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Chez Eddy

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3DVF : Peux-tu nous indiquer un frein au développement du secteur ?

Le problème de l’investissement financier en hard et soft est un frein pour le secteur, car il empêche d’avoir des marges importantes ; en dehors de deux ou trois studios parisiens, la plupart des entreprises du marché ont une marge assez réduite et ne roulent pas sur l’or.

De ce point de vue, voir le prix des softs largement plus élevé en France qu’aux USA est rageant ; avec le matériel, ok, il y a du transport, mais pour du soft, on a au minimum 30% d’investissement en plus à faire que des boîtes américaines… Ce n’est pas normal.

Bref, si les éditeurs comme Autodesk ou Adobe pouvaient changer leur politique tarifaire, cela ferait beaucoup de bien à toutes les boîtes françaises du secteur.

 

3DVF : Lorsque Chez Eddy recrute un artiste, quels sont les critères les plus importants ?
Portfolio, Ecole, contact relationnel ?


Ce qui est le plus important est le portfolio et le contact relationnel. J’engage souvent les graphistes à faire un blog avec leur bande démo et leur travaux personnels et pro car lorsque l’on reçoit un CD il est très difficile pour nous de le classer.

 

J’engage aussi les graphistes à ne pas hésiter à nous renvoyer des mails de temps en temps pour nous dire ce qu’ils font, si leur reel est à jour, si ils sont disponibles. Car comme nous rencontrons beaucoup de gens, nous avons tendance à oublier ceux qui sont passés quelques mois avant.

3DVF : Quels sont selon toi les manques actuels dans les formations ? Quelles qualités ou compétences te semblent trop rares chez ceux qui sortent des écoles ?


Nous avons en France de très bonnes écoles de formation, en règle général on dit que la France est le meilleur centre de formation au monde, après pour garder les graphistes sur notre territoire c’est une autre paire de manche ! Mais en tout cas les étrangers nous apprécient pour ça !

 

Ce qui manque vraiment c’est une formation juridique et administrative autour du métier d’intermittent du spectacle et plus largement sur les différents statuts qui sont proposés aux graphistes (Maison des artistes, Auto-Entrepreneur, CDD, CDI etc…). Ils rentrent dans la vie active sans aucune  connaissance de ce statut, se retrouvent largués et parfois se font avoir.


Je pense sincèrement que les graphistes devraient se réunir et former un Syndicat, une Fédération ou une association, ça aiderait énormément dans la profession, cette entité aurait pour but de faire de la formation dans les écoles et préparer les graphistes au monde professionnel. Le métier n’est pas encore mature pour ce genre d’initiative, on y gagnerait. A méditer en tout cas !

 

Spot Tout Faire Matériaux, production WAM, agence Publicis Lille. Réalisateur Didier Borgel.

 

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3DVF : En dehors des problèmes matériels ou logiciels, que nous venons d’aborder, quels sont les difficultés quotidiennes du studio ?

Sur tous les petits projets, on n’a aucun souci, le pipeline est bien rodé, ça se complique quand on met plus de gens dans l’équipe, pour des gros projets : on embauche alors du monde pour améliorer le pipe, pour créer un pipeline spécifique à un projet donné.

Bref, le plus gros du travail, sur des projets particuliers, c’est de retravailler en dev et en pipeline. Pour le reste, on n’a jamais eu de grosse difficulté, ça nous arrive même de finir un travail en avance !

 



Trailer du jeu Settlers 7. Réalisation Quentin Marmier – Clément Delatre – Vivien Chauvet, production Chez Eddy, pour BlueByte / UbiSoft.
Sound Design & Music : Attention’O’Chien

 

 

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3DVF : Est-ce que tu peux nous parler des productions récentes de Chez Eddy, par exemple les cinématiques pour Settlers ?

On a eu trois  gros projets, récemment :


Settlers, pour Ubisoft. Ils nous on contacté en juin de l’an dernier, à Annecy. C’était un très gros projet, 8 minutes de full HD à sortir (toutes les cinématiques du jeu). Ca m’a alors semblé intéressant de faire une sorte d’association entre l’équipe de La Main des Maîtres et Quentin Marmier d’Oktapodi, pour faire une proposition à Blue Byte (le développeur, Ubisoft étant l’éditeur). Ubisoft avait en fait lancé un appel d’offfres international, Akama Studio était d’ailleurs en compétition avec nous, de même que (je crois) le studio Blur.


En août, on a gagné la compétition, et on a eu 4 mois pour réaliser le projet. Il a fallu travailler avec eux, car le storyboard n’était pas encore fini ; retravailler les designs, réaliser tous les décors… Un projet énorme.
Le seul point qui a pu poser problème à un moment donné, c’est la différence de méthode de travail : dans le monde du jeu, tout est en temps réel, on  a l’avantage de pouvoir changer un détail et d’avoir une mise à jour complète immédiatement : on peut changer un objet au dernier moment, par exemple.


Avec cet état d’esprit, au mois d’octobre ils ont décidé de revoir le design de l’héroïne, ce qui a été un gros challenge puisque toute l’animation était faite. On a donc été obligés de mettre en place un systèmes de shape correctrice sur le personnage pour retravailler le design sans attaquer l’animation. Ca a été un peu difficile, mais au final tout s’est très bien passé, je crois même qu’on a livré 2 jours en avance.


Et puis ça nous a permis de faire évoluer notre pipeline pour faciliter ce genre de modification de dernière minute.

 

–    Splice, qui nous a permis de faire un générique Full 3D de 3 minutes 20, avec quelque chose d’assez complexe, avec la caméra au ras de la peau ; on se promène dans une sorte de placenta, avec de la peau reptilienne, végétale, de mammifère, de poisson… Et les noms des acteurs sont incrustés dans ces différents types de peau. Il y a eu un gros travail sur les particules : plusieurs dizaines de millions !.

Comme c’est un plan séquence, la difficulté est augmentée. Il a fallu créer le système d’apparition/disparition de particules, travailler en gros plan complique aussi les choses… Travailler avec Vincenzo Natali était aussi un challenge, il sait précisément ce qu’il veut et ce qu’il ne veut pas !


En fait Vincenzo avait vu le travail de Kook Ewo sur le générique de Silent Hill et voulait vraiment travailler avec lui ; et Kook, avec qui nous avions déjà bossé, a proposé à Vincenzo de travailler avec nous.


Au final on a donc eu une direction un peu bicéphale, Kook étant le garant de la vision artistique, et Vincenzo s’étant aussi impliqué personnellement. Les deux ont de grandes exigences, c’était donc compliqué mais passionnant. Sur ce genre de projet, on voit la différence avec la pub : on prend beaucoup plus le temps d’aller dans les détails.

Ca explique aussi que l’on veuille se tourner davantage vers le cinéma : c’est une autre façon de faire, qui nous apportera énormément pour nos autres domaines de travail (comme la pub, justement). Le VFX peut vraiment être un moteur pour un studio.

 


–    Un projet réalisé pour Tout Faire Matériau, par Didier Borgel ; c’était un projet sans budget faramineux, avec une marque qui n’est peut-être pas aussi prestigieuse que d’autres, mais sur lequel on a pu s’amuser ; on devait faire se dégonfler un vendeur !


En 6 semaines, il a fallu modéliser entièrement l’acteur à dégonfler, faire le mapping de caméra, réaliser les textures… Ce n’était pas simple en termes de Fx, mais on est contents du résultat final.

 

 

Clip I Do, réalisé par Jonhatan Broda. Production Elegangz, post-Production Chez Eddy,  label : Universal Music / Casablanca

 

 

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3DVF : Le clip I Do, réalisé par Jonhatan Broda, a été réalisé au reflex numérique (EOS 5D MkII) : tu peux nous en dire plus sur ce projet et ce choix technique ?

En fait on ne s’est pas occupés de ce tournage ; Jonhatan n’avait pas encore signé chez nous, et c’est une autre boîte de production qui a fait le tournage. Mais je peux répondre à leur place : le choix du 5D s’est probablement imposé pour des raisons financières. Il n’y a pas d’argent dans les clips, donc le réflex est une bonne alternative. On obtient une belle image (même si elle est déjà compressée), et on peut obtenir des résultats intéressants pour un budget peu élevé. Le grain obtenu est aussi assez beau. Evidemment, travailler en RED ou en 35mm ça reste le must !

Maintenant que des accessoires complets sont disponibles pour les réflex (on trouve même des steadycams dédiées), il y a de quoi faire, d’autant plus que l’on peut mettre des optiques utilisées pour le cinéma sur ce reflex. Il y a un vrai virage avec l’utilisation de tout ce matériel.

Pour en revenir au clip, le budget était vraiment bas, mais comme on était dans l’idée de signer avec Jonhatan, on s’est investi sur le projet. On a perdu de l’argent, mais au final on a un projet qui permet de mettre en avant le réalisateur !


Le clip est un secteur qui ne fait plus gagner d’argent, mais qui reste un bon terreau artistique et qui peut faire monter des réalisateurs.

 

 

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3DVF : Est-ce qu’il y a une « Chez Eddy touch » ? Qu’est-ce qui vous différencie des autres studios ?

C’est évidemment compliqué de parler de soi-même, mais je pense que ce qui plaît c’est la bonne ambiance qui règne chez nous. On est aussi assez exigeants au niveau de la qualité. Bon évidemment, ça fait banal de dire ça et je pense que tout le monde va répéter ce genre de chose, mais je crois vraiment qu’il y a peu de projets qui sortent de chez nous sur lesquels nous ne sommes pas contents du résultat.

Je pense aussi qu’on a un bon niveau d’animation, ce qui est logique vu notre histoire ; on est donc très exigeants sur ce domaine.
On a aussi un bon niveau de rendu, grâce à un « killer », Jean-Charles Kerninon, qui est un très bon superviseur et a fait énormément pour l’image de Chez Eddy.


Mais encore une fois, j’insiste sur l’ambiance : le fait d’avoir une bonne atmosphère fait que les gens aiment bosser chez nous, on n’est pas des tyrans (du moment que les gens bossent efficacement, évidemment !). Ca nous permet d’avoir une certaine fidélité au niveau des gens qui travaillent pour nous.

 

Bande-annonce du jeu Driver San Francisco, réalisé par Dominique Carrara. Production : Ubisoft / Chez Eddy

 

 

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3DVF : Peux-tu nous parler de vos projets en cours ?


On a une bande-annonce de jeu vidéo pour ubisoft qui sort très bientôt, mais je ne peux pas en dire plus pour le moment (interview réalisée avant la sortie de la bande annonce de Driver, NDLR) ; c’est un bonheur de travailler sur ce projet, on monte le niveau au niveau du rendu. J’espère que le résultat sera à la hauteur, car on se défonce sur ce projet !


Nous avons aussi un film prévu pour Citizen, mais je ne peux pas encore trop en parler, il sortira très bientôt.

Il y a un projet de un film en 2D pour le CIO, on va le réaliser en animation After ou Flash ; c’est un tout petit projet, mais le résultat devrait être très beau.


Dernier projet, pour Quick, un projet avec des verres qui est sorti mi juillet.

 

 

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Pour en savoir plus

 

– Le site officiel du studio
– La page Viméo de Chez Eddy, avec de nombreuses vidéos

 

 

 

 

 

Benoît Rogez pour 3dvf.com – 2010

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