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Julius Horsthuis, artiste fractal

Julius Horsthuis
Nous avons plusieurs fois eu l’occasion d’évoquer les travaux de Julius Horsthuis, qui utilise les fractales pour créer des animations envoûtantes.
Nous vous proposons aujourd’hui de découvrir plus en profondeur son univers au travers d’une interview sur son parcours, ses méthodes de travail et inspirations.

Our Fractal Brains from Julius Horsthuis on Vimeo.

3DVF : Pour commencer, quelques mots sur votre parcours ?

Julius Horsthuis : Mon bagage de connaissances porte principalement sur le cinéma. A partir de 12 ans (en 1992) j’ai commencé à jouer avec une caméra vidéo que j’avais, et réalisé des petits films. Je voulais aller en école de cinéma, mais j’ai été rejeté plusieurs fois. J’ai donc travaillé sur les plateaux de cinéma dans des domaines techniques, comme les départements caméra, son, éclairage.
A partir du lycée, j’ai commencé à jouer avec 3ds Max, et je faisais un peu de VJ-ing. En 2005, j’ai commencé à travailler pour une petite société de production numérique, et j’ai pu commencer à fusionner mon bagage technique issu des plateaux à celui acquis via la 3D.

3DVF : Comment vous êtes-vous intéressés aux environnements en fractales ?

Julius Horsthuis : J’avais vu des vidéos sur Youtube ; je me souviens surtout de celles de Krzysztof Marczak en 2010. Le côté étrange des formes, et l’idée qu’elles étaient émergentes et non créées à la main, me stupéfiaient. J’ai été immédiatement fasciné et j’ai pensé que les fractales feraient d’excellents décors virtuels de cinéma.

 

Emergence from Julius Horsthuis on Vimeo.

3DVF : Travaillez-vous toujours en tant que VFX Designer, ou vous concentrez-vous sur l’art fractal ?

Julius Horsthuis : Je poursuis ma carrière en tant que VFX Designer chez une société hollandaise, Hectic Electric. Ils travaillent sur des projets très divers, de la publicité au cinéma en passant par la réalité virtuelle. Nous avons une excellente équipe d’artistes talentueux et aux compétences multiples.
Rester plongé dans les dernières technologies du monde VFX aide beaucoup.

3DVF : Au fil des ans, vous avez créé plusieurs courts impressionnants. Quel est votre processus créatif ?

Julius Horsthuis : Merci pour le compliment ! Généralement, je compare ce processus avec la photo de nature. L’art fractal est à l’opposé du design. Je commence un projet en essayant de combiner des formules ensemble dans Mandelbulb3D pour voir si des formes intéressantes émergent. Parfois rien ne se passe, mais il arrive que des choses extraordinaires se produisent. Dans ce cas, je commence à explorer, à « partir en éclaireur » dans ces formes fractales. Quand je le fais, mon esprit se perd dans cette immensité…


Des formes commencent à véritablement émerger, et quand elles ressemblent à quelque chose, la plupart du temps je vais jouer avec ça. Par exemple, si une forme évoque une montagne, je vais la colorer de la même façon qu’une vraie montagne, et l’éclairer avec un soleil bas sur l’horizon, rajouter de la brume. Cette étape est importante car l’oeil humain cherche ce qu’il connaît. Le danger de l’art fractal est qu’il devienne tellement abstrait que l’esprit n’y comprend plus rien.
J’essaie donc de dire : « regardez, une plante », mais lorsque vous regardez, ce n’est pas tout à fait une plante.

Le rendu prend des jours voire des semaines, donc une fois qu’il est finalisé je le visionne avec un regard neuf, et je commence à développer un thème. J’applique alors une correction colorimétrique lourde sous After Effects pour avancer dans le look que je veux mettre en place, et je fais appel à des palettes de couleur issues de films connus. Parfois, j’inverse totalement l’animation, ou j’applique une symétrie. Je fais du re-mapping temporel pour synchroniser l’animation avec une musique que j’aurai passé un temps fou à chercher.

Fractal Nature from Julius Horsthuis on Vimeo.

3DVF : D’où tirez-vous votre inspiration ?

Julius Horsthuis : De beaucoup d’endroits évidemment, mais principalement du cinéma. J’aime vraiment la magie des films, et les atmosphères de nombreux films de SF ont sans doute influencé mes travaux d’une façon ou d’une autre.

J’admire en particulier des réalisateurs comme Nolan, Fincher et Cameron, mais aussi Noé, von Trier et Linklater.

 

3DVF : La couleur est de toute évidence un point important de votre travail. Comment abordez-vous cet aspect sur un projet donné ?

Colorer les fractales améliore vraiment leur aspect. Quand les rendus sortent de Mandelbulb3D, ils ont vraiment un côté « rendu 3D » et sont plats. Avec les outils de colorisation d’After Effects, je crée de la profondeur et une ambiance.
Je vois également la couleur comme une extention du processus, qui permet de rendre les fractales abstraites aussi tangibles que possible, par exemple en donnant à une montagne fractale une palette de couleurs proche de celle de vraies montagnes.
Tout ceci permet d’ancrer l’abstrait dans la réalité, et rend nos esprits plus curieux, puisqu’il s’attendent à quelque chose.

 

 

Could There Be Other Explanations? from Julius Horsthuis on Vimeo.

3DVF : Vous utilisez donc le logiciel Mandelbulb3D pour vos projets : pourquoi cet outil ?

Julius Horsthuis : Autant que je sache, il n’y a que deux outils qui puissent faire des animations 3D de fractales : Mandelbulber et Mandelbulb3D. Il y en a en fait un troisième, mais non disponible publiquement.

Je n’ai jamais fait de choix conscient, mais j’ai commencé à jouer avec Mandelbulb3D (MB3D) et j’ai apprécié la façon dont l’outil était conçu. Il me semblait logique, et quand j’ai découvert qu’il disposait d’une interface pour le rendu d’animations, avec des possibilités (basiques) de rendu réseau, j’ai été conquis.

Il n’est pas très intuitif, mais une fois qu’on le maîtrise, il y a de vastes possibilités et il est facile de jouer avec les formules. Il dispose également un bon feedback temps réel, on peut donc faire des essais et voir immédiatement le résultat.

3DVF : Y a-t-il des limitations ? Quelles améliorations voudriez-vous voir ?

Julius Horsthuis : Malheureusement, le développeur a arrêté d’améliorer l’outil, et j’utilise la même version depuis maintenant 3 ans environ, sans la moindre mise à jour.
Voici tout de même ma liste de souhaits :
– plus de render layers, avec par exemple Z-buffer 16 bits, normales, réflexions, etc. ;
– l’illumination globale serait un gros plus : actuellement, l’outil se contente d’ambient occlusion ;
– le support des reflets de type Fresnel ;
– l’import/export de données de caméra ;
– ou, tout simplement, avoir MB3D disponible en tant quet plugin 3ds Max, à la manière du logiciel Vue, afin que je puisse faire tout le rendu sous V-Ray !

Beaucoup d’utilisateurs réclament l’export de la géométrie mais ce serait de la folie : le nombre de polygones serait bien trop élevé.

 

Soroban from Julius Horsthuis on Vimeo.

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