Mathieu Cassagne, lighter chez Pixar

Mathieu Cassagne

A-t-il été difficile de travailler avec la nouvelle approche d’illumination globale ?

Non au contraire, j’avais déjà travaillé chez PDI avec un principe similaire ; depuis Là-Haut, Pixar dispose de technologies d’illumination globale, mais elles n’avaient jamais été très poussées avant. La mise à jour récente d’une partie de notre système d’éclairage nous a permis d’utiliser beaucoup de types d’area lights différents, ainsi que de nouveaux shaders/coshaders optimisés et basés sur la physique, comme ce qui peut se faire chez ILM.

Mais au final ca reste juste un outil de lighting classique, ça va apporter plus de nuances et de richesse avec moins de lights mais pour moi le contrôle restera le même. L’œil reste l’outil primordial.

Concrètement, en quoi tes méthodes de travail ont-elles changé ? Les temps de rendu étaient-ils plus élevés ?

On utilisait moins de lights avec ce nouveau système, mais les temps de rendu n’ont pas forcément explosé avec la nouvelle illumination globale, car tout était très optimisé.
Ce que j’ai beaucoup aimé c’est le fait d’avoir des réflexions et réflexions spéculaires physiquement correctes, sans « triche » comme souvent. De même, on travaillait avec des ombres en raytrace shadow.

Ne pas avoir à tricher ou bidouiller faisait gagner du temps et donc permettait de passer plus de temps sur l’artistique : on passait moins de temps à chercher à recréer ce que demandait le directeur artistique. C’est un vrai confort.

Monstres Academy
Crédit : Disney / Pixar

 

Monstres Academy
Crédit : Disney / Pixar

 

Pour les artistes qui contrairement à toi (avec ton passage chez PDI) n’avaient pas l’expérience de ce type d’approche, y a-t-il eu des difficultés d’adaptation ?

Ils se sont rapidement adaptés, Pixar fournit des cours et formations sur les avancées techniques qui sont très bien pensés. Les outils sont très faciles d’accès, cela reste des lumières à placer comme des spots, au lieu d’utiliser des shadow maps on utilise du raytrace, et les leads se chargeaient de l’irradiance/radiosité au départ.

La difficulté était peut-être surtout de s’adapter aux nouveaux types de lights : dome lights, de nouvelles librairies d’area lights. Mais en deux ou trois semaines, les artistes étaient rodés.

Peux-tu revenir plus en détail sur le système de formations/cours internes ? Qui donne ces cours, à qui et dans quel contexte ? Est-ce une approche théorique, pratique ? Quelles sont les différences avec ce que tu as pu vivre ailleurs, par exemple chez PDI ?

Tout au long de l’année Pixar propose des classes à ses employés, classes diverses qui vont de la sculpture en passant par le yoga, le shading…. On peut les suivre entre midi et deux ou le soir. C’est très vraiment très varié.
Apres Pixar offre également des classes ou démos spécifiques par département, certaines sont obligatoires d’autres non. Si il y’a une update importante au niveau du soft de lighting tout le monde devra aller à cette classe par contre si The Foundry vient faire une démo du dernier Nuke ca reste au choix de l’employé d’y aller ou non. Les classes « obligatoires » sont souvent données par des gens internes à Pixar. Entre chaque production Pixar offre aussi des classes inter départements où tout le monde peut aller découvrir la manière de travailler et les outils d’un autre département.

Par rapport à PDI la formation est beaucoup plus riche tout comme le nombre de classes proposées. En plus, toutes les classes importantes sont filmées à Pixar, stockées sur notre site interne et disponibles en streaming pour tous les employés.

 

Monstres Academy
Crédit : Disney / Pixar

 

Peux-tu revenir sur le nouvel outil de relighting ?

Sur le court, l’outil était en cours de mise en place et fonctionnait pour certaines choses, pas pour d’autres.


En fait, si tu optimises bien ta scène quand tu travailles interactivement le rendu est si rapide que le feedback temps réel devient presque accessoire.

 

Le Parapluie Bleu
Crédit : Disney / Pixar

 

Pour Le Parapluie Bleu : un environnement aussi pluvieux peut être très délicat à gérer… Avez-vous eu des difficultés à obtenir les résultats voulus ? Comment avez-vous abordé l’éclairage à ce niveau ?

Au début c’était difficile, on ne savait pas trop où on allait. Mais l’équipe de développement de shaders a vraiment très bien travaillé, nous avons étroitement collaboré avec eux.
Par exemple pour la pluie ils ont mis au point un système à base de RiCurves (de petits rubans, en somme) de largeur variable qui figuraient les « traits » de la pluie tombant. En jouant sur la longueur et largeur des RiCurves ce système permettait de créer les différents types de pluie.
Il y a tout un système d’optimisation et d’astuces qui se sont faits au fur et à mesure du projet.



Ci-dessus : premier test d’animation (style & look) du Parapluie Bleu. Vidéo Disney / Pixar.

La profondeur de champ et le bokeh ont été travaillés lors du compositing, comment avez-vous géré cela ?

Ca reste un outil, on avait tout de même un gros contrôle sous NUKE. Pour le bokeh nous avons utilisé le plug-in Bokeh de Peregrine Labs, l’éditeur de Yeti. Cet outil offre notamment le support du deep compositing.
On a aussi utilisé beaucoup de color grading et de grain dans NUKE, pour obtenir un aspect « film », un aspect réaliste et pas trop clean.

La contrainte du photoréalisme a-t-elle été déroutante ?

Pas tant que ça. L’éclairage était plus poussé mais le shading reste semblable. On avait l’avantage de ne pas avoir de plate à matcher, donc pas de contrainte majeure.




Ci-dessus : test de rendu look & feel sous la pluie, la nuit et avec profondeur de champ.
Vidéo Disney / Pixar.

 

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