Compte-rendu Festival d’Annecy/Mifa 2011



The Bakery

Le mercredi matin, The Bakery présentait le logiciel Relight, sa solution de lighting/rendu/shading. Nous avions déjà eu l’occasion de vous présenter la société. Celle-ci se compose d’une quinzaine de personnes et se trouve dans le sud de la France. L’éditeur profitait de l’occasion pour annoncer la sortie d’une suite d’outils gratuits, comprenant un petit outil de compositing nodal, et deux viewers pour images et vidéo. En ce qui concerne Relight, la démonstration restait dans l’esprit de ce que nous vous avions évoqué lors du NAB 2011.  L’accent était mis sur le fait que relight se destine clairement la fabrication de série et de long-métrage et n’est clairement pas adapté à de la production d’images fixes. Bien que les performances soient au rendez-vous, le relighting permettant un processus interactif à base de cycles courts, l’éditeur doit encore faire ses preuves auprès des professionnels. Cependant, des plugins d’export pour max/Maya et XSI facilitent l’intégration dans un pipeline 3D, mais il s’agit en l’état d’un outil particulièrement aussi puissant que lourd à prendre en main, et n’est plus le moment susceptible que de séduire des structures de taille conséquentes. Sous le capot, un algorithme de type Reyes est utilisé, et un système de cache poussé (qui stocke point clouds, shadow maps, nodes, etc) permet d’obtenir des résultats très rapides.

 

 

Point intéressant en ce qui concerne l’interface, il est possible de faire du picking dans l’image rendue : on clique sur un objet pour sélectionner puis éditer son matériau. Mieux encore, en cliquant sur le reflet spéculaire d’une light, on peut obtenir une vue de la scène depuis la lumière en question, ce qui peut être utile pour affiner son éclairage et déterminer ce qui doit ou ne doit pas être éclairé.

Le système à base de point clouds utilisé par Bakery Relight permet notamment d’avoir un effet d’ambient occlusion sans effet de scintillement (flickering). Le tout est basé sur la publication de H. Christensen « Point-Based Approximate Color Bleeding », présentée en 2008 et disponible sur la librairie technique de Pixar.  Au final, l’utilité de Relight pour des productions à fortes contraintes de temps est indéniable, comme l’indiquait Cyber Group Studios dans un cas client : le studio a évoqué Zou, sa série à destination des jeunes enfants. Une forte productivité est nécessaire, puisque leur budget pour ce projet est limité. Nous aurons l’occasion de revenir sur cet outil dans les mois à venir.


La pluie ne cesse de tomber en ce jour d’ouverture du MIFA, mais le talent du studio Pixar nous  apporte un rayon de soleil en nous présentant dans un salon de l’Imperial Palace son nouveau court métrage, « La Luna».

En compagnie de son réalisateur Enrico Casarosa, nous avons pu assister à la projection d’un véritable cas d’école grâce à deux scènes de décors, trois personnages, une dizaine d’objets, une intrigue très classique et c’est tout ! Cette simplicité permet d’avoir un récit fluide, accessible et de focaliser l’attention du spectateur sur le fond plutôt que sur la forme, tout en préservant une esthétique minimaliste, mais comme toujours avec le studio, très efficace. Par la suite, Enrico nous a présenté un making of de son court métrage et s’est attardé sur  l’approche artistique du projet. L’intégralité des recherches de couleurs a été faite à l’aquarelle, la même technique a été utilisée pour la création des textures d’objets, donnant un style très doux et un aspect «peinture traditionnelle » à l’univers collant parfaitement aux éclairages habituels des films Pixar.

 

Concernant le design des personnages, ils ont d’abord été réalisés en sculpture d’argile, de sorte à pouvoir tout de suite pallier aux défauts susceptibles de poser  problème lors de la modélisation et l’animation des personnages… Ces mêmes sculptures ont été photographiées puis importées sur Photoshop où les artistes ont pu  faire des recherches de couleurs et de matières directement.

 

La file d’attente habituelle pour accéder à la conférence Pixar…

Autre point techniquement intéressant que nous avons retenu, la méthode pour animer les poils de la barbe du vieux monsieur. En effet, cette dernière a un rôle important puisque toutes les expressions passent par elle, ainsi que par la position des sourcils. Dans le court laps de temps imparti pour la production, Pixar n’a pu développer un outil pour faciliter leur travail, nous avons donc appris leur technique pour tricher là-dessus. L’intégration de primitives/plans 3d attachée à des « bones » à l’intérieur de barbe permet ainsi de contrôler la base d’attache des poils plutôt que les poils en eux-mêmes !


Ce court métrage ne sera surement pas considéré comme le meilleur de Pixar par le grand public, mais bon nombre de professionnels comprendront l’intérêt intrinsèque du résultat final ainsi que ses qualités indéniables, et tout particulièrement dans un cadre pédagogique.

SideFX et Houdini

Side Effects était également présent pour la première fois cette année et en a profité pour présenter son produit phare encore peu connu en Europe, Houdini. Quelques responsables du groupe né en 87 et localisé au Canada et aux USA ont en effet fait le déplacement pour réaliser plusieurs  démonstrations du logiciel, dont les capacités en animation et effets visuels sont toujours surprenantes.

Procédural et nodal, Houdini peut dérouter par son interface faisant la part belle aux outils de contrôle (valeurs physiques, nodes, etc..). Ce qui pourra rebuter les artistes purs, mais les artistes techniques trouveront là le moyen d’obtenir un contrôle absolu sur leurs effets.


Cloth, Rigid bodies, fluides, feu et fumée sont évidemment gérés sans problèmes. La démonstration proposée visait à donner un aperçu global de ses possibilités, mais servait également à prouver que des effets complexes peuvent s’obtenir en quelques minutes.

 

Par exemple, pour un effet de déchirure de vêtement, pas besoin de définir un chemin de rupture, le logiciel le calculera tout seul cela lors de la simulation. Il est cependant possible de peindre sur l’objet des zones de déchirures, pour un contrôle plus fin. Cette méthode de peinture est en fait utilisable avec tous les attributs, et l’on pourra par exemple affaiblir des zones spécifiques pour qu’elles se brisent en premier. Les paramètres physiques étant accessibles, il est par ailleurs très facile de simuler un type de matériau souhaité. En ayant en tête quelques ordres de grandeur, on peut facilement transformer un bloc quelconque en mur de béton ou de bois…


Une fois un effet basique mis en place, le contrôle sur l’effet est quasi absolu, via l’éditeur nodal détaillé qui permet d’ouvrir les effets de façon récursive : ceux qui veulent une boîte noire (pour un projet rapide ou pour apprendre les bases) pourront ne pas y toucher, tandis que ceux qui veulent contrôler l’intégralité des détails seront ravis. De même, de nombreux paramètres s restent disponibles à tout moment de la simulation, ce qui permet par exemple d’accéder aux valeurs de chaque morceau issu de l’explosion d’un immeuble en 3d, pour ne citer que cet exemple. A contrario, la programmation est… Totalement absente. Paramètres et noeuds sont tout ce dont vous aurez besoin.

 

On appréciera également  le fait que la base de données de bugs soit accessible publiquement, de même qu’une version « build » mise à jour quotidiennement. Un parti pris rare chez les éditeurs actuels. Autre point très positif, le « Performance monitor »: un outil détaillé à l’extrême qui vous permettra de savoir exactement, pour chaque frame, où va la charge de calcul. Une fonction extrêmement pratique visant à optimiser sa scène à la perfection. Enfin, un point qu’il semble également important de souligner : une version gratuite, Houdini Apprentice, est disponible depuis déjà quelque temps! Elle contient la même technologie que la version complète, et limite juste le rendu avec l’apparition d’un watermark. Aussi, une version payante à bas prix est disponible, permettant de n’avoir aucune limitation sur le rendu, mais interdit tout usage commercial. Suffisant, ceci dit, pour commencer à se former, se faire une idée de l’outil, et voir s’il convient à ses besoins de production. Pour ceux qui voudraient s’initier au logiciel, n’hésitez pas à consulter la section dédiée sur le site officiel, mais aussi et surtout leur forum : de nombreux utilisateurs y partagent leurs effets. Ouvrir une scène développée par quelqu’un d’autre, jouer avec les nodes (quitte à considérer certaines parties comme des boîtes noires, au début), est un bon moyen de progresser. Ne manquez pas aussi les vidéos de Peter Quint sur Vimeo : cet amateur a mis en ligne plus d’une centaine de didacticiels !

 

 

Looney Toons Show

Au tour du studio WarnerBros Animation de nous faire une présentation sur leurs projets à venir. Sam Register est arrivé il y a trois ans au sein du studio, il a aidé ce dernier à accroitre son rendement en matière de travail créatif. De 1950 à 1980, nous baignons dans l’univers des « Looneys Toons », début des années 1990 des « Tiny Toons » et bien à partir de 2011, soixante ans après leur création voici le retour des « Loony Toons Show ». Le design des célèbres personnages de Chuck Jones a pour le coup subi une refonte complète, mais ils ne perdent ni l’efficacité de leur créateur ni leur personnalité toujours aussi délirante. Sam Register est également le producteur délégué des trois nouveaux courts métrages en relief et images de synthèses réalisés pour le grand écran autour des héros de Bugs Bunny, Titi et Grosminet, Daffy Duck, Elmer Fudd, Vil Coyote et Bip Bip. Le premier dessin animé des Looney Tunes en 3D tournera autour du canard Daffy Duck, qui se fait pourchasser par Elmer Fudd. Intitulé « Daffy’s Rhapsody », le film d’animation sera en salles à partir du 18 novembre prochain.

 

Ce dernier ainsi que le deuxième court-métrage « I Tawt I Taw a Puddy Tat » avec Titi et Grosminet bénéficieront des voix du défunt Mel Blanc, célèbre pour son talent de doubleur.

 


Le Chat du Rabin

Pour finir cette troisième journée, nous nous sommes rendus dans l’un des cinémas voisins de Bonlieu ouvert aux festivaliers, le Décavision, afin d’assister à la projection d’un long métrage en compétition, « Le chat du Rabbin », qui remportera cette année le prix Crystal, récompensant chaque année le meilleur long-métrage d’animation présenté au festival. Sorti une semaine plus tôt dans les salles françaises, ce film de Joann Sfar a permis de mettre en avant la réussite et le passage de la bande dessinée au cinéma d’animation. Sans pour autant avoir lu la bande dessinée, le film conjugue assez finement l’aventure et le sarcasme, c’est drôle et touchant à la fois. En faisant se rencontrer des personnages à priori très différents, « le chat du rabbin » arrive au constat que finalement, les humains sont à peu près tous pareils, avec les mêmes faiblesses et les mêmes aspirations universelles. Sur ce très bon film, cette troisième journée se termine. Le festival bat alors son plein, enfin presque, car le public n’est définitivement pas au rendez-vous, et tout particulièrement sur le Mifa…



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