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Retour sur un projet de scan 3D à Versailles

Versailles

Les approches de type photogrammétrie ou laser sont désormais très communes en 3D, qu’il s’agisse de conservation du patrimoine, de création d’assets pour le jeu vidéo ou encore de projets d’effets visuels.
Récemment, le Château de Versailles a dévoilé les modèles 3D d’une partie de son vaste domaine, justement créés via ces techniques.
Nous vous proposons de revenir sur les coulisses de cette numérisation en compagnie de l’infographiste Stéphane Agullo, qui était au coeur du projet. Il évoque pour nous les conditions de prise de vue, les contraintes de capture, mais aussi le travail de post-production. Outre ce projet, nous profitons de cet article pour vous présenter une partie de son portfolio.

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3DVF : Bonjour Stéphane, et merci d’avoir accepté cette interview. Pour commencer, peux-tu nous présenter ton parcours ?

Stéphane Agullo : Hello ! Déjà merci pour votre site, la référence française sur la 3D ! Puis dédicace à mon papa qui a développé EVE sur MO5, la suite spirituelle de « L’aigle d’Or », sur son temps libre de l’époque, il cherche toujours un éditeur ! Dessiner la princesse à 5 ans au crayon optique, ça peut aider ! Pas lui, mais moi ! Puis un parcours scientifique, puis artistique, puis de la production 3D, notamment sur Paris, dans divers studios.

3DVF : Tu te spécialises en immobilier et architecture. Pourquoi avoir opté pour ce domaine ?

In fine, sûrement le retour sur Toulouse, pour pouvoir continuer à travailler dans la 3D, mais aussi une grosse passion pour les environnements & la simulation ! Après, faut pas croire, la prévisualisation architecturale est un monde nécessitant pas mal de compétences, surtout pour les animations et le temps-réel ! Puis récemment, je suis parti dans le Lot (46), et j’ai rencontré ma team : Euré-k ! Du coup, on se sent moins seul, avec plein de savoir-faire & un baby-foot ! Et Internet !

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3DVF : Revenons sur un de tes travaux récents : un projet ambitieux mêlant photogrammétrie et visites virtuelles, pour le Château de Versailles. Comment t’es-tu retrouvé impliqué sur le projet, et quels étaient les rôles des autres entités présentes à tes côtés ?

Le Lot (46) est un territoire magnifique ! Le patrimoine étant juste exceptionnel, il était impératif de trouver un moyen de le valoriser ! Nous avons développé avec L’atelier DUHO, notre partenaire drone, des prototypes, notamment le Château de Bonaguil [voir modèle plus haut, NDLR], sur diverses plateformes, dont Sketchfab. Les feedbacks ont étés immédiats & très positifs ! Nous travaillons maintenant avec plusieurs agences, dont DRONE VOLT, avec qui nous avons répondu à cet appel d’offre. Le Château de Versailles a été séduit par la solution VR de Sketchfab !

3DVF : Quels lieux ont été retenus pour la numérisation ?

Pour ceux qui ne connaissent pas, le Hameau de la Reine est situé au cœur des jardins du Château de Versailles, il a été commandé par la Reine Marie-Antoinette, pour pouvoir se retirer au calme, dans ce qui ressemble à un petit village féerique. Ce Hameau venant d’être restauré, via le mécénat de Dior, un travail titanesque & raffiné, le Château avait grand besoin de communiquer sur ce lieu, mais aussi pouvoir le rendre accessible au plus grand nombre.

Ci-dessus : une vue d’ensemble du site du Hameau.

3DVF : On imagine que le travail avec une telle institution impose des contraintes et un cahier des charges assez stricts… Quelques mots à ce sujet ?

Déjà, c’est le Château de Versailles, on va pas leur apprendre la 3D… Perso, je suis fan du premier jeu vidéo datant de 1996 : Versailles 1685 : Complot à la Cour du Roi Soleil, tout en full 3D 360°, apparemment très compliqué à sortir, car les conservateurs ont été très exigeants… Après, Google a organisé la plus grande captation 3D du monde au Château en 2013, avec 100 000 scans collectés, un peu trop de data, apparemment, et un débauchage du boss de la comm chez Google…

Ça c’est pour se mettre un peu la pression, après c’est un musée, il est préférable de savoir et pouvoir travailler avec de telles institutions. DRONE VOLT nous a apporté la logistique à ce niveau là, en terme d’assurance, précaution, sécurité, assistance… Une partie de la captation a été réalisée pendant le chantier de la restauration, c’est une réelle organisation que de pouvoir travailler en laissant les autres travailler, en toute sécurité !

3DVF : Évoquons tout d’abord la captation extérieure, effectuée en hiver. S’agissait-il d’une contrainte logistique (éviter les masses de visiteurs de l’été), technique (par exemple pour éviter que certains arbres ne bloquent les prises de vue) ?

Notre deadline était fixée à début mai, nous avons commencé la production en mars, donc 2 mois pour tout réaliser, mais première problématique, la végétation, surtout avec l’hiver rigoureux qui venait de passer… J’aurai bien évidemment préféré un shooting au cœur de l’été, mais cela ne correspondait pas aux attentes de notre client, nous avons donc shooté, 2 jours après la neige… Le Hameau est fermé tout les matins, pas de problème pour le drone, et avantage : temps gris sans ombre et pas d’arbres gênants !

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3DVF : Comment ont été planifiées et mises en oeuvre ces prises de vue extérieures ?

Nous avons shooté une semaine complète ! Dur métier pour moi, qui ne suis pas de la captation, mais super intéressant et important pour la suite des opérations ! Mon ami, Cédric Zacchia de L’atelier DUHO est un très bon pilote, j’essaye de l’assister au poste de cadrage sur les gros projets ! Son DJI Inspire 2 sort tout droit de Half-Life, et les optiques sont fabuleuses, mais prévoyez chargeurs rapides & batteries ! Donc on a pris le temps, nous avons shooté l’ensemble, puis les 6 bâtiments distincts.

Pour la planification concrète : nous avons fait un rapide repérage, mais les plans de vols ont étés réalisés sur plans, aussi bien pour les extérieurs que les intérieurs. Nous ne programmons que les vol de quadrillages, qui vont permettre de couvrir une grande distance, pour l’environnement. Tout le reste est fait à la main, avec une personne au cadrage, pour gérer la caméra.

3DVF : Quel était l’ordre de grandeur du volume de photos obtenues ? Peux-tu nous parler du traitement des données sous Reality Capture ?

Nous sommes repartis avec près de 6000 photos pour les extérieurs ! Environ 4000 photos aériennes, et 2000 photos à pieds, pour les sous-faces. Chaque photo est prise en RAW 5K, ce qui nécessite un dérushage, un développement sur Photoshop, puis une réorganisation des séquences, pour optimiser l’overlay [recouvrement entre les photos, NDLR] ! Il faut compter 20h de reconstruction 3D par bâtiment sur Reality Capture en Haute Définition.

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3DVF : On imagine qu’il y a aussi eu un gros travail de post-traitement, notamment pour nettoyer les scans et rajouter la végétation absente.
Comment avez-vous abordé cette étape ?

Nous n’aurions pas la végétation, pire encore, une partie du Hameau était encore en chantier, il a fallu s’adapter ! La végétation a été créée sur base de gravures d’époque et du projet d’implantation, avec l’aide des jardiniers ! Même les Oies ont un petit prénom, alors imaginez les arbres ! Mais il ne fallait pas trop alourdir les modèles, ce fut la plus grosse contrainte des extérieurs. Puis nettoyage, mise en scène et optimisation des modélisations sur LightWave 3D.

3DVF : Revenons maintenant sur les captations en intérieur. Les contraintes techniques étaient très nombreuses… Quelques mots sur ces obstacles ?

Les intérieurs ont étés réalisés une fois le chantier de rénovation fini, avec un mois de deadline. Il a fallu s’adapter à l’éclairage, aux visites & autres interventions, difficile de bloquer l’accès à une pièce pendant plusieurs heures. De plus, il faut s’équiper de sur-chaussures et gants, de tampons sur le matériel, et ne rien toucher, le tout accompagné d’un agent en permanence.

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