Une formation gratuite et même rémunérée pour aider les jeunes en situation de décrochage scolaire à s’insérer dans le secteur du jeu vidéo en devenant testeur/testeuse, c’est la proposition d’Avenir en jeu, programme lancé par plusieurs associations, entreprises et écoles. La première promotion a débuté ce lundi.
Table des matières
7 mois pour devenir QA tester
Derrière la formation, un constat : de nombreux jeunes de moins de 25 ans se retrouvent dans une situation précaire après leur sortie du système scolaire (ni en études, ni en emploi, ni en formation). Ils seraient environ 10 000 rien qu’en Seine-Saint-Denis.
D’où l’idée, portée par différents acteurs du secteur du jeu vidéo, de créer une formation qui pourrait cibler spécifiquement ces jeunes afin de les aider à se réinsérer/insérer dans le monde du travail, mais aussi de leur permettre de décrocher un diplôme.
L’association Horizon Jeu Vidéo s’est associée à plusieurs partenaires pour y parvenir :
- L’École de la Deuxième Chance, association à but non lucratif centrée sur l’insertion citoyenne et sociale via l’insertion professionnelle,
- l’école d’animation 3D, VFX et jeu vidéo ISART Digital,
- le Cnam-Enjmin qui forme au jeu vidéo et aux médias interactifs,
- Play In Lab, entreprise spécialisée dans les playtests, le debugging ou encore l’analyse de données pour le secteur du jeu vidéo.
Leur objectif annoncé : former en 7 mois une trentaine de jeunes au métier de QA Tester, avec à la clé un certificat professionnel.
Vous avez dit QA Tester ?
Rappelons que le travail des QA Testers consiste à tester des jeux vidéo dans le but de faire remonter bugs, problèmes de jouabilité ou encore soucis d’interactions. En clair, aider ces personnes vont aider le studio de développement à détecter les problèmes afin de pouvoir les éliminer.
L’annonce de lancement d’Avenir en Jeu détaille davantage ce métier :
Maillon essentiel, garant de la qualité d’un jeu vidéo, les QA Testers testent de bout en bout le jeu et y relèvent les anomalies et incohérences qui seront remontées en amont de sa commercialisation pour être corrigées par les équipes de production. La testeuse ou le testeur teste dans les moindres détails la jouabilité, les interactions et multiplie les possibilités d’actions comme le feraient les joueurs. Leur rôle est également consultatif puisqu’ils peuvent proposer des corrections, les vérifier et rendre compte des modifications qui auront été apportées.
Le rôle d’une ou d’un QA Tester est de tester le jeu dans son intégralité en listant les points qui méritent un ajustement de la part des développeurs ou game artists. Impossible au travers de tests automatiques réalisés par des logiciels, la « patte humaine » est incontournable pour prendre en main le jeu et classer les bugs repérés en fonction de leur catégorie intemporel (bug d’action, d’information, etc.) ou temporel (bugs de position, d’événements interrompus, etc). Les QA Testers suivent ainsi des protocoles précis et font usage de leur expérience pour remonter toute erreur ou anomalie.
Le métier de QA Tester nécessite des qualités pour l’analyse fine d’un jeu vidéo, dans une expérience de jeu la plus aboutie et la plus poussée par un joueur ou une joueuse capable de le disséquer totalement. Il est donc avant tout un métier qui requiert une patience extrême pour faire et refaire un nombre de fois infini les mêmes actions pour tracker les anomalies qui pourraient surgir dans un jeu.
Première promotion, contenu de la formation
La première édition de la formation a commencé ce lundi. Les candidatures ont été sélectionnées selon plusieurs critères :
- personnes de 18 à 25 ans du 18ème arrondissement et de Seine-Saint-Denis n’ayant aucun diplôme (pas de bac).
- sélection en fonction de la motivation et des aptitudes (intérêt pour l’informatique et le jeu vidéo, aisance en lecture/écriture de français, volonté d’apprendre langlais).
Les acteurs impliqués dans cette initiative soulignent leur objectif d’inclusivité et de diversité, dans un secteur encore peu féminisé et dont l’accès se fait souvent par des écoles payantes.
La formation se déroulera en plusieurs phases :
- formation découverte autour du secteur du jeu vidéo ;
- formation au métier de QA Tester (fondamentaux, test tout au long de la vie d’un jeu, design de tests et management) ;
- stage en entreprise (un accompagnement à la recherche est prévu).
Pour les personnes intéressées, n’hésitez pas à faire un tour sur le site d’Horizon Jeu Vidéo, qui vous donnera tous les détails. Les inscriptions pour cette première session sont déjà closes, mais il est possible de s’inscrire pour se tenir au courant des actualités et futures formations.
De nombreux soutiens
Avenir en jeu dispose de plusieurs porte-paroles en lien avec le secteur du jeu vidéo :
- Oskar Guilbert, co-président d’Horizon jeu vidéo Ile-de-France, PDG de Don’t Nod,
- Marianne Tostivint, co-présidente Horizon jeu vidéo Ile-de-France, Game Director Gamabilis,
- Cyrille Imbert, Président de Capital Games, CEO de DotEmu,
- Hélène Delay, Directrice générale de Capital Games,
- Karin Houpillart, directrice d’ISART Digital,
- Sofiane Draa, Responsable pédagogique QA test d’ISART Digital.
Différentes entreprises et entités soutiennent le projet, que ce soit en tant que mécènes ou au travers de l’association Horizon Jeu Vidéo Ile-de-France : la Région Ile-de-France, l’association Game Only, la Bourse du Jeu Vidéo (qui vise à renforcer la diversité sociale dans le secteur du jeu vidéo), le studio DON’T NOD, le SELL (syndicat des éditeurs de jeux vidéo).
D’autres initiatives
L’initiative Avenir en Jeu mérite évidemment d’être saluée : les écoles liées au secteur du jeu vidéo ont généralement un coût élevé, ce qui crée un frein à l’entrée qui peut s’avérer insurmontable pour de nombreuses personnes et est un frein à la diversité dans l’industrie.
Des concepts similaires existent dans d’autres secteurs de la création numérique : on pourra citer ici l’ECAS, lancée en 2018 sur le site de la Cartoucherie dans la Drôme, qui propose une formation très intensive à l’animation 3D (gratuite et sur 8 mois, sans condition de diplôme ou d’expérience professionnelle).
Pour un public plus jeune, on peut également rappeler l’existence de TUMO, qui forme les 12-18 ans en extra-scolaire sur le jeu vidéo, l’animation 3D, le cinéma, le design ou encore la programmation.
Enfin, l’association Horizon Jeu Vidéo qui est derrière la formation Avenir en Jeu propose aussi des ateliers stage de 3ème, une bourse, des interventions en collège/lycée.
Le financement des études, un sujet majeur
Plus largement, le sujet du coût des études doit rester un point de réflexion majeur pour le secteur de la création numérique. Les débats qui ont eu lieu pour l’animation lors des RADI-RAF 2021, que nous avions filmés, le montrent bien. Des réflexions et actions doivent continuer à être menées si l’objectif est d’améliorer la diversité de l’industrie et de limiter le recours à des prêts aux montants très élevés, qui pèsent sur les personnes qui sortent d’école.
Bourses, renforcement des formations publiques, partenariats privés, fondations, alternance ou encore les formations gratuites comme Avenir en Jeu sont des pistes possibles. Il convient évidemment de peser les avantages et inconvénients de chaque approche.
Si vous ne l’avez pas déjà vue, nous vous conseillons de visionner la conférence des RADI-RAF 2021 sur le financement des études. En particulier, le témoignage d’Alice Rideau et les questions-réponses (timings sous la vidéo) mettent en lumière enjeux et limites qui sont valables dans l’animation mais aussi les effets visuels, le jeu vidéo. De quoi vous aider à vous faire un avis sur le sujet.
Nous aurons l’occasion d’aborder à nouveau ces questions : n’héstiez donc pas à nous suivre sur Twitter, Facebook, LinkedIn, Instagram, Youtube pour ne pas rater nos prochains contenus.