Blade Runner 2049 : retour sur les effets visuels de Framestore, avec Lucas Janin

Blade Runner 2049
3DVF : Tu as également mis en scène les « émotions » du personnage de Joi (interprété par Ana de Armas) suite à un crash de véhicule et durant un orage. Peux-tu nous en dire plus sur l’effet et la façon dont tu as participé à sa création ?

Lucas Janin : Pour moi, l’hologramme de Joi était composé de voxels très petits qui ensemble créeaient son image dans l’espace. Mon idée était que durant les moments d’émotion, Joi perdait de la résolution sur certaines parties de son corps : voxels plus gros, plus transparents et avec une couleur moyenne des voxels le contenant. Un genre de blur dans l’espace :-). J’ai réalisé un concept rapide et la réaction du superviseur VFX a été positive.

En tout premier, le département de tracking a réalisé une rotoscopie 3d de Joi. J’ai converti le modèle en voxels avec 6 niveaux de détail (génération 0 la plus grosse à 5 la plus petite). Les zones altérées étaient générées procéduralement avec un VDB. Cette information était traité dans une OTL qui déterminait quels voxels du niveau 0 étaient actifs.

 

Le résultat était renvoyé à la même OTL pour tester le niveau 1. Cette procédure était répétée ainsi de suite pour chaque niveau.

Pour les lecteurs qui ne connaissent pas, une OTL est un “asset” Houdini. Il est représenté par un node permettant d’effectuer des tâches répétitives. Il comprend un ensemble de nodes avec des paramètres exposés sur le node de l’asset permettant de contrôler son comportement. Le créateur de cette OTL peut ainsi facilement de maintenir son développement. Pour finir, elle pourra très rapidement être utilisé dans de nombreux plans comme un node classique d’Houdini, par l’ensemble de l’équipe.

Le temps de traitement de ce processus était rapide, jusqu’à un total de 4 générations. Mais cela commençait à devenir plus lent après. J’ai réalisé tous mes ajustements avec 4 générations et lançais les rendus sur la render farm avec les 6 générations.

Le résultat était mélangé avec l’image originale via des effets magiques de compositing :-).

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3DVF : De même, peux-tu nous parler du rig destiné à la gestion du sable ?

L.J. : Dans Las Vegas, j’ai aidé le département environnement à créer du sable sur l’ensemble de la ville. En effet, cet espace était très grand et évoluait trop pour que le département de modeling puisse effectuer cette tâche.

J’ai utilisé les mêmes procédures que la pluie pour le découpage en régions visibles depuis la caméra. Vu que nous étions dans une environnement de ville, j’ai rajouté une fonction pour éliminer des zones occultées par les bâtiments depuis la caméra.

 

Pour chacune des régions, de manière procédurale, j’ai isolé les zones convexes (encore le point cloud). En fonction de leur orientation par rapport au vent, je générais des tas de sable plus ou moins étendus et hauts. Une deuxième tâche permettait de créer des grains de sable pour aider la transition sur les zones proches de la caméra.

Comme la pluie, l’ensemble de cette procédure était générée en parallèle sur la render farm. Vu la taille de l’environnement, c’est ici plus de 800 régions qui étaient calculées. Pour finir, un processus de couture des tas de sable était réalisé pour joindre toutes les zones entre elles.

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3DVF : Le film comporte plusieurs plans d’explosions : quelle a été ta participation à ces effets ?

L.J. : J’ai confié une très grande partie de cette tâche à mon équipe. Mon travail a été davantage de supervision, une passe d’optimisation et d’ajout d’éléments secondaires sur le rig. Celles-ci ont été réalisées par 7 artistes entre la création du système et son application. Petit détail sanguinolent : avez-vous remarqué le sang et les parties de corps qui volent ? 🙂

 

3DVF : Au final, de quoi es-tu le plus fier sur ce projet, et quel point a été le plus difficile à gérer ?

L.J. : En tout premier, je suis fier de l’ensemble du travail de mon équipe. Durant la production, j’ai vraiment apprécié de contribuer à la progression de chaque artiste au niveau technique et visuel. J’ai également appris beaucoup d’eux.

Pour citer quelques exemples du travail de l’équipe, je pourrais parler de l’écrasement de la navette sur plusieurs plans dans Trash Mesa, des déchets de la navette poubelle et la simulation de la pluie sur pare brise de la navette de Roy dans Trash Mesa, l’explosion sur plusieurs plans dans le bâtiment à Las Vegas, les interactions de vapeurs et poussières des différentes navettes avec le sol et beaucoup d’autres effets moins visibles mais tout aussi importants pour l’histoire.

D’un côté plus personnel, je suis vraiment content de savoir qu’une grande partie du public ne se rend pas compte que les abeilles sont réalisées entièrement en 3d.

Les effets les plus difficiles à gérer ont été la pluie et le sable en raison de la taille des environnements. Même si nous ne les voyons pas tant que cela dans le résultat final.

 

Feu
3DVF : Depuis la fin du projet, tu as changé de poste et tu es passé chez Rodeo FX. Quel est ton rôle sur place ? Sur quels projets es-tu en train de travailler ?

L.J. : Depuis un mois, j’ai pris la supervision de l’ensemble du département d’effets de Rodeo FX. C’est un nouveau défi pour moi. Cela comprend davantage de tâches de management et je me concentre aussi sur le pipeline du département des effets. Ma première tâche est de fluidifier ce qui rentre dans le département, le traitement avec une gestion de dépendance et la publication des assets d’effets pour le département d’éclairage.

Au niveau développement d’effets, je travaille présentement sur la recherche visuelle d’un effet “non naturel” pour un film que je ne peux pas nommer qui sortira début 2019… Cela commence à être ma spécialité :-).

 

Pour en savoir plus

– Le site de Lucas Janin ;
– Sa page Linkedin ;
– Son compte Twitter ;
– La page du studio Framestore sur Blade Runner 2049 ;
– Le site de Rodeo FX.

 

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