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Créativité foisonnante et prix prestigieux : les secrets de la montée en puissance de l’école Piktura

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Cet article est sponsorisé par Piktura.

Anciennement connue sous le nom Pôle 3D, l’école Piktura vient de fêter ses 20 ans. Située à Roubaix, elle se caractérise notamment par une production de films étudiants très riche, avec des thèmes forts et une grande diversité de styles visuels. On assiste à une véritable montée en puissance de l’établissement depuis quelques années, qui se reflète dans les festivals mais aussi dans les studios : il y a quelques semaines, un ancien élève a par exemple rejoint l’équipe du studio belge nWave en tant que réalisateur.
Outre l’aspect qualitatif, on note également de vraies prises de risques dans les films, là où d’autres établissements hésitent à sortir des sentiers battus.
Comment Piktura est-elle parvenue à se démarquer et à mieux accompagner le potentiel de ses élèves ? La réponse dans cet article.
Vous y trouverez aussi une sélection de films Piktura de ces dernières années, qu’il s’agisse de projets primés en festival ou de courts au parti prix audacieux.

3DVF : Bonjour Piktura ! Les personnes qui suivent l’évolution de l’école (anciennement Pôle 3D) l’ont forcément remarqué : il y a une vraie montée en qualité dans la qualité des films de fin d’études de l’école ces dernières années. Des projets comme Migrants, Les Larmes de la Seine, qui avaient donné lieu à des interviews sur 3DVF (interview Migrantsinterview Les Larmes de la Seine), ont d’ailleurs récolté une avalanche de prix dans les Festivals, y compris dans des évènements prestigieux comme SIGGRAPH ou les Student Academy Awards.
Comment expliquez-vous cette montée en puissance ? Changement dans le processus de sélection, amélioration de la pédagogie ?

Piktura : Nous voulions progresser en réalisation et surtout ne pas craindre la prise de risques sur les thématiques de nos films. Ce n’était pas simple de faire adhérer tout le monde à cette idée, et le plus difficile était d’enclencher le début de cette transformation.
Au début, le processus de sélection était timide et nos étudiants n’avaient pas d’exemples concrets sur ce qu’ils pouvaient réaliser en termes de films plus matures. Il a fallu beaucoup échanger et avancer petit à petit pour qu’ils prennent conscience de ce qu’ils pouvaient oser proposer et avec quelle pertinence.

« nous recherchons des étudiants motivés dans l’idée de raconter leurs propres histoires, de parler des sujets qui les touchent, tout en ayant une grande liberté artistique »

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Notre pédagogie devait également évoluer, en essayant de repousser nos limites de production, aussi bien sur le sens de nos films que sur les techniques de fabrication toujours plus complexes. Il fallait être plus curieux envers tout ce qui pouvait nous enrichir en passant par de la veille sur des films extérieurs ou toute démarche artistique intéressante.
Nous voulions participer à cette évolution stimulante des contenus de films toujours plus innovants.

Plus le temps passe et plus nous recherchons des étudiants motivés dans l’idée de raconter leurs propres histoires, de parler des sujets qui les touchent, tout en ayant une grande liberté artistique. Cela représente beaucoup d’échanges et un suivi conséquent de l’équipe pédagogique.

L’équipe du film Les Larmes de la Seine, nommé aux Student Academy Awards en 2022
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3DVF : Un point notable chez Piktura est la volonté de faire réaliser des courts-métrages en équipe dès la 3ème année, ce qui n’est pas le cas de toutes les écoles, mais aussi et surtout de les présenter également lors des jurys de fin d’études.
Pourquoi ces choix ?

Nous estimons que cette double expérience est bénéfique car nos étudiants de 5ème année acquièrent une maturité de fabrication liée à leurs expériences de films de 3ème année.
Il est à noter que nous envoyons en festivals les films de 3ème et 5ème année afin que nos étudiants comprennent mieux les enjeux de réalisation.
Cela donne aussi une dynamique où les étudiants de 5ème année montrent plus d’ambition vis-à-vis de leur premier film, et que ceux de 3ème année se challengent afin que leurs films puissent tenir la comparaison face aux films de 5ème année.

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3DVF : Visuellement, les courts proposent des styles variés, avec parfois du rendu stylisé très spécifique, comme le fauvisme 3D de Ny Fiaran’i Dada. Cela implique évidemment de créer un pipeline, des outils spécifiques, et donc autant d’écueils à surmonter.
Comment estimez-vous ces prises de risque, afin que les élèves n’aillent pas s’engouffrer dans des voies qui seront trop complexes ?

Les équipes formées pour la réalisation réunissent à la fois des artistes, des techniciens et des concepteurs. Arrivés en Master, nos étudiants ont réuni les compétences nécessaires à la réalisation. C’est justement cette prise de risque qui fait la force de nos productions et qui leur attribue de très belles références après la diplomation.
Chez nous, la fabrication de films aux rendus stylisés est plutôt développée en 5ème année et cela implique souvent du développement technique pour obtenir une nouvelle approche visuelle. Ce développement très conséquent implique d’avoir dans le groupe des étudiants aptes à relever ce défi technique. La pédagogie doit donc connaitre le potentiel technique et artistique de chacun de ses étudiants et leur apporter l’aide nécessaire pour relever ces défis complexes.

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3DVF : Un autre élément frappant est la grande diversité des sujets. Les Larmes de la Seine reprend un épisode sombre de l’histoire de France, Ferme les yeux aborde les abus sexuels, A Bicyclette suit les derniers jours d’un vieil homme… D’autres écoles restent sur des sujets plus convenus. Est-ce une volonté délibérée de votre part de pousser les élèves vers des thèmes forts ?

Ces thématiques fortes viennent de nos étudiants et nous sommes attentifs aux messages que les nouvelles générations veulent délivrer. Nous n’influençons pas nos étudiants sur les thématiques mais les aidons du mieux que nous pouvons pour que le message délivré soit le plus pertinent et le plus adéquat. Comme pour le suivi technique, il y a un suivi artistique pour aider nos étudiants à tirer le maximum du potentiel de leur idée de base.
Un des axes pédagogiques de notre école est de proposer des expériences contemplatives et interactives uniques. Chaque œuvre doit permettre de bouleverser les conventions, de changer le regard sur un thème du passé ou de l’actualité.

« nous sommes attentifs aux messages que les nouvelles générations veulent délivrer. Chaque œuvre doit permettre de bouleverser les conventions. »

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3DVF : Concrètement, comment se passe le processus de choix des pitchs/sujets ? Comment guidez-vous les élèves, et quelles limites placez-vous ? Et comment faites-vous pour que les élèves soient assez à l’aise pour aborder aussi des sujets très délicats à traiter ? 

Nos étudiants proposent des sujets via un dossier de production (concepts de personnages, de décor, scénario, story board). Ensuite, une sélection est effectuée par l’équipe pédagogique. Les leaders des projets sont sélectionnés par rapport aux sujets retenus. Enfin, les étudiants effectuent un classement des sujets qui les inspirent le plus et l’équipe pédagogique forme les groupes en fonction des préférences et des compétences complémentaires et surtout nécessaires pour les besoins de la réalisation.

3DVF : A l’inverse, on voit peu de comédies ces dernières années à Piktura : hasard, volonté de l’école, des élèves ?

Il est vrai qu’il se dégage de chaque établissement une patte et un ton de narration et il est vrai aussi que les comédies sont plus rares chez nous. Ceci dépend des propositions initiales de nos étudiants. Nous expliquons souvent à nos étudiants la genèse de la création, il y a souvent dans un processus créatif une part de mélancolie ou de mal être que l’on veut exprimer. Cela se vérifie dans la plupart des mouvements artistiques, aussi bien dans la littérature que la musique.
La comédie est un sujet très difficile à aborder. Nos films comportent néanmoins quelques touches humoristiques propres au projet pédagogique de l’établissement.
Nous ne fermons pas la comédie de genre à nos étudiants. Il faut en revanche trouver le projet qui apporte quelque chose de nouveau. Si nous décelons une comédie innovante et pertinente, nous n’hésiterons pas à relever le défi.

« Nous apprenons à nous faire confiance afin d’explorer des mises en scènes nouvelles »

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3DVF : Quelques mots également sur l’accompagnement en termes de réalisation ? Par exemple, A Bicyclette est finalement très contemplatif, avec un rythme lent qui aurait facilement pu donner des longueurs, mais qui a réussi à faire mouche. Stabat Mater, film qui a séduit tout le jury 2023, propose une double narration et un double plan séquence, là encore un choix risqué.
Comment guidez-vous les élèves de Piktura pour que ces expérimentations fonctionnent ?

Si nous faisons face à un choix de mise en scène conventionnel ou plus risqué, nous prendrons toujours la voie la plus risquée. Nous apprenons à nous faire confiance afin d’explorer des mises en scènes nouvelles vis à vis de la filmographie de notre école.

Il faut, à la base, un esprit qui veut exprimer quelque chose de différent. Les 2 exemples cités viennent de la réalisatrice Océane Lavergne pour A Bicyclette et du réalisateur Hadrien Maton pour Stabat Mater. Ils avaient cela en eux, cette volonté de sortir des sentiers battus.
Nous les accompagnons pour tirer le maximum de leurs potentiels.
Pour les guider, il y a bien évidement une grosse préproduction avec beaucoup d’expérimentations en amont. Nous adaptons ensuite, selon les avancées des étudiants, le curseur de la prise de risque. Ils nous arrivent d’être face à une impasse de mise en scène. Si nous manquons de temps, nous restons organiques pour rééquilibrer et trouver le meilleur compromis.

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3DVF : Le film qui a le plus repoussé les limites de l’expérimental est sans doute Ideal, un projet de Licence 3 au croisement de Baudelaire et de la « 3D Cassée ». Un film que nous avions beaucoup apprécié durant le jury, mais qui a dérouté d’autres personnes.
Comment abordez-vous avec les élèves ce type de projet très affirmé ? 

Effectivement, avec un film « 3D Cassée » avec un montage non linéaire, qui flirte avec l’abstraction narrative, nous pouvons dire que la prise de risque est au maximum.
De notre côté, nous trouvons intéressant les films qui suscitent des réactions, des questionnements et qui cherchent à provoquer des émotions différentes. Les films qui divisent sont souvent bon signe.

Le ton du film IDEAL vient de l’esprit de la réalisatrice Mathilde Nicolas, qui a un univers bien à elle, il était donc simple pour nous d’aborder l’approche expérimentale. En revanche, il est parfois plus complexe de faire adhérer les étudiants qui vont travailler en groupe. Même s’ils choisissent les projets sur lesquels ils veulent travailler, il faut être sûr que l’équipe comprenne bien les enjeux, qu’ils ne soient pas dans une fausse idée de la direction finale. Pour cela, beaucoup d’échanges sont nécessaires, nous devons essayer, en équipe, d’imaginer ce que nous voulons délivrer.
Pour finir, nous restons toujours dans l’idée que chaque film qui tente d’innover est une pierre posée pour les futures générations et que cela permettra de repousser encore plus loin les futures expériences artistiques.

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3DVF : Entre les jurys, les salons et évènements, vous échangez régulièrement avec les studios.
Comment gérez-vous ces retours, lesquels intégrez-vous dans la pédagogie ?

Toutes formes de rencontres avec les professionnels représentent une opportunité pour nos jeunes talents. C’est un enjeu capital et nous essayons d’inviter un maximum de représentants afin de créer du lien.
Comme la plupart des écoles, nous sommes présents lors des salons afin de renseigner nos futurs entrants et nous participons aux divers événements pour découvrir les nouvelles tendances et les nouveaux enjeux qui agitent la communauté audiovisuelle.

« nous avons maintenant un focus très important sur les festivals »

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3DVF : Evidemment, même un bon film ne se fait pas connaître seul.
Quelle est votre stratégie pour mettre en avant les films dans les festivals ? Et comment déterminez-vous quel film inscrire à tel ou tel évènement ?

Avec nos expériences passées, nous avons maintenant un focus très important sur les festivals. Nous faisons confiance à notre expertise pour la sélection des films que nous envoyons.
Comme écrit plus tôt, nous voulons que nos étudiants comprennent les enjeux de la réalisation, qu’ils rencontrent des réalisateurs de leur génération ou plus expérimentés. Qu’ils se confrontent à des producteurs, des organisateurs et des membres de jurys afin qu’ils créent de l’émulation pour ouvrir leurs contacts réseaux du futur. Partir en festival n’est pas adapté à tous les étudiants, mais plutôt pour ceux qui sont sérieusement intéressés de comprendre les mécanismes de la réalisation.
C’est aussi l’occasion pour nos talents de voyager à travers le monde après un dur travail ambitieux. Défendre et recevoir les critiques sur leurs films, c’est quelque chose d’enrichissant et de gratifiant pour eux.
Quand un film se démarque, ils sont invités et pris en charge par les festivals de renoms. Les étudiants reçoivent aussi des sommes financières conséquentes quand ils remportent certains prix prestigieux.

Pour nous aider dans cette distribution, nous avons la chance de collaborer avec Patrick De Carvalho de la structure Je Regarde, sa mission est dantesque et participe à ce travail d’équipe global.

3DVF : Parlons un peu d’un sujet qui fait couler beaucoup d’encre… Les IA génératives. Le sujet génère des échanges passionnés dans le milieu, et une forte division entre les enthousiastes, les prudents, les personnes qui craignent que cela ne tue des emplois… Comment voyez-vous le sujet, et comment le traitez-vous dans le cursus Piktura ? Quelle perception en ont les élèves ?

De notre perception, le progrès est en marche, nous devons l’envisager comme tel, cela va certainement bouleverser nos métiers et les outils de production. Cependant, ce qui différencie le créatif d’une IA reste singulier car l’intention est la priorité qu’il nous semble important de protéger et de garantir. L’intention d’un artiste de dénoter ou de connoter ses images, de manipuler langages, découpage, formes, couleurs et symboles sont parmi les ingrédients qui sont à combiner pour livrer une œuvre, qu’elle soit collective ou individuelle.
A ce titre, nous estimons utile pour nos étudiants d’expérimenter différents outils d’IA génératives, avec, indéniablement, de fortes chances pour que cela devienne une forme d’assistant de « production » agissant sur certaines taches de conception ou de mise en œuvre exécutables pour les artistes / techniciens de nos métiers. Nous intégrerons des modules pédagogiques dédiés dès la rentrée prochaine.

Par ailleurs, un comité de veille sur le sujet, composé des responsables / directeurs de filières, d’enseignants chercheurs et chercheurs explorent les possibilités, usages et bonnes pratiques à mettre en place dans nos cursus.

« publier un bilan carbone chaque année et réduire nos émissions d’au moins 30% d’ici 2030 »

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3DVF : Autre défi majeur du secteur : la transition écologique, alors que l’animation 3D est traditionnellement très gourmande en énergie et en machines dernier cri. En tant qu’école, comment travaillez-vous sur ce sujet ?

Nous suivons de près ces sujets, l’Université catholique de Lille et ses écoles, sont signataires des accords de Grenoble. En substance, cela fixe des objectifs pour nos entités, former salariés et étudiants aux enjeux socio-écologiques, transformer nos campus pour répondre à ces enjeux, publier un bilan carbone chaque année et réduire nos émissions d’au moins 30% d’ici 2030 (et même 35% pour être aligné à l’objectif planétaire 2°C….). Pour ces raisons, notre nouveau campus se veut également plus vertueux, avec une meilleure performance énergétique et une réduction des émissions de carbone. Nous avons également mis en place des systèmes de vigilance quant à l’économie d’énergie (automatisation des veilles profondes et extinction des systèmes, gestion des périodes de calcul…). En termes de pipeline, l’école développe également des outils de gestion et de monitoring de production pour éviter le gaspillage énergétique sur des calculs d’images non optimisés. Et finalement, au travers de nos liens avec nos partenaires, notamment les associations professionnelles régionales (Noranim, Game IN…) nous restons attentifs aux différents outils émergents permettant de mesurer l’impact carbone de la production d’une œuvre de type film d’animation ou jeu vidéo.

ITFS 2023, au cours duquel un prix a été remis pour le film Le Cri du Silence (projet de 3ème année)
Crédit: ITFS/Reiner Pfisterer – CC BY-NC-SA

3DVF : Une dernière question : quels sont vos priorités pour les années à venir, en termes de pédagogie, de développement de l’école Piktura ?

En même temps que nos étudiants, la pédagogie doit s’améliorer d’année en année.
Il nous reste encore beaucoup d’axes où nous devons être plus pertinents. Il y a quelque chose de stimulant et nous essayons de voir jusqu’où nous pouvons repousser nos limites en équipe.
Nous continuerons de laisser nos étudiants s’exprimer, et nous espérons que des nouvelles générations talentueuses voudront nous rejoindre pour perpétuer et faire évoluer la mise en scène cinématographique. Que les futurs talents viennent se développer chez nous pour faire éclore leur potentiel de demain !

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