– Tu es « Blender Foundation Certified Trainer » : peux-tu nous en dire plus sur ton activité de formateur ? Je souhaiterais qu’elle soit un peu plus intense, c’est très enrichissant. En tant que freelance, on manque parfois un peu de contact humain et la formation, la transmission de savoir, c’est terriblement gratifiant. Les gens sont toujours ravis d’apprendre quelque chose et ils se rendent vite compte qu’avec la bonne méthode et un peu d’entraînement, n’importe qui peu tout faire. Toutes mes expériences de formation one/one ont été géniales humainement et techniquement. Bien transmettre son savoir, c’est une façon de valider les acquis et d’en maîtriser les détails. |
Et quand un élève (quel que soit son âge) vient et te demande comment un artiste qu’il aime a fait une image et qu’il sort de sa formation en ayant réussi à la reproduire… Il a le sourire bloqué pendant quelques semaines après ! – Comment se passe le processus de certification ? C’est assez simple. Il faut ouvrir un compte sur Blendernetwork.org (50$ par an) et se soumettre au jury en remplissant un questionnaire et surtout en fournissant des exemples de tutos vidéos ET écrits. Il faut évidemment accuser d’un peu d’expérience et d’une volonté/capacité à enseigner. Même si le prestige reste assez limité, je pense qu’on doit être une cinquantaine dans le monde et ça reste un plus professionnellement. |
GOAT-ANIMATION-SKFAB-FINAL by pieriko on Sketchfab
| – Tu proposes des cours en ligne, comme une formation vidéo de 12 heures autour d’un Jack Russel : quelques mots sur ce projet ? As-tu d’autres formations de ce type en préparation ? J’ai travaillé plus d’un mois sur ce projet et il permet d’apprendre, en partant du cube par défaut quand on ouvre Blender, à créer un personnage quadrupède (chien ou autre) prêt pour la production animée (animation et rendu). J’y aborde des procédures assez avancées, notamment l’utilisation des drivers, des corrections de déformations, du rigging secondaire et tertiaire. Je n’ai eu que des retours positifs pour le moment et le produit marche assez bien. |
Je vais lancer un petit sondage pour la préparation du prochain court pour savoir ce que les gens souhaitent le plus, ce sera soit :
– La création d’un village cartoon base sur l’artwork the mon pote Sergio ,
– La création d’un personnage stylisé (comme the goat sorcerer) mais avec un rig ultra abouti ET un court sur l’animation. Je pense que ce sera en 2 lots.
– Concrètement, comment est le « marché de la formation Blender » à l’heure actuelle, en termes d’offre/demande ?
C’est pas violent, en France en tout cas, pour du training, je ne pourrais en vivre. Les formations coûtent cher et les gens sont habitués de plus en plus à se former en ligne. Je pense que Blender sera rentable dans 5 ou 6 ans qu’il sera plus considéré et utilisé comme un standard. Pour moi, le training en face à face reste la chose la plus enrichissante et efficace mais j’ai tout appris en ligne et pour le coup, le marché en ligne est nettement plus viable.
Concrètement, je ne pourrais en vivre à ce jour, mais c’est un bon complément et je viens seulement de sortir un produit. Je pense qu’avec mon nombre d’abonnés grandissant et la sortie de produits supplémentaires, ça pourrait être une source de revenus principale.
– Quelle est la répartition géographique de tes clients ? Y a-t-il beaucoup de demande en France ?
Je dirais moitié étranger (dans l’ordre : USA, UK, Allemagne, Espagne…) moitié France.
Moi mon plaisir, c’est de faire ou d’essayer de faire des cinématiques à la WOW (j’adore Blizzard depuis la fin des années 80, c’est bateau mais c’est comme ça ^_^) . Il y a peu de chances que Blizzard m’appelle demain, par contre tout ce que j’apprends avec ces projets m’assure de pouvoir mettre en image un fer à repasser ultra moderne, une cellule allergénique, un intestin de poulet (hé oui…). Et c’est génial, de pouvoir faire tout ça, même si n’a pas l’air super sexy sur le papier.Il ne faut pas se tromper sur une chose que certains « jeunes » freelancers pourrait avoir en tête. Je ne gagne pas ma vie en faisant de la 3D mais j’utilise la 3D pour gagner ma vie. Dans des projets de vidéos médicales, de design produit, de solutions de visualisation scientifique. Les places sont très rares pour les character designer, game designer etc…. Par contre il y a du travail, il faut juste savoir adapter ses capacités et être curieux.
– Quelle est ta vision de Blender et de son évolution ces dernières années ?
Je lis pas mal de magazines, il est passé d’un statut un peu «geek anarchique antimondialistocapitaliste opensource» à une grosse référence.
Je pense que les concurrents payant restent plus performants et offrent plus de spécialisations mais honnêtement le jour où j’atteins les limites de blender n’est pas arrivé. Et il évolue beaucoup plus vite que bien d’autres.
Bref, c’est gratuit, et c’est une tuerie. Je gagne ma vie avec.
| – Blender peine encore à s’imposer dans les studios : pourquoi, selon toi ? Traditionalisme, manque de communication inter-logiciel. Par exemple, même si je ne suis pas un spécialiste, Zbrush est la référence en termes de sculpture numérique, et GoZ n’existe pas par défaut pour Blender. Il faut utiliser un addon qui est moins optimisé que sur les autres softs. Les studios tendent à avoir des spécialités et Blender est généraliste. Je lance ça comme ça, je n’ai pas vérifié. Cycles (le moteur de rendu de blender) est extraordinaire mais V-Ray reste plus puissant et rapide. Pour l’animation Maya reste plus performant, pour les simulations, certain addons ou logiciels tiers spécialisés sont plus puissant. J’ai eu l’occasion de rencontrer le responsable VFX de Platige (Piotr Suchodolsk) et Allan McKay, ces gars-là travaillent sur des logiciels très spécifiques et spécialisés qui sont généralement compatibles avec les standards de l’industrie.Mais ces frontières se tassent et Blender acquiert au fil des années (et je ne parle pas de décennies, mais d’années, entre Sintel et le dernier court-métrage, le nombre d’utilisateur et sa popularité dans les médias spécialisés ne fait que grandir) une vrai assise et de plus en plus de petits studios l’adoptent sans réfléchir. Quand ces studios grossiront, Blender s’imposera lui aussi comme un standard. On en reparle dans 5 ans. |
– Quels changements attends-tu le plus dans les prochaines versions de Blender ?
Performance de l’animation. Blender permet rigging incroyable mais les performances en temps réel sont parfois limites, même avec une grosse work station, c’est très frustrant. Le tout GPU pour CYCLES, pour des perf de rendu incroyable. Meilleure interaction avec Zbrush.
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| – Quelques mots sur tes projets en cours ?
Je viens de finir the Goat et j’ai remis le pied sur THE THRONE. La première séquence du TITAN est terminée, J’aimerais pouvoir sortir un faux teaser au premier trimestre mais c’est dur. Ca fait plus d’un an que je suis sur ce projet. – Quelles sont tes sources d’inspiration au quotidien ? – Comment vois-tu ton évolution dans les années à venir ? Devenir le maître du monde… Malgré la crise, je m’en sors bien, je crois qu’elle est aussi très psychologique (de toute façon c’est la crise depuis que je suis né). Il faut avoir faim, oser et s’exposer un maximum. |
Pour en savoir plus – Le portfolio de Pierrick Picaut, sur lequel on retrouvera l’ensemble de ses projets et tutoriels. |
