Rencontre avec Nicolas Brunet

Nicolas Brunet
 
– Quelles ont été les principales difficultés techniques et artistiques ?

Je dirais bien les crashes de 3ds Max mais il s’agit d’un pléonasme trop connu.
La gestion du Hair&fur a fait grincé des dents au tout début, c’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai migré vers Hair Farm, certes certains soucis étaient encore présents mais dans l’ensemble, la production avançait en boitant en 2012 puis sur le dernier épisode j’ai enfin laissé les béquilles de côté grâce à un workflow qui me faisait pratiquement courir.

 

 

Hair
Hair
Artistiquement parlant, pour les épisodes de 2012 et 2013, la contrainte de temps m’a beaucoup fait compter sur le scan de vraies personnes et d’objets via Photoscan ou ReconstructMe, ce qui m’a lancé dans un chemin sinueux aux résultats assez improbables…

 

Je me suis donc ravisé pour le dernier épisode en me penchant vers un style de personnage plus cartoon et une modélisation d’assets à la main. Cela ouvrait la voie a tellement de possibilités, c’était un énorme poids en moins à porter lors de la création du film, j’ai pu donc me faire plaisir au niveau design.
Nicolas Brunet
Julia
– Entre 2008 et 2013, tu as travaillé sur le fanfilm Versus: The Way to Shadow, situé dans l’univers de Star Wars. Tu as géré l’intégralité des VFX du projet. Quelques mots sur cette expérience, et ce qu’elle t’a appris ?

« Plus jamais ». Ce film a été comme un long projet de fin d’étude grâce auquel j’ai pu apprendre plusieurs procédés qui m’étaient alors totalement inconnus: le matchmoving, rendu Mental Ray et surtout la motion capture basée sur de la vidéo, un procédé plutôt récent dans les années 2000.

 

Concernant la mocap, l’apprentissage a été long et fastidieux. Avec Nicolas Santini, le réalisateur du film, nous avions tourné beaucoup de prises avant de trouver le placement adéquat des capteurs sur l’acteur ainsi que le positionnement optimal des caméras afin d’obtenir les meilleurs résultats au moment du tracking.
L’auto-apprentissage dont j’ai bénéficié sur le film a posé les bases de mes connaissances actuelles en 3D et VFX.

A noter : j’ai mis en ligne un article sur les coulisses du projet.

Versus: The Way to Shadow from Versus – The Way to Shadow on Vimeo.

Versus: The Way to Shadow – VFX Breakdown from 1k0 on Vimeo.

– Quelles ont été les plus grosses difficultés, et quels conseils aurais-tu pour les personnes souhaitant se lancer elles aussi dans la production d’un fanfilm ?

Se lancer dans un projet alors qu’on ne maitrise pas forcément tous les procédés qu’il faudra utiliser ou pire, n’avoir aucune idée de comment faire telle ou telle tâche… Heureusement Internet et ses innombrables didacticiels étaient là. Il fallait être méticuleux et patient, surtout lors de tâches comme la création de textures pour le modèle de clone troopers. Il doit y avoir environ 13 variations de chaque éléments d’armure x 7 (diffuse, glossy, bump, etc.)
Et tout ça manuellement, avant la sortie de logiciels comme Substance Designer ou Ddo, malheureusement.
Comme dit précédemment, la mocap a été un point assez complexe au tout début lors des tests et ce jusqu’à la création d’un Rig personnalisé qui faisait enfin tenir nos clones debout.

Je ne conseille à personne de se lancer dans la production d’un fanfilm à moins que ce soit une idée vraiment originale car au final, mis à part en bande démo, le film ne pourra pas vraiment être exploité, la licence ou les personnages ne nous appartenant pas. Par contre, se lancer dans du Fan Art est bien plus intéressant, la plupart des projets ont un temps de création assez court et ont principalement pour but de vous perfectionner dans un domaine, modélisation, texturing etc.

 

Kuro
– Plus récemment, tu as repris un des personnages créés pour le fanfilm, Commander Kuro, et tu en as tiré une illustration qui a fini en couverture de 3D World Mag. Comment as-tu retravaillé le modèle et les textures ?

3D World Magazine m’avait en effet commandé une couverture et une image « next month » pour lesquels j’ai réutilisé le commandant Kuro présent dans Versus. Le modèle était assez propre, les soucis de skinning ont été réglés avec une rapide édition des vertex une fois le modèle posé. Quant aux textures, même si le film était au format SD, j’étais parti sur une résolution de base de 2048px pour chaque élément, pas de problème de qualité donc. Par contre j’ai modifié certaines textures une fois le rendu iRay terminé, effacé certains étirement dus à un mauvais dépliage d’UVs et ajouté quelques détails avec des brosses personnalisée ou encore avec des textures grunges, cuir et autres en mode overlay. Comme il s’agissait d’un projet à la dead line assez large, plutôt que d’utiliser des images ou assets trouvés sur le web, j’ai pu entrer en contact avec la vitamine D en allant photographier des environnements et divers textures. C’est une étape importante car il y a certaines choses qu’on ne peut pas voir via un écran: comment réagissent certaines surfaces par rapport à la lumière, quelles sortes d’ambiances on peut tirer de ses escapades, etc.

Pour en savoir plus : le making-of du projet.
3D World

Unexpected Gifts from 1k0 on Vimeo.

– Quelques mots sur Unexpected Gifts, court sur lequel tu as mêlé plusieurs techniques ?

En 2014 j’ai décidé de prendre un peu de recul par rapport au travail titanesque effectué sur Versus, je me suis donc penché vers un genre qui m’attirait depuis quelques temps, le photo réalisme et par la même occasion, j’ai voulu expérimenter la motion capture faciale et le tracking d’objets 3D.

Unexpected Gifts, qui à la base, est un test concernant un futur court métrage, mélange prise de vue réelle et éléments 3D lors du premier plan, puis les 2ème et 3ème plans sont entièrement gérés en images de synthèses. La raison de cette création en full 3D pour la fin de la vidéo est que je n’arrivais pas à obtenir un matchmoving acceptable lors de mes prises de vues réelles, situation assez ironique en soi, donc l’irrationnel en moi s’est dit que tout recréer en 3D serait une bonne idée. C’était très fun.

Pour en savoir plus : le making-of du projet.

– Quels sont tes projets en cours ?

Des missions professionnelles pour acheter des pâtes, l’édition de quelques making of de projets terminés récemment, un ou deux artworks dont je dois avoir posté les avancées sur le forum 3DVF et la préparation d’un court métrage d’animation, cette fois en tant que projet personnel. Et dormir aussi.

– Quelles sont tes sources d’inspiration pour tes projets ?

Je vais essayer de résumer. Principalement la musique, les compositions de Yoko Kanno, Matthew Bellamy ou Murray Gold par exemple. Pour le côté visuel et narratif: les films de Miyazaki et Makoto Shinkai. Au niveau des couleurs et lumières, les travaux de directeurs de la photo tels que Roger Deakins (Barton Fink, Fargo, The Big Lebowski), Chi Ying & Chor Keung Chan (Detective Dee), mes voyages ou encore les travaux du studio Visual Works qui m’inspirent depuis que j’ai découvert la cinématique d’introduction de Final Fantasy VIII. Sinon mon cerveau a développé une aptitude particulière à me faire vivre de rêves lucides dans lesquels je puise un bon bout d’inspiration, allez savoir, surement un effet secondaire des ondes Wifi liées à la consommation d’Absinthe.

 

Unexpected Gifts – Making Of from 1k0 on Vimeo.

– Comment vois-tu la suite de ta carrière ?

J’aimerais beaucoup intégrer Visual Works (Square Enix) ou un studio de film d’animation Japonais afin d’observer et d’assimiler un maximum de techniques et workflows que je réutiliserais dans mes propres films d’animation. Ca et me pencher sur la réalité virtuelle.

– Es-tu en recherche de poste actuellement ?

Tout le temps.

Pour en savoir plus

– Le site de Nicolas Brunet, sur lequel on pourra retrouver les projets évoqués ici et de nombreux making-of.

 

 

Chargement....

A Lire également