dans cette voie. |
Jessica : Les idées reçues évoluent, il y a sûrement des femmes qui s’intéressent à la 3D depuis longtemps, mais c’était peut être moins abordable soit parce qu’on présentait ce milieu comme difficile d’accès en général et que les écoles étaient plus rares, soit parce qu’il peut être plus difficile psychologiquement pour une femme de se décider à entrer dans un milieu où il n’y a presque que des hommes. Pour ma part j’ai été fascinée par ce milieu depuis que les dinosaures de « Jurassic Park » ont envahi ma télévision. Je devais avoir six ans, mais je trouvais ça incroyable voir magique. C’était quelque chose qui semblait difficile et probablement inabordable. Au lycée j’ai commencé à entendre parler d’écoles d’animation 3D, c’est là que j’ai décidé que je voulais entrer dans le milieu. Je pense que je n’aurais pas été découragé par une majorité de garçons, mais je trouve ça très bien que plus de filles décident de s’orienter là-dedans. |
3DVF : Avez le recul, quel regard portez-vous sur votre école, l’ESMA ? Quels sont les points forts de la formation ? Alexandre : Un super souvenir, l’école m’a bien changé et m’a permis d’y voir un peu plus clair sur le ce qui m’attendait à la sortie. La formation est difficile, mais nous permet de travailler aujourd’hui dans de très bons studios avec facilité. Le point fort, je pense que c’est d’une part la formation très généraliste, nous sommes tout à fait à jour lorsque nous intégrons une boite. Guillaume : J’ai adoré mes années à l’ESMA. Ce furent 3 ans de dur labeur, mais aussi de plaisir et de révélations sur qui j’étais… L’apprentissage technique, les rencontres avec des gens (camarades et enseignants) passionnés, la réalisation du film : tout ça a fait que je n’ai vraiment rien à redire concernant la formation, en ce qui me concerne. À mon sens les points forts de la formation sont la personnalité des enseignants, ainsi que le fait que l’apprentissage soit très « concentré » (3 ans – au début je ne savais rien du tout sur la 3D, et à la fin je sors en ayant réalisé un film… Wow.) |
C’est dur, car il faut s’accrocher, ne jamais désespérer, rester toujours curieux et se donner à fond aux exercices… Mettre parfois de côté ses envies personnelles, mais c’est aussi une part des réalités du métier. Yannick : Très bonne école sur tous les points, j’ai vraiment passé de bons moments durant ses 3 années d’études supérieures. J’ai senti un endroit où les gens voulaient m’apprendre tous leurs savoirs avant de me jeter dans l’océan du travail, et j’arrive aujourd’hui à nager sans eux, mais grâce à eux. Je remercie donc toute l’équipe pédagogique de leur suivi, leurs soutiens, leurs implications et leurs amitiés. Merci encore ! :] |
3DVF : Inversement, quelles sont pour vous les améliorations qui pourraient être apportées au cursus ? Guillaume : Peut-être davantage d’exercices d’animation, 2D ou 3D, pour ceux qui veulent se spécialiser dans ce domaine spécifique. En même temps, la formation est très généraliste en 3D, et c’est très bien ; je pense qu’on peut choisir une spécialité plus tard, à la sortie de l’école… Alexandre : De plus en plus d’étudiants à l’ESMA veulent s’orienter vers l’animation, et c’est là où je pense qu’il devrait y avoir quelques changements. Il existe un cours d’animation 2d, et je pense qu’il serait très efficace s’il était lié avec les exercices d’animations 3d. Pourquoi par exemple ne pas utiliser les personnages d’animation 2d en 3d pour le projet de fin 2e année. |
Mais aussi refaire les exercices d’animation 2d, en 3d. (En utilisant les methodes d’animation connues, posing, blocking, timing, polishing.) Jessica : La formation apporte beaucoup de choses, mais je pense qu’elle ne s’adresse pas à tous, une personne un peu plus introvertie à beaucoup plus de mal à s’y épanouir qu’une personne qui s’exprime déjà facilement au niveau artistique. Sur le plan technique, on y apprend énormément grâce à la quantité de travail qui est demandée aux étudiants, mais il vaut mieux y entrer avec un bagage si possible. Yannick : Je dirais plus d’illustrations, et de recherches de style graphique. |
3DVF : Depuis votre sortie de l’école, qu’êtes-vous devenus sur le plan professionnel ? Quel a été l’impact du court dans vos recherches ? Alexandre : Je suis parti à Londres peu de temps après la sortie d’école, j’ai commencé à travailler chez the Mill 4 mois, puis je suis allé chez MPC-Film pour me spécialiser totalement dans l’animation. Et depuis je switch entre les deux boites. Je suis actuellement à The Mill mais repars à MPC en août pour animer jusqu’en 2012. Guillaume : Le court ouvre de nombreuses portes, c’est sûr ! J’ai eu très peu de réponses négatives, ou lorsque j’en ai eu c’était davantage lié au marché à ce moment-là – non lié à mon niveau technique, ce qui est un plus ! |
Jessica : J’ai eu quelques prises de contact, et la plupart du temps les gens que j’ai rencontrés avaient déjà vu le court métrage. Comme les trois dernières années se sont révélées intensives, j’ai pris un peu de temps afin de reprendre la musique, et toutes les choses que j’ai dû mettre en pause pour mes études, mais je continue à faire de l’animation et à garder un contact avec le milieu professionnel. Yannick : J’ai trouvé du travail dès le jour de la projection du film devant les professionnels, et je suis aujourd’hui Character Shader Artist chez Nwave Digital, à Bruxelles, une fois. Mais je ne cache pas que j’avais d’autres propositions alléchantes, mais j’avais vraiment envie de travailler pour le grand écran, une fois, pas pour la petite lucarne ! Donc l’impact ? Turning point de ma vie ! J’ai du taff et en plus, je l’aime ! Je gagne ma vie, mes parents sont rassurés et j’en apprends des choses tous les jours. Ça va, c’est chouette. |
Quelques images des coulisses de la production…
3DVF : Deux d’entre vous travaillent donc aujourd’hui pour The Mill… Comment s’est déroulé le recrutement ? Auriez-vous des conseils pour d’autres candidats potentiels ? Guillaume : J’ai rencontré des personnes de The Mill à la sortie de notre jury de fin d’études. Ils avaient aimé notre court métrage, et en plus ils connaissaient Yannick et Aurélien (du film « Mortys », même promo que la nôtre), qui ont fait un stage chez eux entre la 2e et la 3e année ! Ils m’ont dit qu’ils avaient besoin de jeunes artistes comme nous à Londres, et qu’il ne fallait pas hésiter à les recontacter si j’avais envie de tenter l’aventure londonienne. J’ai donc demandé un entretien, un mois plus tard ; j’ai fait le déplacement et à l’issue de mon entretien je savais que j’allais y travailler ! |
Alexandre : J’ai eu un premier entretien avec The Mill le lendemain de la projection de fin d’études, au sein même de l’école. Ces entretiens nous ont permis de montrer nos démos et de prendre un premier contact. Donc un conseil selon mon expérience, ne pas attendre sans rien faire et bouger ! Effectuer un stage au sein de The Mill lors de son cursus reste un très bon moyen pour intégrer la boite à la sortie. The Mill a l’habitude de prendre des stagiaires chaque année chez l’Esma et Supinfocom. (Clin d’oeil à Tom Bonnard le squatteur de canap !) |
3DVF : Pour finir, y a-t-il un point que je n’ai pas abordé, mais dont vous auriez voulu parler ? Yannick : Les voix des doubleurs ? On a eu la chance d’avoir la participation de Alexis Tomassian, la voix de JD de Scrubs, et Fry de Futurama, mais aussi la voix d’Ariane Aggiage, Philipe Peythieu et sa femme Veronique Augereau (Homer et Marge), et Pascal DE MAGY pour Zeus. Tout s’est superbement passé avec eux, ce sont des gens très gentils, et très compréhensifs envers les étudiants et leur manque de moyens :p Merci à eux !! |
Pour en savoir plus – Le site officiel du court : on y trouvera des images supplémentaires, la liste (plutôt longue !) des festivals dans lesquls le court a été sélectionné, ou encore des liens vers les sites de l’ensemble de l’équipe. |