Greg Jennings, Lead Lighter chez DreamWorks Animation

Greg Jennings

3DVF : Quels sont les liens entre l’unité indienne et les USA, en pratique ? De quel degré d’autonomie disposent les artistes indiens ?

Greg Jennings : De plus en plus de productions s’effectuent entre les trois sites de DreamWorks et il s’est établi avec le temps une méthode de travail commune. Nous communiquons quotidiennement nos questions aux US par email et avons une à deux fois par semaine des réunions en vidéo-conférence qui nous permettent de présenter nos plans au Production Designer et au VFX Supervisor comme si nous étions sur place.

En termes d’autonomie, nous avons les mêmes libertés que si nous étions des artistes américains. Je pense que c’est d’ailleurs une des raisons du succès de DDU qui responsabilise les artistes indiens et considère cette antenne comme une entité à part entière du groupe.

Merry MadagascarMerry Madagascar – DreamWorks Animation

 

Merry Madagascar
Merry Madagascar – DreamWorks Animation

3DVF : Comment s’est poursuivi ton parcours, que ce soit à Glendale ou chez PDI ?

Greg Jennings : À la fin de mon contrat à DDU on m’a proposé de devenir Lighting Artist à Glendale, ce que j’ai fait pendant deux ans avant de repartir en Inde en tant que Lead.


Merry Madagascar

3DVF : En quoi consiste ton travail actuel de lead lighter, au quotidien ?

Greg Jennings : Mon travail se partage entre résoudre des problèmes techniques, fabriquer un lighting rig solide et simple d’utilisation, et éclairer les key shots de la séquence. En général je consacre mes matinées aux petites taches rapides (emails, répartition des tâches, mentoring des lighters, retouches Nuke…) ce qui me laisse l’après-midi pour adresser les notes et attaquer des choses un peu plus consistantes. Au début d’une séquence je vais passer davantage de temps à l’organisation des assets et du rig, et mettre en place l’architecture globale, puis venir progressivement affiner le lighting et peaufiner les détails au cas par cas.

 

Shrek 4

Shrek 4
Shrek 4 – DreamWorks Animation

3DVF : Revenons sur tes projets passés, et notamment Shrek 4 : tu as travaillé sur une scène au cours de laquelle Shrek disparait tandis que Fiona l’embrasse, alors que le soleil se lève…
Quelle a été ton approche sur ce plan ? Concrètement, comment as-tu abordé l’éclairage lorsque Shrek est encore présent et émet un halo, puis lorsqu’il a disparu et que le soleil se lève ?

Greg Jennings : Shrek 4 est le premier projet sur lequel j’ai travaillé à mon retour d’Inde et j’ai eu beaucoup de libertés sur ces plans. Ce plan est un « hero shot » qui nécessitait une attention particulière et les deux aspects essentiels étaient le mouvement du soleil sur le couloir et l’interaction de Shrek avec Fiona et le décor. C’est un exemple parfait de plan dans lequel la lumière a une importance particulière dans la narration et c’est le timing des différents éléments qu’il était crucial de réussir.

Techniquement rien de fou, mais j’ai séparé toutes les passes de rendu et géré le plan en compositing pour plus de facilité. Le soleil sur les murs du couloir ainsi que les volumétriques étaient parentés à un joint animé, Shrek était transformé en source de lumière dorée pour la passe de gathering et quelques point lights ont suffit a raffiner la contribution lumineuse sur le sol. J’ai aussi pour habitude de sortir quelques passes de rendu de gradients et de mattes pour contrôler plus précisément ce genre d’effets.

Shrek 4


 

Shrek 4
Shrek 4 – DreamWorks Animation
Madagascar 3
Madagascar 3 – DreamWorks Animation

 

Madagascar 3

 

3DVF : Pour Madagascar 3, tu as été lead lighter sur la première séquence du film. L’ambiance est assez chaleureuse, on sent que le soleil est proche de la fameuse « golden hour »… Quelle était l’idée globale derrière la gestion de cette séquence ?

Greg Jennings : C’est le début du film donc on essaye de commencer de manière joyeuse !

L’idée de la séquence était de faire le raccord avec la fin de Madagascar 2, mais au fil des semaines la direction artistique a légèrement changé et il a été décidé de partir sur des teintes un peu plus lumineuses et dorées par rapport aux teintes plus orangées prévues à l’origine. Il fallait aussi contraster avec le passage dans lequel Alex fait un cauchemar juste après cette séquence, qui est entièrement rendu en teintes grises avec des plans en grand angle qui déforment les personnages et leur donnent une allure grotesque et effrayante.

Cette séquence a pris un peu de temps à mettre en place car il y avait énormément d’herbes hautes qui n’étaient pas optimisées et cela a pris quelque temps à trouver les bons paramètres. Nous avons un système de segmentation du scatter par des courbes de région ainsi que des contrôles de lod (level of detail) qui allègent considérablement la scène et les temps de rendu mais dans ce cas précis trop de découpages entrainaient des problèmes de compositing. Avoir des étendues aussi grandes d’herbes est aussi problématique pour les Surfacing Artists qui avaient du mal à avoir une vision d’ensemble de l’environnement. Les herbes ont beaucoup de teintes subtiles pour créer des variations mais il a fallu sortir des passes de rendu de hauteur et séparer les sources de lumière pour ajuster le résultat en compositing.

 

Madagascar 3
Madagascar 3 – DreamWorks Animation
Merry Madagascar
Merry Madagascar – DreamWorks Animation


3DVF : Tu as aussi travaillé sur des formats courts tels que Merry Madagascar, un « christmas special » destiné à la télévision… Sur ce type de projet, les méthodes de travail changent-elles ? Quelles sont vos contraintes par rapport à des longs-métrages, en termes de délais, moyens humains et techniques, contraintes de rendu ?

Greg Jennings : Cela peut paraître surprenant mais c’est très similaire à tous points de vue. Parfois les budgets sont plus serrés et cela peut se ressentir dans l’économie d’effets et le nombre limité de personnages à l’écran mais sur Merry Madagascar l’ambition de DDU était de fournir un résultat aussi parfait que possible pour tordre le cou aux idées reçues et confirmer la valeur du studio auprès de DreamWorks.


 

Merry Madagascar
Merry Madagascar – DreamWorks Animation

 

3DVF : Quelques mots sur ton approche sur les plans intimistes autour de la table, ainsi que sur les plans en montgolfière ?

Greg Jennings : Le plan autour de la table est un « establishing shot » classique où l’approche est de mettre toute l’attention sur les personnages. Le « look » Madagascar est assez graphique et permet de beaucoup tricher car 75% du lighting se fait avec des spots, contrairement aux films plus récents qui utilisent davantage de IBL (image based lighting).  Les yeux sont toujours légèrement surexposés et désaturés, les personnages gardent d’avantage de leur couleur locale et dans ce cas précis l’environnement est vigneté pour renforcer le sentiment d’un moment intimiste.

Pour les plans en montgolfière le directeur artistique voulait absolument un « day for night », ce qui revient à traiter la lune comme un soleil et créer une « nuit américaine » améliorée. Comme expliqué plus haut, les personnages doivent cependant garder leur couleur locale au maximum ce qui rend l’exercice intéressant quand on éclaire un lion jaune avec du bleu 🙂

Quand la montgolfière s’embrase je ne voulais pas d’un setup compliqué pour un seul plan et j’ai choisi de faire un rendu des flammes, qui était ensuite déformé et ajusté dans notre logiciel de compositing, avant de servir de masque dans une light. Le plan est rapide et le style cartoon de Madagascar nous permet parfois ce genre de liberté.

Montgolfière
Montgolfière
Merry Madagascar – DreamWorks Animation
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